Intervention de Jean-Louis Bourlanges

Réunion du mercredi 24 janvier 2018 à 16h35
Commission des affaires européennes

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Louis Bourlanges, vice-président :

Je me suis rendu à Sofia pour la réunion des Présidents de la COSAC et j'ai pu constater que ce qu'on appelait la « petite COSAC » s'était élargie. Au cours de la réunion, la Présidence bulgare nous a présenté ses priorités pour les six mois à venir. Elles sont au nombre de quatre.

La première concerne la politique d'intégration des Balkans occidentaux. La Présidence a abordé cette question complexe et parfois même controversée avec délicatesse en estimant que le temps de la Présidence n'est pas celui de l'adhésion de ces pays à l'Union européenne, mais qu'il faut entreprendre dès maintenant des travaux préparatoires notamment en améliorant les infrastructures pour faciliter leur intégration le moment venu. La deuxième priorité concerne la sécurité et la stabilité et est essentiellement centrée sur les problèmes de l'asile. Cette priorité a donné lieu, lors du débat sur l'avenir de l'Union, à des discussions et prises de positions dont je dirai un mot tout à l'heure. La troisième priorité est celle de l'économie numérique : la Présidence bulgare veut poursuivre les initiatives prises sous présidence estonienne et favoriser l'adoption définitive d'un certain nombre de textes avant les élections européennes. La quatrième priorité est l'avenir de l'Europe et le désir a été rappelé de favoriser toutes les formes d'intégration et d'inclusion des jeunes.

De manière générale, chaque intervenant ne disposant que de deux minutes de temps de parole, les discussions ont davantage été un exposé des positions de chacun plutôt qu'un réel débat. Personnellement, j'ai signalé qu'il me semble que la grande attente de nos opinions publiques concerne les progrès à réaliser en matière d'asile et d'immigration. Puisqu'il faut desserrer le carcan du Règlement de Dublin qui fait peser une charge extrêmement importante sur les États de premier accueil, j'ai suggéré que l'aide à l'intégration, sous toutes ses formes, soit une priorité dans le futur cadre financier pluriannuel. Cela serait une grande dépense structurelle qui présenterait plusieurs avantages : favoriser ceux qui supportent le fardeau, engager une dépense qui ne paraîtrait pas absurde, notamment aux yeux de l'Allemagne, puisque celle-ci en bénéficierait, et envoyer enfin un message fort aux pays qui refusent d'appliquer les règles définies en matière de relocalisation et d'admission des migrants, en particulier la Pologne et la Hongrie, puisque ceux-ci ne recevraient pas d'argent dans ce cadre. C'est la proposition que j'ai formulée, de manière un peu moins directe que cela, à Sofia.

Nous avons ensuite abordé les questions relatives à l'avenir de l'Union européenne, notamment avec une intervention rigoureuse et ambitieuse du vice-président Timmermans. Nous nous sommes essentiellement concentrés sur deux problèmes : le problème de l'immigration et les travaux du groupe de travail sur la subsidiarité et la proportionnalité. Sur le premier point, il y a eu une tension assez forte entre la représentante de la Diète polonaise et le vice-président Timmermans qui a rappelé que le programme de relocalisation des migrants n'était pas un échec, même s'il n'avait pas atteint l'ensemble de ses objectifs et qu'il fallait faire preuve de solidarité dans la gestion de la question.

Le deuxième point concernait les travaux du groupe de travail sur la subsidiarité et la proportionnalité lancé par la Commission européenne et qui vise à offrir aux parlements nationaux l'occasion d'exprimer leurs frustrations, attentes et propositions dans la gestion des questions de subsidiarité. Je pense pour ma part que jusqu'à présent les parlements nationaux se sont mal saisis de cet outil en en détournant la finalité pour faire valoir leur opposition à un texte indépendamment de son respect du principe de subsidiarité.

La Commission européenne a créé un groupe de travail associant les parlements nationaux, le Parlement européen et le Comité des régions. Le Parlement européen boude cette instance et l'on peut distinguer plusieurs raisons non officielles à cela. La première est que ces questions de subsidiarité et de proportionnalité concernent essentiellement des activités de législateur, c'est-à-dire le Parlement européen pour l'Union européenne et les parlements nationaux pour les États membres. Il est compréhensible que le Parlement européen considère, quoique ne le disant pas explicitement, que le groupe de travail doive se limiter à des représentants parlementaires. Par ailleurs, les parlements nationaux sont des représentants des régions tout à fait légitimes avec lesquels le Parlement européen semble plus prêt à coopérer qu'avec le Comité des régions. Ces arguments n'ont pas été évoqués, mais tout cela était très implicite.

Pour ce qui nous concerne, il a été décidé que les représentants de la troïka parlementaire qui siégeront au sein du groupe de travail réuniraient des représentants des différentes commissions des Affaires européennes pour échanger avec eux sur les méthodes de travail de ce groupe.

Dans le débat qui a suivi, beaucoup d'intervenants ont fait valoir des griefs traditionnels quant à un trop fort interventionnisme de l'Union européenne sur des sujets techniques et une trop faible implication politique. Je me suis permis de faire une observation assez précise en rappelant que les compétences de l'Union européenne sont limitées par les traités et que l'on ne peut pas à la fois lui reprocher de ne pas faire de la « grande politique » en matière de politique étrangère ou d'harmonisation fiscale et lui refuser en même temps les procédures etou les compétences pour le faire. On ne peut pas lui reprocher ce qu'on ne lui donne pas les moyens de faire. J'ai conclu par la formule célèbre inspirée par Bossuet : « Dieu se rit des hommes qui déplorent les effets dont ils chérissent les causes ».

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