Intervention de Blandine Brocard

Séance en hémicycle du jeudi 24 février 2022 à 15h00
Combattre le harcèlement scolaire — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBlandine Brocard :

Avant toute chose, j'adresse mes pensées émues au peuple ukrainien, aux femmes, aux hommes et aux enfants dont le quotidien est désormais bouleversé par l'avancée des chars russes et par le bruit des bombes. Vous l'avez rappelé, monsieur le ministre, la paix et la fraternité se construisent dès l'école.

Nous nous retrouvons une dernière fois pour adopter définitivement la proposition de loi de notre collègue Erwan Balanant, dans une rédaction identique à celle du texte que nous avons adopté à l'unanimité il y a quinze jours. Vous ne serez donc pas surpris, chers collègues, que le groupe Mouvement démocrate (MODEM) et démocrates apparentés soutienne de nouveau d'une seule voix la proposition de loi.

Nous aurions certes préféré un consensus entre les deux chambres sur ce texte essentiel à la protection de nos enfants, mais la persistance de deux points de désaccord en commission mixte paritaire et en dernière lecture au Sénat a conduit à ce que la décision finale nous revienne.

Le premier point de désaccord est la création d'un délit spécifique de harcèlement scolaire. Les sénateurs souhaitaient le transformer en une circonstance aggravante du délit de harcèlement moral. Il s'agit pourtant de la pierre angulaire du texte – ne vous en déplaise, madame Rubin. Nous avons la volonté d'affirmer un interdit strict, une ligne rouge infranchissable, clairement compréhensible par un mineur et à partir duquel la communauté éducative, les parents et les associations d'aide aux victimes pourront travailler avec les enfants, pour que notre société évolue et pour que nos enfants soient protégés à l'école. Car l'école doit être un sanctuaire de sérénité dédié à l'apprentissage de la vie.

Il ne s'agit pas de mettre des enfants en prison, mais de leur dire haut et fort que le respect de l'autre et de ses différences est une valeur fondamentale que l'on respecte, sans aucune transgression, dans l'enceinte de l'école. Nous devons également travailler hors les murs pour éradiquer le fléau du harcèlement scolaire, aux conséquences trop souvent tragiques.

Je veux saluer, à cet égard, le lancement, au début du mois, de l'application mobile 3018 – vous en avez parlé, monsieur le ministre –, qui devrait faciliter la détection et le suivi des cas de harcèlement avant qu'ils ne dégénèrent. Il conviendra de communiquer largement sur cet outil et sur les résultats obtenus afin que les harceleurs prennent conscience que leurs méfaits auront désormais une plus large audience que les réseaux sociaux des adolescents, hermétiques au contrôle parental.

Second point de désaccord, les sénateurs souhaitaient exclure les adultes de la définition du harcèlement scolaire afin que celui-ci reste uniquement un délit commis par des enfants sur d'autres enfants. Ils craignaient, en effet, d'éventuelles dérives et que certains crient à hue et à dia au harcèlement. Sans stigmatiser personne, nous pensons au contraire que nous avons le devoir de reconnaître que le harcèlement est parfois déclenché, favorisé ou simplement ignoré par des adultes qui interviennent en milieu scolaire, qu'ils soient enseignants, surveillants, intervenants ou personnels administratifs et médicaux. La proposition de loi n'entraînera pas de fragilisation juridique de la situation des professeurs car d'autres textes – notamment l'article 1er de la loi pour une école de confiance, que nous avons adoptée en 2019 – assurent un équilibre en la matière.

Je veux, pour terminer, formuler un vœu. La mesure à laquelle on se résigne bien souvent pour résoudre les cas de harcèlement scolaire est l'éloignement des victimes, soit par un changement d'école, soit par le retrait de l'enfant de son établissement et le recours à l'instruction en famille. Je souhaite que de telles mesures ne soient prises désormais qu'en dernière extrémité et que le système éducatif prévoie d'autres types de solution, tels que le dialogue, le renforcement de la cohésion des groupes, la détection précoce des cas, mais aussi la coopération avec les associations qui possèdent une expertise en matière de prévention du harcèlement – je pense notamment aux associations Hugo ! et Les papillons. L'ostracisation de la victime ne doit pas être la règle, mais l'exception.

Pour que nos enfants et nos adolescents vivent leur scolarité sereinement, grandissent en confiance et deviennent des êtres humains responsables, le groupe Mouvement démocrate (MODEM) et démocrates apparentés soutiendra avec enthousiasme et conviction le texte de notre collègue Erwan Balanant.

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