Intervention de Bertrand Pancher

Séance en hémicycle du mardi 1er mars 2022 à 15h00
Déclaration du gouvernement relative à la décision de la russie de faire la guerre à l'ukraine

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBertrand Pancher :

L'Europe est en train de se prendre en main, beaucoup trop tardivement, mais la dynamique semble enfin être enclenchée. Après la stupeur des premières heures, qui a mis en lumière notre impréparation face au scénario du pire, nous avons réagi, et je tiens à saluer l'action de la France.

L'Ukraine n'étant membre ni de l'Union européenne ni de l'OTAN, nous n'avons pas été tenus par nos traités à un devoir d'intervention militaire. J'ajoute qu'en disant, du côté de l'OTAN, que nous n'interviendrions pas militairement dans ce pays, nous avons imprudemment invité le loup à entrer dans la bergerie. Cependant, cela ne devait pas nous astreindre à l'inaction, tout au contraire.

Nous connaissons la disproportion des forces en présence. Les Russes disposent de la suprématie aérienne et ont opéré une percée depuis le Bélarus en direction de Kiev. D'autres fronts ont été ouverts. L'urgence était évidemment l'aide en matériel militaire pour l'Ukraine et je souligne donc, à mon tour, l'engagement inédit de l'Union européenne et l'aide de la France, ainsi que l'aide directe apportée par de nombreux pays membres. Espérons que tout cela arrive à temps et qu'il ne soit pas trop tard.

L'urgence est aussi de faire comprendre à la Russie les conséquences désastreuses de la poursuite de la guerre, sur le plan éthique, mais aussi sur le plan économique. Dans ce domaine, après un peu d'hésitation, les mains de l'Europe, des États-Unis et des pays occidentaux n'ont, pour une fois, pas tremblé quand il a été question de sanctions économiques et financières. Reconnaissons que l'Europe a aussi, et pour une fois, décidé d'agir avec détermination, avec l'exclusion de plusieurs banques russes du système SWIFT, des sanctions bancaires, le gel des avoirs, des sanctions contre les oligarques et l'interdiction des vols commerciaux russes sur son territoire. Ces mesures devront être évaluées dans le temps et, en fonction de leurs effets, adaptées ou corrigées.

Je tiens à remercier vivement l'ensemble des Européens qui se mobilisent pour l'Ukraine, mais aussi les Françaises et les Français. Si leurs dirigeants agissent ainsi, c'est aussi parce qu'ils sont soutenus malgré les conséquences lourdes pour nos économies de ce conflit.

La troisième des priorités est, bien entendu, le retour à la paix.

Il s'agit, enfin, de mettre en place, comme je l'ai toujours réclamé, et comme l'ont réclamé avec moi de nombreux parlementaires, une véritable Europe de la défense, vieux serpent de mer. Par une ironie de l'histoire, l'agression russe va peut-être faire enfin avancer cette cause. Ce dossier figurait d'ailleurs à juste titre parmi les priorités de la présidence française. Il importe d'avancer avec nos partenaires, notamment les Allemands, qui étaient très réticents et commencent heureusement à bouger. Nous devons franchir un palier dans l'autonomie stratégique de l'Europe. Rappelons-nous ces mots de Jean Monnet : « L'Europe se fera dans les crises et elle sera la somme des solutions apportées à ces crises. »

Pour terminer, nous ne pouvons pas occulter le sort des victimes de la guerre. Il est impossible de les quantifier à ce stade, mais notre action humanitaire doit être à la mesure de l'urgence et de l'élan de solidarité que nous voyons chez nos compatriotes. Des centaines de milliers de personnes se pressent déjà aux frontières polonaise et roumaine. Envers ces femmes et ces hommes, nous avons un devoir d'humanité. Nous devons prendre notre part et je tiens à saluer toutes celles et tous ceux qui commencent à s'organiser dans notre pays. Nous devons, collectivement, être à la hauteur des événements qui secouent dramatiquement notre continent. Cela nous oblige tous à la responsabilité et à la mesure. Face à la guerre, nous devons respecter une forme d'union nationale, ou plutôt de concorde nationale.

Cela vous oblige, monsieur le Premier ministre, mesdames et messieurs les membres du Gouvernement, à une gestion plus collective de cette crise, en y associant nos forces politiques. Vous avez fait des efforts – je pense au comité de liaison auquel j'ai participé vendredi dernier. Il importe de maintenir ce lien malgré la campagne présidentielle et législative. Je sais que vous y êtes attachés.

Notre pays, qui traverse encore la pandémie du covid, connaît une guerre en Europe. Dans ces circonstances, nous avons besoin de vivifier le débat démocratique, qui fut si désespérément plat. Au moment où nous nous interrogeons sur le fonctionnement de notre démocratie, nous recevons une belle et grande leçon de l'Ukraine : cette démocratie est, de Paris à Kiev, notre bien commun le plus précieux. Vive la démocratie, vive la liberté, vive la paix, vive l'Ukraine libre !

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.