Mais croit-on sérieusement que le mode de scrutin serait la première cause de cette désaffection ? À l'évidence, non ! Il ne s'agit pas de se demander dans une perspective politicienne, comme vous le faites, cher collègue, qui était président : la question est celle de la panne stratégique de l'Union européenne, de son enlisement bureaucratique, de son déclassement économique, qui expliquent beaucoup plus sûrement que tel ou tel mode de scrutin la méfiance des citoyens français, devenue, hélas, légitime.
Le deuxième argument avancé à l'appui du projet de loi est tout aussi faible : on prétend que, dans la plupart des pays européens, le choix a été fait d'organiser le scrutin dans une circonscription nationale unique. C'est à la fois exact factuellement et parfaitement inopérant politiquement.
La vérité est que la plupart des pays européens n'ont pas une taille géographique et un volume démographique suffisants pour que le système proportionnel puisse s'appliquer ailleurs que dans une circonscription nationale unique : le Luxembourg, Malte ou la Croatie n'ont tout simplement pas le choix. La vérité est que, lorsqu'ils le peuvent, les pays d'une certaine taille ont choisi un mode de scrutin régionalisé.