Ce ne sont que des projections. Nous vous donnerons des chiffres plus précis après avoir affiné nos calculs.
Troisièmement, sur les moyens, vous me disiez, monsieur le rapporteur, ne pas être d'accord avec le projet de loi. En effet, en supprimant la majoration de 10 % en vigueur actuellement, celui-ci conduit à une baisse de 11 % du plafond des dépenses électorales. C'est un recul, me dites-vous, mais ce plafond a été calculé en multipliant par huit – soit le nombre actuel de circonscriptions – le montant fixé par circonscription, soit 1,15 million d'euros. Si nous avions pris pour base le plafond majoré, le total aurait été d'un peu plus de 10 millions d'euros, au lieu de 9,2 millions comme nous le proposons.
Par ce choix, nous traduisons de manière concrète notre volonté de maîtrise des dépenses publiques et notre exigence d'exemplarité du financement de la vie politique. Surtout, je tiens à rappeler que le plafond des dépenses électorales n'a jamais été atteint par aucune liste, à l'exception de celle du Front national dans la circonscription Sud-Est en 2014. D'une façon générale, elles n'atteignent même pas la moitié de ce plafond.
Vous avez également évoqué, monsieur le rapporteur, la dématérialisation de la propagande électorale. Il s'agit en effet d'un projet sur lequel le ministère de l'Intérieur a travaillé, mais il n'est pas à l'ordre du jour. Pour mémoire, il s'agirait de supprimer l'expédition des documents de propagande au domicile de chaque électeur, de mettre à la disposition des électeurs un site internet sur lesquels ces documents seraient consultables et à assurer leur affichage en mairie. Plusieurs expérimentations ont déjà été menées à cet effet, et peu de difficultés ont été identifiées. Cela permettrait de simplifier et de moderniser les procédures, d'en limiter l'impact environnemental et, surtout, de limiter les dépenses publiques. Toutefois, je vous confirme qu'aujourd'hui, à l'heure où je vous parle, cette dématérialisation n'est pas à l'ordre du jour.
Cinquièmement, vous m'avez interrogée sur les listes transnationales. La création d'une circonscription européenne fait actuellement l'objet d'une discussion au Parlement européen. Un vote aura lieu la semaine prochaine sur une circonscription unique européenne qui serait composée de trente sièges, le reste des sièges laissés vacants par le retrait du Royaume-Uni étant redistribué entre les États membres. Dans cette hypothèse, la France recevrait six sièges supplémentaires, qui s'ajouteraient aux 74 qu'elle détient déjà.
Vous m'avez d'autre part interrogée sur l'éventuelle création d'une instance parlementaire dédiée au suivi des discussions entre les États sur la création d'une circonscription unique. Il appartient à votre assemblée, notamment dans le cadre de ses commissions, de s'organiser librement pour suivre l'état d'avancement des discussions entre États membres sur cette ambition portée par la France. Dans ce cadre, le Gouvernement, en particulier le ministère de l'Intérieur et celui des Affaires européennes, est à la disposition des commissions compétentes, qu'il s'agisse de la commission des Lois, de la commission des Affaires européennes ou de la commission des Affaires étrangères, pour venir leur rendre compte de ces discussions. Vous avez également toute latitude pour créer un groupe de travail ou une mission d'information sur le sujet.
Faut-il aller plus loin et formaliser dans la loi la création d'une instance dédiée ? Nous en doutons, dans la mesure où le cadre parlementaire actuel la permet déjà, et où, par ailleurs, il serait inédit que le Parlement crée une instance interne consacrée au suivi d'une négociation européenne qui a vocation à s'achever à un moment ou à un autre ; ce serait redondant avec le rôle assigné à la commission des Affaires européennes par l'article 6 bis de l'ordonnance du 17 novembre 1958 modifiée relative au fonctionnement des assemblées parlementaires : « Les commissions chargées des Affaires européennes suivent les travaux conduits par les institutions de l'Union européenne. À cet effet, le Gouvernement leur communique les projets ou propositions d'actes des Communautés européennes et de l'Union européenne dès leur transmission au Conseil de l'Union européenne. Le Gouvernement peut également leur communiquer, de sa propre initiative ou à la demande de leur président, tout document nécessaire. Il les tient en outre informées des négociations en cours. »
Par conséquent, le Gouvernement, tout en comprenant vos louables motifs, ne croit pas utile ni opportun de créer par la loi une telle commission parlementaire.
Vous m'avez questionnée, en outre, au sujet des inscriptions sur les listes électorales, de la fiabilisation et de la facilitation de leur établissement. Je suis en mesure de vous faire part d'une bonne nouvelle : le décret sur lequel les services ont travaillé prévoit une entrée en vigueur du dispositif au 1er janvier 2019. Il sera donc mis en place pour les élections européennes, premier scrutin pour lequel les listes électorales seront extraites du répertoire électoral unique. Je peux même vous préciser que la saisine du Conseil d'État est imminente.
Vous avez par ailleurs mentionné le cas où l'égalité des voix entre deux listes serait parfaite. Je comprends tout à fait le message que vous souhaitez délivrer à travers votre proposition, mais, comme vous le savez, la préférence pour le candidat le plus âgé est un principe ancien, dont l'origine remonterait même à la Révolution française et aux Constitutions révolutionnaires, et qui s'est ensuite diffusé à l'ensemble de nos scrutins, notamment locaux, mais aussi dans la sphère socio-professionnelle, par exemple à l'occasion des élections au comité d'entreprise. Un renversement de ce principe impliquerait donc de très nombreuses modifications législatives pour changer un dispositif anciennement ancré, et qui, je le souligne, correspond à des cas extrêmement rares, pour ne pas dire exceptionnels. Je ne suis pas sûre que le jeu en vaille la chandelle, comme on dit un peu trivialement.
Vous avez envisagé de rendre obligatoire, par la loi, la diffusion des débats européens. Nous n'y sommes pas favorables, car de telles retransmissions relèvent, non pas de la répartition du temps d'expression des listes nationales dans le cadre d'une campagne officielle, mais de la mission d'information politique et électorale incombant aux médias publics nationaux, et s'exerçant selon les recommandations du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) ; elle ne relève pas du code électoral. Si une telle obligation de retransmission devait être fixée par la loi, cela nécessiterait de faire entrer ces temps d'expression dans le décompte des temps de parole des candidats nationaux. Or ils ne trouvent pas tous leur équivalent à l'échelle européenne. Enfin, cette retransmission peut être assurée dans le cadre du pilotage, par l'État, de ses opérateurs, ce qui ne relève en rien non plus du domaine de la loi.
Enfin, pour ce qui est des listes transnationales, le contrôle des résultats électoraux devrait revenir à une juridiction européenne, qu'il s'agisse d'une juridiction existante ou d'une juridiction ad hoc encore à inventer.