Elles sont présentées comme s'inscrivant dans le sillage du travail largement reconnu que nous avons mené en 2013, 2015 et 2016, avec des lois majeures mettant en place la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, le parquet national financier, des obligations déontologiques pour les fonctionnaires, mais aussi les magistrats et le Conseil supérieur de la magistrature. Seuls échappent désormais à l'exigence d'une déclaration d'intérêts et de situation patrimoniale, dans la sphère publique, les membres du Conseil constitutionnel. Pourtant, ces derniers ne rendent-ils pas des décisions insusceptibles de recours, dont l'importance doit être entourée de toutes les garanties que, texte après texte, nous apportons ? Nous reprendrons avec vous, madame la garde des sceaux, si vous le voulez bien, la proposition de loi adoptée à ce sujet lors de la dernière législature – soutenue d'ailleurs par le garde des sceaux de l'époque, Jean-Jacques Urvoas – , et qui s'est vu décerner des satisfecit par Transparency International France, le GRECO ou encore ANTICOR.
Permettez-moi quelques remarques d'ordre général. La première sera un regret, celui que l'on ne puisse mener une réflexion approfondie sur ces questions fondamentales de déontologie, sur les principes généraux qui doivent orienter notre travail et non se limiter comme ici à une succession de réponses précipitées à une opinion publique fracassée par des comportements que les parlementaires « ordinaires » que nous sommes ne pouvaient même imaginer.
Une incompréhension également quant à l'affichage de cette précipitation. Le Conseil d'État lui-même dénonce une étude d'impact insuffisante. Nous aurions pu refuser l'examen de ce texte en commission pour ce motif. Nous vous proposerons des amendements pour redonner toute son utilité à l'étude d'impact dans l'examen mené par la représentation nationale des projets de loi qui lui seront soumis.
Seconde remarque : ce texte, dont l'ambition est de rétablir la confiance dans l'action publique, ne répond qu'imparfaitement à cette préoccupation fondamentale.
Outre l'insuffisance, je dirais même l'hypocrisie des réponses en matière de conflits d'intérêts – l'activité de conseil en particulier – , il manque à ce texte deux grands axes de réflexion, ce que le Sénat a tenté, en vain, de corriger.
Le premier concerne l'action publique proprement dite et la nécessité de garantir l'effectivité des décisions prises par les pouvoirs publics. La confiance passe par la réponse effective et rapide aux problèmes rencontrés par nos concitoyens. Ce sont par exemple les agriculteurs qui attendent deux ans le versement d'une subvention au titre de la politique agricole commune.
La confiance passe aussi par la transparence, par la suppression de toutes les suspicions de conflits d'intérêts, des privilèges matériels inutiles, ainsi que des carrières hors du droit commun – tant pour les élus que pour les membres de la haute fonction publique. Ces derniers naviguent entre fonction publique et sphère politique, dans un va-et-vient continuel qui nous oblige à poser des règles de cloisonnement. Quand donc le fera-t-on ? Lorsque interviendra le prochain scandale ?
Madame la garde des sceaux, pouvez-vous vous engager à présenter un texte sur la haute fonction publique qui nous dirige, puis sur les collectivités locales, dans les six ou douze mois qui viennent ?
Le second axe concerne la démocratie, le Parlement du non-cumul des mandats, l'équilibre entre le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif, et la place du citoyen dans l'action publique. En nous mobilisant pour faire adopter le texte difficile sur le non-cumul des mandats, nous nous sommes engagés pour faire naître le Parlement du futur, …