Nous continuons évidemment à mener ces opérations et, au fur et à mesure que les règlements du régime de sanctions seront publiés, nous les appliquerons avec la plus grande fermeté, mais aussi avec le plus grand soin dans le respect du droit, afin que tout soit parfaitement sécurisé.
En miroir des sanctions imposées à la Russie, je voulais également évoquer le niveau d'aide que nous apportons à l'Ukraine. Mme la ministre des armées l'a indiqué et je n'y reviens pas : une aide est apportée sous forme de matériel militaire, pour un total de 450 millions d'euros. Autre forme d'aide : au niveau communautaire, une assistance macro-économique de 1,2 milliard d'euros a été décidée par le Conseil de l'Union. En outre, le Président de la République a indiqué qu'au-delà de l'aide humanitaire pour les réfugiés et pour les populations, la France consentirait une aide de 300 millions d'euros au gouvernement ukrainien, afin de l'accompagner dans la crise et les difficultés qu'il traverse.
Toutes ces décisions, notamment le régime de sanctions, auront évidemment des conséquences pour notre économie. Nous estimons que l'économie française n'est pas la plus exposée à des perturbations dans les relations commerciales entre le reste du monde et l'économie russe. Pour illustrer mon propos, je rappelle simplement qu'en 2020 les exportations de la France vers la Russie se sont élevées à 6,4 milliards d'euros, ce qui représente 1,3 % du total de nos exportations, tandis que nos importations de Russie ont atteint 9,7 milliards d'euros – soit 1,6 % du total de nos importations –, dont les trois quarts relèvent de produits énergétiques. À l'échelle de l'Union, il est question de 90 milliards d'euros d'exportations vers la Russie – 4 % du total –, et de 145 milliards d'importations, dont les trois quarts concernent aussi des produits énergétiques.
Nous veillons avec beaucoup d'attention à la situation de quelques entreprises particulièrement exposées, dans des secteurs comme l'automobile, l'énergie ou encore les services financiers. De manière plus générale, les principaux secteurs exposés à une perturbation ou à un arrêt des relations avec le tissu économique russe sont ceux des matériels de transport – 22 % de nos exportations vers la Russie ; de la chimie, de la parfumerie et des cosmétiques – 20 % ; de la pharmacie – 12 % ; et des machines industrielles et agricoles – environ 10 %.
Le secteur de l'agroalimentaire mérite une attention particulière. À l'échelle de l'économie française, les sommes en jeu – 750 millions d'euros – restent relativement modestes – je dis bien relativement –, mais nous sommes dépendants des importations d'engrais azotés, dont le cours dépend fortement de celui du gaz : environ 167 millions d'euros sont ainsi en jeu.
Nous faisons évidemment aussi très attention au cours du blé. Si la France n'importe ni de blé ukrainien ni de blé russe, la difficulté pour les pays acheteurs à se procurer du blé auprès de l'Ukraine ou de la Russie va entraîner une augmentation des cours. Cela pourrait avoir des conséquences pour l'agriculture française, mais aussi dans des pays où le pain représente une part substantielle de la nourriture, avec toutes les difficultés sociales que cela peut entraîner.
À ce stade, nous veillons à ce que l'ensemble des producteurs puissent être accompagnés. Le Premier ministre l'a dit : nous travaillons à un plan de résilience de l'économie française, que nous présenterons dans les prochains jours, afin d'accompagner les secteurs les plus exposés même si, vous l'aurez compris, la part de notre économie exposée à ces perturbations n'est heureusement pas très importante.
L'énergie est évidemment le sujet principal. En Europe, 40 % du gaz consommé vient de Russie, ce qui représente une part substantielle, moins importante en France que dans le reste de l'Europe. Le niveau de dépendance au gaz russe de certains pays d'Europe occidentale peut aller jusqu'à 55 % de leurs besoins, tandis que certains pays les plus à l'est de l'Union en dépendent parfois à 100 %. Ce peut aussi être le cas pour le pétrole, la Russie étant le troisième fournisseur de l'Union européenne.
Beaucoup de centrales thermiques européennes fonctionnant avec du gaz, l'augmentation du prix du gaz peut avoir de gros impacts sur le cours de l'électricité, d'autant que les mécanismes de fixation des prix au sein de l'Union européenne lient les prix de l'électricité au cours du gaz. Le Premier ministre l'a indiqué : des mesures de protection seront prises. Si cela est nécessaire, nous sommes évidemment disposés à ce que le bouclier tarifaire qui concerne les ménages en matière de gaz et d'électricité puisse être prolongé au-delà du mois de juin. Nous avons quelques semaines et même quelques mois pour prendre une telle décision. Là aussi, nous veillerons à ce que les effets de la crise ne soient pas dévastateurs pour le pouvoir d'achat des ménages, et le bouclier tarifaire que nous avions imaginé pour faire face à une autre crise de l'énergie pourra, le cas échéant, se révéler particulièrement efficace.
Il est évidemment un peu trop tôt dans le processus pour déterminer le coût de cette crise pour nos finances publiques. À seul titre d'exemple, la prolongation pendant six mois du bouclier tarifaire concernant les prix du gaz aurait un coût de 3 milliards d'euros. Il est également trop tôt pour connaître l'impact de cette crise sur le niveau de confiance des ménages et des investisseurs, donc sur la croissance. Les scénarios dont nous disposons sont très larges : ils vont de 0,2 à 1 point de la croissance mondiale, mais de 1 à 6 points de la croissance russe, ce qui témoigne de l'impact des mesures que nous avons prises sur l'économie russe, ce qui est bel et bien l'objectif recherché.
Je n'en dirai pas plus : nous aurons certainement l'occasion, dans les mois qui viennent, de revenir sur les conséquences économiques et financières de cette crise.