Intervention de Ugo Bernalicis

Séance en hémicycle du mardi 23 janvier 2018 à 15h00
État au service d'une société de confiance — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaUgo Bernalicis :

J'avais l'impression d'entendre une chronique de Guillaume Meurice, citant l'exemple de dizaines de contrôles dans une petite entreprise, ou de pièces justificatives fournies huit fois à l'identique. Il nous est arrivé à tous, dans nos rapports avec l'administration, de devoir fournir deux fois la même pièce justificative. J'ai eu à le vivre en tant qu'usager du service public ou à le réclamer en tant que fonctionnaire de l'administration. Mais ce comportement est-il dû à l'absence d'un texte de loi ? Vous l'avez dit tout à l'heure, ce n'est pas dans les textes mais dans les têtes que les changements doivent être opérés. Or, pour un changement dans les têtes, il appartient plutôt à l'exécutif de modifier le comportement de l'administration. La plupart des fonctionnaires sont prêts à accepter les changements pour faciliter leur travail et être plus efficaces dans le service rendu aux usagers. Aucun fonctionnaire ne vous dira le contraire. Mais ce texte permettra-t-il d'atteindre cet objectif ?

Le projet de loi instaure un droit à l'erreur, en inversant la charge de la preuve : il appartiendra à l'administration de montrer la mauvaise foi de l'administré pour le sanctionner. Le texte établit un droit au contrôle opposable – l'administré pourra demander à l'administration de prendre position sur une question qui le concerne.

Mais un autre objectif que la confiance est poursuivi : la réduction de la place de l'État et des services publics. L'absence de moyens donnés à l'État est criante. En réalité, ce projet de loi conduira à un affaiblissement pur et simple de l'État, mais peut-être est-ce là son objectif réel. Tel est l'objectif traditionnel des libéraux : diminuer le nombre de fonctionnaires par la numérisation et la mutualisation.

Ce projet de loi témoigne d'une défiance à l'égard du travail effectué par les fonctionnaires. Nous devons le rappeler avec force : depuis des années, les fonctionnaires sont décriés et font l'objet d'une véritable campagne de dénigrement sur fond d'idéologie libérale. Dans le même temps, leurs conditions de travail n'ont cessé de se dégrader – la réduction du nombre de fonctionnaires s'est toujours accompagnée d'une augmentation de la charge de travail. En résumé, faire plus avec toujours moins.

En outre, ce projet de loi est fondé sur une vision fantasmée de la société reposant sur une confiance présupposée.

Les règles de droit ont encore un sens dans ce pays – j'ose l'espérer ! Le service public a toujours permis la discussion et accepté une marge d'appréciation. Nombre de fonctionnaires appliquent au quotidien le droit à l'erreur que vous appelez de vos voeux, quitte à tolérer des entorses à certaines règles que nous dénonçons – je pense en particulier au verrou de Bercy, qui est un droit à l'erreur institutionnalisé. C'est un leurre que de faire croire qu'il n'existe aucune discussion avec les administrés. Vous travestissez la réalité pour faire miroiter un nouveau monde qui sera finalement pire que le précédent.

Monsieur le rapporteur, vous avez évoqué une croissance durable. C'est bien là l'enjeu de ce texte, la croissance et la compétitivité. Vous avez dit que des amendements issus de tous les bancs avaient été adoptés mais, veuillez m'excuser, un groupe au moins n'a pas eu cette chance…

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