Nous nous réjouissons, monsieur le Premier ministre, de la condamnation unanime des gouvernements européens et des initiatives prises par le Gouvernement français, que nous soutenons, et les autres gouvernements occidentaux d'instaurer des sanctions – trop timides au départ, puis réelles et massives. Nous saluons les décisions prises pour apporter une aide humanitaire, économique et militaire ainsi que, je veux le souligner ici devant notre assemblée, plusieurs événements majeurs : l'Allemagne, pour la première fois de son histoire, décide de livrer des armes à l'Ukraine – cela ne s'était jamais vu depuis 1945 ; la Suède sort de sa neutralité et aide, elle aussi, le peuple ukrainien qui souffre et se bat ; la Suisse, qui est historiquement plus neutre encore, s'associe aux sanctions économiques appliquées contre le régime russe ; l'Union européenne, que l'on dit et que l'on connaît trop divisée, se réunit et décide, pour une fois, d'agir ensemble.
C'est dire la gravité mais aussi la force du réveil de nos pays et de nos peuples, dont les opinions publiques sont solidaires – l'opinion publique française est admirative de ces hommes et de ces femmes qui se battent et qui meurent en ce moment dans les rues de Kiev ou de Kharkiv, face à un agresseur infiniment plus puissant qui veut écraser leurs rêves et les asservir. Le cœur des Français est avec ceux qui sont sous les bombes, avec ceux qui creusent des tranchées dans leur ville, avec ces femmes et ces enfants qui partent se réfugier pendant que les époux retournent combattre l'envahisseur.
Les Français sont solidaires, certes, mais ils craignent aussi que le conflit ne dégénère en conflit global, touchant tout notre continent. Monsieur le Premier ministre, il faut dire la vérité aux Français qui sont capables de la comprendre, même si elle est désagréable : la France n'est pas en guerre mais elle n'est plus réellement en paix.
Cela explique les sanctions économiques qui ont été décidées, mais aussi les conséquences que nous aurons à subir : l'inflation, les taux d'intérêt, le budget contraint, une croissance moindre. Nous subirons, nous aussi, les effets du conflit dont le Président de la République a dit qu'ils dureraient longtemps ; nous devons nous y préparer dès maintenant, quelles que soient nos options politiques. Cela explique aussi le coût de l'aide humanitaire, des livraisons d'armes, des déploiements français en Roumanie ou dans les pays baltes pour défendre le monde libre auquel nous appartenons. Si nous ne le faisons pas aujourd'hui, c'est notre liberté qui, demain, sera menacée.
Je le dis avec un peu de regret : j'aurais souhaité que nous puissions livrer des armes plus tôt, mais je me réjouis que nous le fassions maintenant. Car seule la détermination, et rien d'autre, peut faire reculer Vladimir Poutine.
Cela explique aussi l'impérieux devoir qui est le nôtre d'accueillir en France et en Europe ceux qui fuient cette guerre.