Intervention de Aude Amadou

Séance en hémicycle du mercredi 23 mars 2022 à 15h00
/15/dossier/1 — Intervention de m. volodymyr zelensky président de l'ukraine

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAude Amadou, président de l'Ukraine :

Merci. Après des semaines d'invasion russe, Marioupol et d'autres villes ukrainiennes frappées par l'occupant rappellent les ruines de Verdun. Comme sur les photos de la première guerre mondiale, que chacun a eu l'occasion de voir, l'armée russe ne distingue pas les objets qu'elle cible. Elle détruit tout : quartiers résidentiels, hôpitaux, écoles, universités ; tout. Elle brûle les entrepôts de nourriture et de médicaments : elle brûle tout. Elle ne tient pas compte du concept de crime de guerre ni des obligations liées aux conventions internationales. Elle a apporté la terreur sur le sol ukrainien, et chacun de vous en est conscient. Vous avez toutes les informations, car tous les faits sont disponibles : les femmes violées par les militaires russes dans les zones temporairement occupées, les réfugiés qu'ils tuent sur les routes, les journalistes qu'ils tuent aussi tout en sachant que ce sont des journalistes, sans compter les personnes âgées qui ont survécu à l'holocauste et qui sont désormais obligées de fuir les frappes russes dans des abris antibombes. Ce qui se passe en Ukraine, l'Europe ne l'avait pas vu depuis quatre-vingts ans. Des gens désespérés supplient pour mourir.

En 2019, quand je suis devenu président, il existait déjà un cadre de négociation avec la fédération de Russie : le format Normandie. Il devait mettre fin à la guerre dans le Donbass, à l'est de l'Ukraine, qui dure malheureusement depuis huit ans. Quatre États ont participé au format Normandie – l'Ukraine, la Russie, l'Allemagne et la France –, mais ils représentaient l'ensemble du monde, ils exprimaient toutes les positions des pays du monde entier. Certains ont soutenu ce processus tandis que d'autres essayaient de le retarder, voulant le perturber. Mais il semblait important qu'un tel cadre continue d'exister. En 2019, les négociations ont donné des résultats – nous avons réussi à libérer des personnes gardées en captivité et à négocier certaines décisions –, ce qui a constitué une bouffée d'air frais ou comme une lueur d'espoir, l'espoir que les conversations avec la Russie puissent être constructives, que les dirigeants de la Russie puissent être convaincus par nos paroles, que Moscou puisse choisir la paix.

Mais le 24 février 2022 est arrivé. Ce jour a effacé tous les efforts consentis ; il a brisé le concept même de dialogue et l'expérience européenne des relations avec la Russie ; il a infléchi les destinées de l'histoire européenne. Tout cela a été bombardé par les troupes russes, écrasé par l'artillerie russe et brûlé par les tirs de missiles russes. N'ayant pu trouver la vérité dans les bureaux, nous sommes obligés de la chercher sur le champ de bataille. Alors, que nous reste-t-il ? Nos valeurs, notre unité et notre détermination à défendre notre liberté, notre liberté commune, celle de Paris et de Kiev, de Berlin et de Varsovie, de Madrid et de Rome, de Bruxelles et de Bratislava. Les bouffées d'air frais ne nous aideront pas. Nous devons agir ensemble, faire pression ensemble sur la Russie pour l'inciter à chercher la paix.

Mesdames et messieurs, peuple français, le 24 février, le peuple ukrainien s'est uni. Désormais, nous n'avons plus ni droite ni gauche, nous ne distinguons plus entre les représentants du pouvoir et ceux des coalitions de l'opposition ; nous ne pensons qu'à instaurer la paix pour protéger notre pays. Nous sommes reconnaissants à la France pour son aide et pour les efforts du Président de la République Emmanuel Macron, qui a fait preuve d'un véritable leadership. Nous communiquons constamment avec lui et coordonnons nos actions. Les Ukrainiens voient que la France apprécie et protège la vérité. Vous savez ce que sont la liberté, l'égalité et la fraternité. Chacune de ces notions est importante pour vous : je le sens et les Ukrainiens le ressentent aussi.

Nous attendons de la France, de votre leadership, que vous conduisiez la Russie à rechercher la paix, pour mettre fin à cette guerre contre la liberté, l'égalité et la fraternité, contre tout ce qui a rendu l'Europe unie, libre et diverse. Nous attendons de la France, de votre leadership, la restauration de l'intégrité territoriale de l'Ukraine. Nous pouvons le faire ensemble. Si certains parmi vous en doutent, votre peuple, lui, en est sûr, comme tous les autres peuples d'Europe. Sous la présidence française du Conseil de l'Union européenne, une décision mûrie sera prise en faveur de l'adhésion de l'Ukraine à l'Union européenne. Ce sera une décision historique, prise à un moment historique, comme cela fut toujours le cas dans l'histoire du peuple français.

Mesdames et messieurs, peuple français, demain cela fera un mois que les Ukrainiens se battent pour leur vie et leur liberté, que notre armée s'oppose héroïquement aux forces russes, pourtant supérieures. Nous avons besoin d'encore plus d'aide et de soutien. Pour que la liberté ne perde pas, elle doit être bien armée. Les chars, les armes antichars, les avions de combat, la défense aérienne : nous en avons besoin et vous pouvez nous aider. Pour que la liberté ne perde pas, le monde doit aussi la soutenir avec des sanctions contre l'agresseur. Chaque semaine, il faut prendre un nouveau paquet de sanctions. Les entreprises françaises doivent quitter le marché russe : Renault, Auchan, Leroy Merlin et tous les autres groupes doivent cesser d'être les sponsors de la machine de guerre russe.

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