Intervention de Sébastien Lecornu

Séance en hémicycle du mercredi 7 février 2018 à 15h00
Ordonnances relatives à l'élaboration des décisions ayant une incidence sur l'environnement — Présentation

Sébastien Lecornu, secrétaire d'état auprès du ministre d'état, ministre de la transition écologique et solidaire :

Monsieur le président, madame la présidente de la commission du développement durable, monsieur le rapporteur, mesdames et messieurs les députés, c'est avec satisfaction que je m'exprime devant vous sur ce projet de loi ratifiant deux ordonnances.

Vous l'avez rappelé, monsieur le rapporteur, ces ordonnances portent, l'une, sur l'évaluation environnementale des projets, plans et programmes, l'autre, sur l'information et la participation du public lors de l'élaboration de décisions ayant une incidence sur l'environnement. Je ressens cette satisfaction car, sur ces questions particulièrement techniques – parfois même arides – , l'Assemblée nationale, le Sénat et le Gouvernement ont su travailler la main dans la main, ces derniers mois, pour faire évoluer positivement, je le crois, ces deux ordonnances.

Je tiens à vous remercier, monsieur le rapporteur, pour l'important travail que vous avez mené sur ce texte depuis le mois de juillet, quelques jours seulement après votre élection comme député. Grâce à une approche particulièrement constructive, députés et sénateurs sont parvenus à un accord en commission mixte paritaire, le 20 décembre dernier.

Le texte issu de la commission mixte paritaire est équilibré et reprend une grande partie des dispositions adoptées à l'Assemblée nationale et au Sénat. Il importait, en effet, de dégager un consensus entre les deux chambres sur ce projet de loi visant précisément à faire émerger des consensus parmi nos concitoyens.

Le présent projet de loi est nécessaire pour ratifier ces deux ordonnances très importantes prises dans le cadre de la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, dite « loi Macron ». Elles sont le fruit d'une concertation approfondie, menée au sein de la commission spécialisée du Conseil national de la transition écologique par le sénateur et ancien ministre de la défense Alain Richard.

Pour rappel, l'une de ces ordonnances est relative à la modification des règles applicables à l'évaluation environnementale des projets, plans et programmes – pour reprendre la terminologie du droit communautaire – , avec un objectif clair de simplification et de clarification des procédures. L'autre réforme les procédures destinées à assurer l'information et la participation du public avec une volonté d'associer davantage, en amont, les citoyens à l'élaboration de certaines décisions susceptibles d'avoir une incidence sur l'environnement.

C'est surtout, et c'est assez naturel, la seconde ordonnance qui a donné lieu à des échanges nourris entre les parlementaires. Je rappelle qu'elle constitue l'une des réponses du gouvernement de l'époque à un changement de mentalité dans notre société, notamment après le drame de Sivens.

Permettez-moi d'évoquer rapidement les principales mesures de cette dernière ordonnance, qui visent à répondre aux attentes de nos concitoyens en matière d'information et de participation. Tout d'abord, elle institue un droit d'initiative, qui permettra au public, aux collectivités territoriales ou aux associations de demander l'organisation d'une concertation préalable en amont de l'instruction d'un projet. Ensuite, la mise en place, toujours en amont de l'instruction d'un projet, plan ou programme, d'une véritable concertation doit permettre de questionner l'opportunité d'un projet ou les principales orientations d'un plan ou d'un programme. Nos concitoyens ont trop souvent le sentiment que la participation intervient trop tard pour leur permettre d'influer réellement sur le projet et sur les décisions publiques qui s'y attachent. Cette concertation préalable répond à cette critique et vise à apaiser les tensions qui s'expriment parfois localement. Enfin, la Commission nationale du débat public pourra être saisie des plans ou programmes nationaux, ce qui n'était pas le cas jusqu'à présent. Cela permettra d'associer le public pour des plans ou programmes encadrant la réalisation de projets, le plus en amont possible, au moment des discussions sur les périmètres d'implantation de ces projets.

De manière concrète, je peux d'ores et déjà vous indiquer que la CNDP a décidé d'organiser une concertation préalable sur les documents stratégiques de façade des quatre grandes façades maritimes françaises – concertation qui a d'ailleurs déjà commencé – , ce qui permettra de lancer un débat sur la planification spatiale de ces espaces maritimes et littoraux. Un deuxième débat public aura lieu sur la question, qui tient à coeur à Mme la présidente de la commission du développement durable, de la programmation pluriannuelle de l'énergie.

Le Gouvernement est convaincu que l'information et la participation du public le plus en amont possible sont facteurs de réussite de la transition écologique. Qu'elles aient lieu à l'initiative du maître d'ouvrage ou à la demande du préfet, elles permettent de prendre en compte l'avis des populations et de les rassurer sur des projets entrant dans le cadre de cette transition. Je pense notamment aux projets de méthaniseurs ou d'éoliennes, qui peuvent parfois susciter – nous l'avons vu dans le cadre des groupes de travail qui ont été installés il y a quelques semaines – de légitimes inquiétudes. La concertation n'est pas une perte de temps, mais un moyen d'apaiser les tensions qui peuvent s'exprimer sur le terrain et de faciliter l'autorisation et la réalisation de ces projets dans les délais les plus rapides possible.

Enfin, je rappellerai brièvement les principaux points d'accord qui ont été trouvés grâce à la commission mixte paritaire, et grâce à votre travail.

Il s'agit, premièrement, du seuil de dépenses à partir duquel le droit d'initiative se déclenche : ce seuil sera au maximum de 5 millions d'euros. Sur cette question, un désaccord persistait entre l'Assemblée nationale et le Sénat, qui ne voulait pas fixer ce seuil par la loi, estimant que cela relève davantage du champ réglementaire. Lors des discussions en commission mixte paritaire, les sénateurs, emmenés par leur rapporteur, Alain Fouché, ont accepté de réintroduire ce seuil afin d'arriver à un compromis, ce dont, à titre personnel, je me réjouis. Il est vrai que ce seuil doit être analysé à la lumière d'un contexte particulier : il permettra de prendre en compte des projets semblables à celui de Sivens.

Deuxièmement, une articulation entre les procédures de concertation et de débat public inscrites dans le code de l'environnement et la procédure de concertation propre au code de l'urbanisme a été réintroduite. Les échanges en commission mixte paritaire ont permis d'aboutir à une rédaction claire, répondant aux préoccupations des deux chambres.

Troisièmement, les parlementaires ont fait évoluer la rédaction d'une mesure introduite par le sénateur de Loire-Atlantique Ronan Dantec concernant la prise en compte de la compensation écologique sur la consommation d'espaces agricoles dans les études d'impact des projets. Le Gouvernement présentera dans quelques instants un amendement purement rédactionnel sur ce point, en accord avec les rapporteurs de l'Assemblée nationale et du Sénat.

Au Sénat, la lecture des conclusions de la commission mixte paritaire aura lieu jeudi 15 février. Le projet de loi devrait donc être définitivement adopté la semaine prochaine, ratifiant ces deux ordonnances.

Comme je l'ai dit lors de l'examen du texte en première lecture, en séance aussi bien qu'en commission, perdre du temps en amont d'un projet ou d'une procédure est nécessaire pour ne pas en perdre ensuite. J'espère que nous aurons réussi à avancer en suivant cette maxime, car une consultation plus large de nos concitoyens permettra de lever les doutes qui s'expriment sur certains projets.

Je tiens à rappeler que je me suis par ailleurs engagé à ce qu'une évaluation rapide de l'application de ces ordonnances ait lieu. Le projet de loi pour un État au service d'une société de confiance, adopté en première lecture à l'Assemblée nationale, prévoit justement un rapport sur l'ordonnance relative à l'information et à la participation du public. Deux ans me paraissent un délai raisonnable pour produire ce rapport évaluant les premiers effets de l'ordonnance.

Ce sera l'occasion de discuter à nouveau d'un éventuel abaissement du seuil de saisine de la CNDP, établi aujourd'hui à 500 000 citoyens de l'Union européenne. Je sais que cette question tient particulièrement à coeur à de nombreux membres de la commission du développement durable, au premier rang desquels leur présidente, Mme Pompili.

En attendant, je vous invite à adopter ce texte tel qu'il résulte des travaux de la commission mixte paritaire, fruit de l'excellent travail que vous avez accompli. Je vous en suis d'autant plus reconnaissant qu'il s'agissait, pour moi, de mon baptême au Parlement.

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