Pour évoquer une situation de crise en période de campagne présidentielle, je filerai la métaphore de Pénélope – je parle, bien sûr, de l'égérie hellénique ! –, qui eut la patience et l'intelligence d'attendre Ulysse pendant qu'il bravait toutes ses difficiles épreuves. Cette odyssée pandémique, notre nation l'a affrontée, comme Pénélope, confiante envers son exécutif et fidèle à notre majorité, car elle savait que comme Ulysse, nous reviendrions victorieux de notre destin commun. Néanmoins, les embûches furent nombreuses sur cette mer épidémique rendue tumultueuse par les variants, qu'ils soient issus d'une réplication virale ou d'oppositions à la Tantale.
Ainsi, je me remémore avoir assisté, en tant que président de la commission d'enquête sur le coronavirus, à l'affrontement de notre majorité, non pas avec le Cyclope, mais avec une vision très monoculaire du rapporteur voulant nous convaincre que des vies avaient été emportées au gré d'un hypothétique tri opéré en amont des hôpitaux. Cette mithridatisation avait pour seul dessein l'incrimination au premier chef du Gouvernement et le discrédit, par la même occasion, de toute l'action de nos soignants, ce qui était intolérable. Cette Pythie sans pitié pour les médecins n'eut, de fait, pas besoin d'oracle pour produire un rapport à charge.
Notre épopée sanitaire se heurta par la suite au supplice de Charybde et Scylla juchées sur leurs récifs des deux bords de notre hémicycle. Leur doux chant démagogique et populiste, voire irresponsable, tentait de nous pousser au naufrage vaccinal. Il n'en fut pourtant rien. Nous avons en effet gardé notre cap, organisant une stratégie d'injections basée sur des faits scientifiques et offrant en priorité les vaccins aux publics les plus fragiles, faisant ainsi diminuer drastiquement la mortalité de nos aînés.
Cependant, si le vaccin réduisit considérablement la pente des hospitalisations, nous devions abréger l'épreuve perpétuelle de Sisyphe à laquelle nous étions astreints depuis le début de cette crise, tant il est vrai que le rocher viral dévalait irrémédiablement la pente de nos espoirs. En juillet 2021, l'exécutif décida de fracturer cette pierre devenue insupportable en utilisant l'outil aiguisé par nos débats : le passe sanitaire. Cette annonce permit une recrudescence nette des vaccinations dans les centres, jusqu'alors bercés par la torpeur estivale.
Aujourd'hui, toutes les études convergent vers une conclusion sans appel : il nous fallait obtenir une vaccination complète et large pour affronter les différents variants. Cette assise protectrice nous a autorisé un maintien de l'ouverture de tous les lieux publics et une protection de l'économie évaluée à 6 milliards d'euros hebdomadaires. Toutefois, bien plus que des euros, le passe a prouvé qu'il sauvait des vies, avec 32 000 morts évitées, et qu'il limitait les hospitalisations, notamment en soins critiques. Pour exemple, une personne non vaccinée a 15,8 fois plus de risques d'entrer en soins critiques qu'un sujet totalement vacciné avec rappel. Ce chiffre de 15,8 doit être mis en relief pour en comprendre l'importance : dans cet hémicycle, par exemple, il y a exactement 15,8 fois plus de députés LaREM que FI.
Et puisque la Grèce, célèbre pour ses tragédies, l'est aussi pour son alphabet, il nous aura fallu affronter de manière consécutive les variants delta, puis omicron. Ce dernier, particulièrement contagieux, nécessita l'accélération du processus de vaccination et l'association d'une dose de rappel pour obtenir une protection optimale. L'urgence de la situation nécessita l'utilisation, là encore, d'un outil validé par le Parlement : le passe vaccinal, dont le but était de préparer notre pays à une éventuelle résurgence virale, éviter aux personnes non vaccinées la fréquentation de lieux à fort risque de contamination et accompagner nos concitoyens vers une vaccination complète et protectrice. À titre d'exemple, le nombre de primo-injections a augmenté de 15 % en janvier 2022.
Finalement, après s'être totalement approprié le concept du passe, les Français ont répondu à l'appel du Président de la République en anticipant leurs doses de rappel avant même l'instauration du passe vaccinal. D'ailleurs, au sein même de certains groupes politiques, la dose de rappel a également précédé l'avènement du passe vaccinal, comme le prouve l'observation des scrutins du groupe Les Républicains : première dose de 44 % pour le passe, deuxième dose de 62 % et dose de rappel de 81 % en lecture définitive.