Intervention de Olivier Véran

Séance en hémicycle du jeudi 24 février 2022 à 9h00
Déclaration du gouvernement relative à l'évolution de la situation sanitaire

Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé :

Mesdames et messieurs les députés, j'ai également régulièrement entendu certains opposants à notre action estimer que l'État de droit aurait été mis en péril par la crise sanitaire. En vérité, rien n'est plus faux.

En effet, les mesures de protection prises par le Gouvernement depuis mars 2020 s'inscrivent dans le cadre d'un régime rigoureux, fixé par le Parlement. Je crois que Yaël Braun-Pivet, présidente de la commission des lois, et Fadila Khattabi, présidente de la commission des affaires sociales, ne diront pas le contraire, puisque j'ai été – sauf erreur de ma part – le ministre le plus présent en commission des lois alors que je ne détiens pas un portefeuille régalien mais celui de la santé, ce qui atteste de la richesse des travaux parlementaires.

À cet égard, je rappelle que la raison d'être du régime de l'état d'urgence sanitaire, créé par la loi du 23 mars 2020, était de fixer un cadre précis pour succéder à l'urgence des premiers jours de la gestion de crise, laquelle avait nécessité de prendre des mesures fondées sur des jurisprudences anciennes, mais dont les contours étaient trop incertains pour offrir un cadre clair et prévisible sur la durée.

Les régimes de gestion de l'épidémie sont le fruit de centaines d'heures de débats en commission et en séance publique, et de la discussion de plusieurs milliers d'amendements à l'Assemblée nationale et au Sénat. À ce titre, je tiens à saluer le travail de tous les députés, qui ont contribué aux débats de manière constructive et souvent dans des circonstances difficiles, voire dans l'urgence. Ces lois successives ont fixé un cadre rigoureux, sans cesse amélioré et précisé, afin de permettre au Gouvernement de prendre des mesures poursuivant un équilibre entre l'objectif de protection de la santé des Français et la préservation des autres droits et libertés constitutionnellement garantis.

Tous les deux à quatre mois, le Parlement a ainsi eu à examiner et à redéfinir les conditions de notre action. Ce travail s'est poursuivi en janvier, avec l'examen du douzième projet de loi déposé pour adapter la réponse à la situation sanitaire.

Régulièrement saisi sur les textes adoptés par le Parlement, le Conseil constitutionnel a constamment validé les grandes orientations des différentes lois et a largement confirmé la constitutionnalité des mesures proposées, preuve que le législateur avait pleinement exercé son office, en assurant la difficile mais juste conciliation des différents principes fondamentaux devant guider à tout instant l'action des pouvoirs publics.

Quant aux mesures que le Gouvernement a prises sur la base de ces régimes, elles ont toujours obéi à des exigences de proportionnalité et de nécessité. Elles ont, du reste, pu être aisément et rapidement contestées devant le juge administratif. À cet égard, le nombre de procédures devant le juge administratif donne le vertige, avec des centaines de référés et de recours formés tous azimuts devant les juridictions, jusqu'au Conseil d'État, depuis le début de l'année 2020. Le juge a largement validé la légalité des mesures prises par le Gouvernement et lorsqu'il a été amené à suspendre certaines décisions, le Gouvernement s'y est chaque fois conformé sans délai, en ajustant la réglementation applicable afin de trouver un équilibre plus satisfaisant en droit.

Enfin, les dizaines d'auditions consacrées à la crise sanitaire et à ses conséquences de toute nature par les commissions et délégations des deux assemblées, les nombreux rapports adoptés depuis le début de l'épidémie, ainsi que les centaines de questions orales et écrites posées sur ce sujet montrent que les fonctions de contrôle et d'évaluation du Parlement ont pris tout leur sens. Tout cela démontre que l'État de droit n'a jamais été suspendu ni affecté depuis le début de la crise sanitaire et que l'ensemble de nos institutions ont exercé leurs prérogatives respectives de manière pleine et entière, à commencer par le Parlement.

Il faut s'en réjouir, car les conditions matérielles du travail parlementaire ont été exigeantes et souvent éprouvantes. Il a fallu que chaque institution s'adapte, sans sacrifier ses devoirs ni ses missions, et nous pouvons être collectivement fiers de la vigueur de nos institutions démocratiques, même au cœur de la tempête.

Mesdames et messieurs les députés, depuis deux ans, nous avons agi et nous avons appris. Nous avons agi pour protéger les Français, quoi qu'il en coûte et quelles que soient les circonstances, malgré la lassitude et les vents contraires. Je le répète, notre seule boussole a été la santé des Français.

On ne décide pas de fermer les écoles, les restaurants et les musées par fantaisie ; on ne décide pas de confiner un pays tout entier pour se donner des vertiges ; on le fait parce que c'est une question vitale, on le fait parce que nos valeurs les plus fondamentales nous imposent de le faire. Il a beaucoup été question de liberté ces dernières semaines et ces derniers mois, il a beaucoup été question de grands principes, souvent brandis avec la fougue et la verve qu'autorise l'abstraction. Pour ma part, j'ai encore en tête des images très concrètes. Quand on organise en urgence des évacuations sanitaires par voie aérienne ou ferroviaire, d'une région à une autre, pour sauver des vies, ce sont des convois de la solidarité, ce sont des convois d'une nation qui fait bloc et qui sait que la liberté individuelle n'a de sens que dans l'entraide et dans la force du groupe.

Oui, l'État social a répondu présent et c'était tout le sens du « quoi qu'il en coûte ». Oui, l'État social s'est montré robuste et ambitieux. Nous avons chaque jour montré notre attachement à la main bien visible des solidarités, à l'égalité et à la fraternité, et notre volonté de faire de ces valeurs autre chose que des intentions vagues et mal définies. Nous en avons fait des exigences concrètes et la sécurité sociale a prouvé, si besoin en était, qu'elle était un bien précieux, capable d'accompagner chacun dans la tourmente, dans le doute et même dans la peur. Trouver aujourd'hui, dans une société où les divisions sont parfois profondes, des valeurs qui mettent, à peu près, tout le monde d'accord, c'est la preuve que la sécurité sociale est un pilier de notre pacte républicain.

Quand tout semble fragile et incertain, la protection sociale est un repère solide, et ces derniers mois nous l'ont rappelé. Elle a été une arme redoutable et décisive dans notre lutte acharnée contre l'épidémie. Souvenez-vous de l'affluence dans les pharmacies, encore en ce début d'année, pour se faire tester et vacciner, sans débourser un seul centime. Plusieurs millions de tests ont été réalisés chaque semaine pour permettre aux Français de se protéger et de protéger leurs proches. De la même façon, le chômage partiel a sauvé des millions d'emplois, et les revenus de remplacement ont permis de faire face à un ralentissement d'activité inédit. Ni les commerces ni les restaurants n'ont fermé, et les emplois n'ont pas disparu ; les salariés ne se sont pas retrouvés sur le carreau et contrairement à ce que certains redoutaient, prédisaient ou affirmaient, la pauvreté n'a pas explosé dans notre pays. Voilà la richesse de notre protection sociale.

La campagne de vaccination était quant à elle un immense défi, et la mener à bien un véritable tour de force. Je veux saluer ici la mobilisation sans précédent, dans tous les territoires, de toutes les parties prenantes, qu'il s'agisse des établissements de santé, des acteurs des centres de vaccination, des élus locaux, des agents des collectivités et des professionnels libéraux en ville. Je veux saluer aussi celles et ceux qui ont piloté cette épreuve logistique historique. N'ayons pas la mémoire courte et souvenons-nous du choix qui a été fait de protéger d'abord les plus fragiles et d'avancer progressivement, graduellement, vers la population générale. C'était le bon choix.

Souvenons-nous aussi des craintes que nous avions de ne pas pouvoir disposer de suffisamment de vaccins. Souvenons-nous des Cassandre qui prédisaient tantôt un échec, tantôt un fiasco. Autrement dit, souvenons-nous que beaucoup de trains sont arrivés à l'heure pendant cette crise sanitaire. Le vaccin est la protection la plus efficace contre le risque de développer une forme grave de la maladie, et plus de 54 millions de nos concitoyens ont reçu au moins une dose puisque, décidément, « impossible n'est pas français ».

Je le disais à l'instant, nous avons appris. La pandémie a évidemment interrogé la force de notre système de santé, la reconnaissance des soignants et notre capacité collective d'anticipation et de réaction à des crises majeures. Notre système de santé a été mis à l'épreuve et en tension comme jamais, mais il a tenu. L'hôpital et la médecine de ville ont travaillé main dans la main, le public et le privé se sont parlé, des solutions ont été trouvées dans des délais très contraints et, dans tous les territoires, des collaborations inédites se sont construites pour faire face à l'impensable.

Des pas de géant ont été accomplis dans bien des domaines, notamment le numérique en santé. De 10 000 téléconsultations par semaine, nous sommes passés à plus de 1 million.

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