Revenons sur l'absurdité de ce conflit, qui repose sur un mensonge : la situation a basculé lorsque, le 17 décembre dernier, les autorités russes dévoilaient deux propositions de traités à destination des États-Unis et de l'OTAN. Elles ne l'ont pas fait avec l'intention de négocier une nouvelle architecture de sécurité en Europe, car on ne mobilise pas la moitié de son armée le long de la frontière de son voisin pour discuter de sécurité ou de paix ! C'était un leurre, un chantage, un ultimatum qui nous était présenté. Les termes en étaient les suivants : l'OTAN devait s'engager à cesser tout élargissement à l'Est ; les membres de l'OTAN devaient retirer leurs forces des territoires qui les ont rejoints depuis 1997 ; les membres de l'OTAN devaient s'engager à ne pas déployer de forces sur le sol d'États non-membres de l'Alliance frontaliers de la Russie, ce qui inclut évidemment l'Ukraine. En clair, il nous était demandé de délaisser l'Europe orientale. Et qu'importent, après tout, les Ukrainiens, les Estoniens, les Lituaniens, les Moldaves, les Roumains, les Géorgiens et tous les autres ! Qu'importe ce qu'ils pensent et ce qu'ils veulent, qu'importent leurs craintes et leurs aspirations : rien de tout cela n'avait d'importance pour le président Poutine. Ces termes étaient évidemment inacceptables.
Dans ce contexte si difficile, le Président de la République, Emmanuel Macron, en coordination avec les dirigeants européens et américains, s'est engagé sans relâche dans un dialogue exigeant avec le président Poutine. Un dialogue qu'il continue de mener, envers et contre tout, à la demande du président Zelensky lui-même et en accord avec le président Poutine, qui considère le président Macron comme un interlocuteur de qualité. Ce dialogue, la confiance que lui accorde l'Ukraine, et l'attention – je ne saurais parler de respect – que lui porte la Fédération de Russie honorent la France. Tout doit être tenté pour engager une désescalade. Tout doit être tenté pour trouver une solution diplomatique. Tout doit être tenté pour obtenir l'apaisement et éviter un bain de sang, car c'est de cela qu'il s'agit désormais.
Hélas, reniant une fois de plus sa propre parole, le président russe choisissait, le jeudi 24 février au matin, de frapper l'Ukraine pour y semer la mort, affublant ce pays géographiquement européen de qualificatifs qui marquent la négation, le projet d'effacement de ce pays libre, indépendant et souverain, le rejet de cette démocratie qu'il exècre tant. Car ne nous trompons pas, chers collègues : le point de départ de cette situation n'a jamais été une supposée expansion agressive de l'OTAN, qui chercherait à encercler la Russie, comme le répètent à l'envi le président Poutine et ses aficionados en France – dont certains, me semble-t-il, sont d'ailleurs présents ici même, sur nos bancs. D'abord, parce que l'OTAN est une alliance défensive et non agressive : elle n'est pas intervenue en Géorgie en 2008, pas plus qu'en Syrie en 2013 ou en Ukraine en 2014. Elle n'intervient pas dans le conflit actuel et n'y prendra pas part. Ensuite, parce que les décisions de l'Alliance se prennent à l'unanimité. Or, sur la question précise d'une adhésion de l'Ukraine à l'OTAN, les priorités entre les différents membres étaient très divergentes. Enfin, parce que la Russie n'est plus la priorité des États-Unis, qui souhaitent s'investir davantage dans l'Indo-Pacifique.
Le point de départ de cette tragédie n'a jamais été l'OTAN. Le point de départ, c'est un accord d'association conclu entre l'Ukraine et l'Union européenne en 2013,…