Intervention de Guillaume Chiche

Séance en hémicycle du jeudi 1er février 2018 à 9h30
Reconnaissance comme maladies professionnelles des pathologies psychiques résultant de l'épuisement professionnel — Motion de rejet préalable

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGuillaume Chiche :

Au-delà des chiffres et des statistiques, ce sont des individus, des femmes et des hommes, qui sont bouleversés et brisés par des affections psychiques. Je crois d'ailleurs pouvoir dire que chacun d'entre nous a connu, dans son entourage ou sur son lieu de travail, des personnes confrontées à de telles situations. J'ai la conviction que notre tâche est de permettre à chaque salarié de trouver une source d'épanouissement professionnel et de mener sereinement sa vie privée. C'est en ce sens que nous sommes déterminés à agir pour améliorer la santé au travail, comme d'autres l'ont fait auparavant, en instaurant notamment le droit à la déconnexion.

Tous ces éléments nous montrent que la question se pose en termes de prévention et d'accompagnement du salarié et non pas sous le seul prisme d'une nomenclature particulière. Or votre proposition de loi a pour objectif principal de créer un tableau de maladies professionnelles permettant la reconnaissance du burn-out au sens des « pathologies psychiques résultant de l'épuisement professionnel », comme l'indique le titre de votre proposition de loi, même si j'ai bien noté que vous avez déposé un amendement en commission pour modifier votre titre, ce qui, soit dit en passant, ne facilite pas la clarté de nos échanges.

Au fond, c'est d'abord le caractère indéfinissable et multifactoriel du syndrome du burn-out qui fait obstacle à son inscription au tableau des maladies professionnelles. En effet, c'est bien sa singularité qui appelle un traitement et une réparation individualisés pour chaque personne concernée. C'est d'ailleurs en ce sens qu'il est possible de reconnaître le caractère professionnel d'une maladie non mentionnée dans un tableau, mais directement imputable à l'activité professionnelle de la victime, depuis la loi du 27 janvier 1993. Dans le même cadre et la même logique, depuis la loi relative au dialogue social et à l'emploi, dite loi Rebsamen, de 2015, il est possible de reconnaître les pathologies psychiques comme des maladies d'origine professionnelle hors tableau.

Dans ce cas, le dossier de la victime est soumis à un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, lequel se prononce de manière individualisée sur l'existence d'un lien entre la maladie et l'activité professionnelle. C'est un collège de praticiens qui travaille à la reconnaissance d'une pathologie psychique. Si cette reconnaissance est conditionnée à une incapacité permanente partielle au moins égale à 25 %, depuis 2012, il a été demandé aux caisses d'assurance maladie d'interpréter de manière souple ce seuil du taux d'incapacité afin de fixer un taux prévisible à la date de la demande de reconnaissance, sans exiger que l'état de la victime ne soit stabilisé.

Par ailleurs, depuis le décret d'application du 7 juin 2016, l'expertise médicale des C2RMP est renforcée par la possibilité de faire intervenir des médecins psychiatres lors des différentes phases de la procédure de reconnaissance. Ainsi, en 2016, ce sont près de 600 cas de pathologies psychiques reconnues en maladie professionnelle qui ont été recensés – soit sept fois plus que les années précédentes – et non 200, comme vous l'avez mentionné, monsieur le rapporteur, dans l'exposé des motifs de votre proposition de loi, avant de corriger ce chiffre en commission et dans la discussion générale.

Mes chers collègues, je souhaite revenir sur l'évolution des tableaux de maladies professionnelles. Ils sont, vous le savez, le fruit d'une concertation entre les partenaires sociaux menée au sein du conseil d'orientation des conditions de travail. Au-delà du fait que l'objet de votre proposition de loi relève du domaine réglementaire et non du domaine législatif, vous nous demandez de légiférer au mépris du dialogue social, et c'est là que se dessine une véritable ligne de fracture entre vous et nous. Déjà, en septembre dernier, La France insoumise reprochait aux syndicats, et donc aux travailleurs, d'affaiblir son combat politique en ne se jetant pas dans la rue à son appel contre notre projet de loi de modernisation du dialogue social.

Avec cette proposition, le message devient clair : pour La France insoumise, quand les organisations syndicales ne suivent pas, la loi doit s'imposer à elles !

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