Je suis surprise, monsieur Touraine, de vous entendre me suggérer de retirer ma proposition de loi étant donné que vous avez déposé un texte semblable deux mois avant moi. Vous ne l'avez pas retiré ; je ne vois donc pas de raison de retirer le mien.
Madame Firmin Le Bodo, en vertu des dispositions du règlement de l'Assemblée nationale concernant les missions d'évaluation, la loi Claeys-Leonetti ne pourra être évaluée que trois ans après sa promulgation, c'est-à-dire à partir de début 2019 seulement, ce qui reporterait son éventuelle modification de plusieurs années supplémentaires.
Contrairement à ce que vous avez indiqué, monsieur Ramadier, plus de la moitié des personnes admises dans les unités de soins palliatifs maintiennent leur demande de mourir malgré les soins prodigués, d'après les données citées par M. Jean-Luc Romero lors de son audition de la semaine dernière.
Sachez, madame de Vaucouleurs, que la possibilité d'accès à la sédation profonde et continue est encore rarement utilisée, puisque les recommandations de la Haute autorité de santé sur les modalités de la sédation n'ont toujours pas été publiées, comme nous l'a rapporté hier la Société française d'accompagnement des soins palliatifs lors de son audition.
Vous avez cité, madame Elimas, le cas d'une personne qui apprend un diagnostic de maladie grave et incurable. Comme l'ont souligné hier, lors de leur audition, les représentantes du Centre national de la fin de vie et des soins palliatifs, le seul fait de savoir qu'ils ont la possibilité de choisir pourrait apaiser bon nombre de nos concitoyens, qui se savent condamnés, sans pour autant qu'ils choisissent définitivement l'euthanasie. Quant à la législation relative à l'euthanasie et au suicide assisté, elle n'est nullement antithétique par rapport à la poursuite du développement des soins palliatifs sur l'ensemble du territoire.
Heureusement, monsieur Lurton, que tout le monde n'est pas d'accord avec notre proposition. Que 90 % des Français se disent favorables à l'adoption d'une loi sur l'euthanasie ne signifient pas qu'ils sont tous favorables à l'euthanasie en tant que telle et, a fortiori, qu'ils souhaiteraient l'euthanasie pour eux-mêmes. D'autre part, je n'ai pas employé le mot « conservateur », et tout le monde peut penser différemment. Précisément, il s'agit ici de proposer une loi sur l'euthanasie, non de l'imposer. Quant à la Société française d'accompagnement et de soins palliatifs que j'ai auditionnée hier, son avis est très réservé sur le texte ; les représentantes du Centre national de la fin de vie et des soins palliatifs, en revanche, ont un avis plus ouvert. Enfin, nous n'avons pas eu le temps d'auditionner les médecins mais, si vous le souhaitez, nous pouvons envisager de le faire d'ici à la séance publique.
Monsieur Bazin : je tiens à vous rassurer, je compte donner un avis favorable à vos amendements visant à demander un rapport annuel sur la mise en oeuvre effective des objectifs du plan pluriannuel de développement des soins palliatifs. Ce sujet n'est pas à opposer à celui qui nous occupe.
Monsieur Hetzel, nous avons auditionné hier les représentants du Centre national de la fin de vie et des soins palliatifs qui nous ont fait part des difficultés d'application de la loi du 2 février 2016, qui placerait selon eux les médecins dans une situation de malaise et qui serait difficilement applicable, puisque les unités de soins palliatifs, qui sont en première ligne en matière de sédation, sont souvent récalcitrantes, leurs personnels ayant fait le choix de s'engager professionnellement pour accompagner des malades la main dans la main, les yeux dans les yeux, et non des malades sous sédation.
Je rappelle enfin à ceux qui l'ignorent peut-être que j'ai été aide-soignante de nuit dans différents services, y compris en EHPAD, et que je connais évidemment le regard qu'ont les patients dans les dernières heures de leur vie, pour en avoir accompagné beaucoup. Nous connaissons tous des histoires de beaux décès comme des histoires de décès tragiques et difficiles. Tout cela a été pris en compte.
Nous partirions sur de mauvaises bases en opposant systématiquement la loi Claeys-Leonetti et les soins palliatifs avec cette proposition de loi sur l'euthanasie. D'ailleurs, monsieur Breton, le groupe LFI cosignera votre proposition sur les soins palliatifs ; quitte à en agacer certains, je suis la première, dans l'hémicycle, à dire que les soins palliatifs ne fonctionnent pas faute d'effectifs suffisants. N'opposons pas les soins palliatifs à l'euthanasie ; tout le monde mérite une fin de vie digne, avec ou sans sédation ou euthanasie, selon le choix de chacun. Encore une fois, il ne faut pas opposer les deux ; nous parlons là d'un choix personnel. Je serai la première à me satisfaire que les soins palliatifs s'améliorent en France.
Quant à ma définition d'une fin de vie digne, je dirai ceci : tous ici, nous donnerions sans doute une définition différente de ce qu'est une fin de vie digne, car elle relève d'un choix personnel.