Intervention de Sabine Rubin

Séance en hémicycle du jeudi 24 février 2022 à 15h00
Démocratiser le sport en france — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSabine Rubin :

…dans les deux sens du terme : renforcer la concertation lors des prises de décisions qui s'y rapportent, et le rendre accessible au plus grand nombre.

C'est pourquoi, le 10 février, à l'initiative de notre collègue Marie-George Buffet, les acteurs du sport dans le 93 se sont réunis à l'Assemblée, parmi lesquels des professeurs d'éducation physique et sportive (EPS), des parents d'élèves, des élus locaux, des élus nationaux et des syndicalistes. Nos collectivités locales exsangues ne peuvent résorber seules le décrochage sportif constaté dans ce département. Je me réjouis de voir s'installer au niveau national le sujet de la « démocratisation du sport » – puisque c'est le titre plus qu'alléchant de la proposition de loi, bien qu'un titre alléchant ne suffise pas.

Hélas, des deux définitions de la démocratisation, elle n'en retient qu'une seule : celle qui coûte le moins cher. Le texte vise donc à démocratiser les instances décisionnelles. Il comporte en la matière quelques avancées plutôt louables. Je pense d'abord à la parité, même s'il faudra attendre 2028 au niveau régional, et ensuite à la participation des clubs à l'élection des présidents de fédérations. On ne s'en plaint pas, mais ce n'est pas grand-chose.

Car, pour ce qui est d'inclure tout le monde, le compte n'y est vraiment pas. Dans mon département, à peine 30 % des collégiens pratiquent un sport en club. C'est pourtant à cet âge qu'il faudrait prendre des habitudes, quand on sait combien l'activité physique est un enjeu de santé publique : selon l'OMS, la sédentarité est responsable de 2 millions de décès chaque année dans le monde. Le phénomène ne fait que s'accentuer depuis le début de la crise sanitaire, et touche particulièrement les jeunes et les adultes à faible niveau d'études, largement surreprésentés dans le 93. Les enseignants, les élèves, leurs parents, les syndicats, les autres élus et moi-même ne pouvons donc nous contenter de ce texte minimaliste.

Aussitôt que ça coûte quelque chose, c'est vrai qu'il n'y a plus personne. Le sport sur ordonnance n'est toujours pas remboursé. L'obligation d'installation de vestiaires et de douches dans les nouveaux immeubles de bureaux n'est toujours pas inscrite dans la loi, et les enseignants en activité physique adaptée ne sont pas reconnus, alors même que la proposition de loi confère un statut juridique aux maisons sport-santé. Que d'occasions manquées !

En revanche, elle ne manque pas d'offrir aux ligues la possibilité de constituer des sociétés commerciales, pour marchandiser encore un peu plus un secteur qui s'en passerait bien. Or marchandiser, c'est le contraire de démocratiser. C'est la même chose s'agissant de la retransmission des événements sportifs, dont l'accès est soumis à une foule d'onéreux abonnements. Et comme tout est prétexte à la dérégulation, plutôt que généraliser les associations sportives scolaires, voici que s'ouvre la possibilité de faire entrer dans les écoles, grâce aux alliances éducatives territoriales, des organismes privés non affiliés aux fédérations, organismes qui n'offrent en conséquence aucune garantie. Voilà comment donner l'illusion d'une diffusion de la pratique sportive, une fois encore sans rien dépenser.

Chers collègues qui défendez ce texte, sur ce sujet comme sur les autres, votre pingrerie est manifeste. Pour tout effet sur la pratique sportive, ce texte aura permis d'entretenir un seul muscle : vos langues. En conséquence, le groupe La France insoumise s'abstiendra de nouveau.

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