Intervention de Régis Juanico

Séance en hémicycle du jeudi 24 février 2022 à 15h00
Démocratiser le sport en france — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaRégis Juanico :

L'adoption est tardive pour un texte examiné selon une procédure prétendument « accélérée », adopté à la quasi-unanimité en première lecture ici même le 19 mars 2021 et qui, dans le cadre de la navette parlementaire, n'a été inscrit à l'ordre du jour du Sénat qu'au début du mois de janvier 2022, à l'issue d'une course de lenteur incompréhensible.

Nous espérions mieux. Nous attendions, comme les ministres des sports successifs s'y étaient formellement engagés depuis 2017, un projet de loi « sport et société », une deuxième loi olympique consacrée à l'héritage après celle votée en 2018 qui concerne l'organisation des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024.

Après deux ans de pandémie pendant lesquels le sport n'a pas été considéré comme un bien essentiel et n'a fait l'objet d'aucun message de prévention en santé publique, l'objectif de 3 millions de pratiquants supplémentaires d'ici à 2024, fixé en début de quinquennat par le Président de la République, n'est plus qu'un vœu pieux. Il s'agit à présent pour les clubs sportifs amateurs de tenter de compenser d'ici à 2024 les 30 % de licenciés perdus depuis deux ans ainsi qu'une partie des bénévoles.

Nous espérons que les décrets d'application de cette loi seront adoptés rapidement car nous n'avons plus de temps à perdre, nous sommes dans le money time de l'héritage sportif, territorial et sociétal des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024.

Nous savons que les politiques publiques mettent près de deux ans à produire des effets visibles, parfois plus quand il faut les généraliser à l'ensemble de la population.

Je veux saluer les avancées du texte dans le titre Ier , en matière de santé publique, comme l'extension des possibilités de prescription des activités physiques adaptées aux malades chroniques ou présentant des facteurs de risque, ainsi qu'aux personnes en perte d'autonomie, l'élargissement de la liste des médecins prescripteurs, le développement des activités physiques dans les établissements sociaux et médico-sociaux ou la définition dans la loi des maisons sport-santé.

Je veux aussi souligner les avancées du titre II, notamment son calendrier volontariste pour rendre effective la parité au sein des fédérations – même si ces dispositions ne s'appliqueront qu'à partir de 2024 –, au sein du bureau du CNOSF, le Comité national olympique et sportif français, et de celui du CPSF, le Comité paralympique et sportif français, ainsi que la limitation du nombre de mandats dans les instances sportives. Nous avons également soutenu les articles favorisant une meilleure représentation des athlètes, des entraîneurs et des arbitres dans les instances ainsi que l'extension de la garantie d'honorabilité des encadrants sportifs.

Le titre III, cher à Cédric Roussel, concrétise des avancées attendues de longue date comme la reconnaissance législative de la plateforme de lutte contre les manipulations des compétitions sportives, la possibilité pour les sociétés sportives de se constituer en sociétés coopératives d'intérêt collectif et l'allongement de trois à cinq ans de la durée du premier contrat des jeunes sportifs professionnels.

Au Sénat, des avancées ont également été réalisées, à l'initiative notamment de notre collègue Jean-Jacques Lozach, comme l'inclusion dans les déclarations de performance extrafinancière des grandes sociétés des actions de promotion des activités physiques et sportives ou l'assouplissement et la simplification pour les personnes majeures du certificat de non-contre-indication à la pratique sportive.

En revanche, je regrette que certaines dispositions que nous avons défendues ne figurent pas dans le texte définitif : l'intégration du développement des activités physiques et sportives pour les salariés dans le champ de la négociation annuelle sur l'égalité professionnelle et la qualité de vie au travail ou encore l'obligation, pour toute personne qui construit un nouveau bâtiment à usage industriel ou tertiaire sur un lieu de travail, de le doter de douches et de vestiaires.

Le texte ne contiendra pas d'avancées concrètes pour le développement des activités physiques en milieu professionnel. Nous regrettons également l'absence de reconnaissance dans la loi des missions de coordination et d'évaluation des enseignants en activité physique adaptée.

Enfin, nous sommes en désaccord avec l'article 3 bis B qui ne mentionne pas explicitement l'obligation de création d'une association sportive dans les établissements scolaires du premier degré comme c'est le cas dans le second degré. La possibilité inscrite dans le texte de créer des alliances éducatives territoriales aux contours flous, dans le cadre de projets culturels, sportifs, artistiques et citoyens, nous paraît de nature à diluer l'objectif de développement des activités physiques et sportives à l'école et à fragiliser les associations sportives existantes au sein de l'USEP, l'Union sportive du premier degré, alors qu'il faudrait les renforcer.

Cette proposition de loi au goût d'inachevé restera comme une occasion manquée. Malgré les avancées réelles que j'ai rappelées, nous ne pouvons faire l'impasse sur l'absence globale d'ambition – par exemple s'agissant du renforcement de l'éducation physique et sportive.

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