Beaucoup d'interventions « tapent à côté », si je puis me permettre. Vous dites que le burn out ne peut, en l'état, être reconnu comme maladie professionnelle : je suis parfaitement d'accord ! Nous ne souhaitons pas cette reconnaissance, mais celle des troubles psychiques liés au travail. Ces troubles psychiques sont très clairement définis dans la proposition de loi. En l'espèce, les psychiatres s'accordent notamment sur trois maladies : la dépression – définie comme clinique ou lourde –, l'anxiété généralisée et le stress post-traumatique.
Cela doit être clair avant notre passage dans l'hémicycle : nous ne souhaitons pas la reconnaissance du burn out comme maladie professionnelle. Le burn out n'est d'ailleurs pas reconnu comme une maladie, il ne peut donc être reconnu comme maladie professionnelle. Ainsi, nous n'avons pas besoin de définir précisément le burn out, puisque ce n'est pas à lui qu'on s'attaque, mais aux troubles psychiques liés au travail, pour la plupart issus du burn out et clairement caractérisés.
Vous avez raison, le burn out est multifactoriel. Mais la reconnaissance de nouvelles maladies professionnelles a toujours fait l'objet d'un bras de fer entre employeurs et employés. Les tableaux listant ces maladies sont l'histoire de luttes, mais aussi de choix du législateur : à un moment donné, nous pouvons décider de mettre la pression sur les employeurs – ce fut le cas pour le plomb, l'amiante ou la silicose. Pour ces maladies également, dans un premier temps, le patronat a longtemps argué que les causes étaient multifactorielles – liées à à la consommation de tabac ou d'alcool – et n'avaient rien à voir avec le fait que les mineurs allaient à la mine !
La silicose du XXIe siècle ne se situe plus dans les poumons, mais dans les cerveaux. Nos décisions doivent être à la hauteur de cette épidémie. Dans le Cash Investigation consacré à Lidl, un professeur en ergonomie explique que l'on fabrique des chômeurs de longue durée. Un rapport de tous les médecins du travail de la Poste indique clairement que l'on crée des inaptes physiques et psychologiques. Il s'agit tout de même de 400 000 personnes par an ! On peut toujours déclarer qu'on va faire de la prévention. Mais les chefs d'entreprise doivent avoir un intérêt à développer la prévention ! Dans le cas de la Poste, rien n'apparaît dans les bilans comptables. Ainsi, malgré tous les messages d'alerte envoyés, la situation perdure, avec les félicitations de la Cour des comptes…
On m'alerte également sur le coût de cette proposition de loi pour nos finances publiques. Mais nos finances publiques paient actuellement les conséquences de cette inertie. Mon objectif est bien que demain, grâce à vous, elles ne les paient plus !
Vous êtes tous très sensibles au sujet, mais estimez que la reconnaissance de nouvelles maladies professionnelles n'est pas la solution. Mais alors, quelle solution proposez-vous ? Ne venez pas me dire qu'on va faire de la sensibilisation auprès des employeurs : ce n'est pas à la hauteur des enjeux !
Qu'est-ce que la présomption d'imputabilité ? Compte tenu d'une liste limitative de travaux susceptibles de provoquer ces maladies, si les conditions sont remplies, le travailleur qui estime que sa dépression lourde est provoquée par le travail sera d'emblée reconnu en maladie professionnelle. L'employeur pourra contester cette décision, mais la présomption d'imputabilité inverse la charge de la preuve. Actuellement, les salariés concernés – déjà démolis – subissent un véritable parcours du combattant sans certitude d'être entendus… La présomption d'imputabilité n'implique donc pas un traitement automatique puisque l'employeur peut contester cette décision.
Vous estimez que la reconnaissance n'est pas la solution. Mais on ne peut pas se contenter d'attendre les conclusions des différents ministères ! Vous savez prendre des décisions dans l'urgence quand il s'agit par exemple de supprimer les CHSCT ! Compte tenu de l'épidémie en la matière, j'espère que vous saurez défendre ces propositions fortes, à la hauteur des enjeux.