Intervention de Sophie Auconie

Séance en hémicycle du mardi 13 février 2018 à 15h00
Élection des représentants au parlement européen — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSophie Auconie :

La multiplication des circonscriptions a en outre généralement pour effet de favoriser les grands partis, les poids lourds, qui disposent de moyens humains et financiers importants, au détriment des petites formations politiques qui voient par ailleurs les effets du scrutin proportionnel limités.

Enfin, en choisissant des circonscriptions multiples, la France s'est éloignée du modèle majoritaire dans l'Union, celui de la circonscription nationale, adopté depuis 1999 par vingt-deux des vingt-huit États membres. Au fond, la volonté de généraliser la représentation proportionnelle dans tous les pays membres a été dévoyée par ces circonscriptions interrégionales, et cette réforme a, contrairement à son objectif affiché, éloigné l'Europe des citoyens français.

Afin que notre système retrouve de la cohérence, préalable indispensable à cette légitimité qui lui fait tant défaut, il est donc nécessaire de se diriger vers une harmonisation du mode de scrutin. L'interrégionalisme doit demeurer l'exception, justifiée par l'existence d'un État fédéral, comme en Italie ou en Belgique.

Dans cette même logique d'harmonisation européenne, les systèmes les plus simples sont souvent les meilleurs. Il est donc à mon sens crucial de conserver les candidats têtes de listes, les Spitzenkandidaten, afin que la composition de la Commission soit le résultat d'un choix citoyen et non d'un arrangement entre États, comme cela fut longtemps le cas : 2014 restera l'année où les citoyens et le Parlement ont, légitimement, été acteurs dans le choix de l'exécutif européen. Nous ne pouvons remettre en cause un tel acquis, qui repose sur un mécanisme simple : la responsabilité de la Commission devant le peuple européen et ses représentants.

Proximité et pluralisme sont les principes qui doivent donc guider nos réflexions pour une Europe légitime. En revenant, avec l'adoption de ce projet de loi, à une circonscription électorale unique, nous remplirons la double exigence de garantie du pluralisme politique et d'intelligibilité du scrutin, conditions indispensables au rétablissement de la confiance des Français dans le projet démocratique européen.

Il nous faut par ailleurs saluer les dispositions relatives à l'alignement des obligations déclaratives et de publicité des dépenses électorales sur celles des élections nationales. Nous moderniserons ainsi la vie politique de notre pays sans alimenter l'antiparlementarisme ambiant, et nous pouvons nous en réjouir.

En ce qui concerne les règles d'organisation de la campagne officielle et la répartition des temps d'antenne, je tiens à soulever un sujet qui, même s'il paraît technique et accessoire, revêt une certaine importance puisqu'il pourrait conduire à une certaine inégalité, voire à une certaine iniquité.

En effet, la rédaction actuelle des quatrième et cinquième alinéas de l'article 2 laisse notre groupe perplexe, dans la mesure où la répartition de la durée d'émission de deux heures repose sur des notions qui ne sont pas définies juridiquement, et qui pourraient semer la confusion.

Or, en termes de communication et de médias, nous ne pouvons pas maintenir cette confusion. Je pense notamment aux termes d'« inscription » et de « rattachement » à des « partis » ou « groupements politiques » qui méritent un éclaircissement tant les démarches et les structures qu'ils peuvent recouvrir sont larges. C'est pourquoi nous avons déposé plusieurs amendements que nous aurons l'occasion de vous présenter ce soir.

Aussi, au-delà de ces inquiétudes qui seront, j'en suis sûre, partagées par le Gouvernement et l'ensemble des groupes, et qui devraient être levées, le groupe UDl, Agir et Indépendants ne peut que soutenir ce texte qui participera, dès l'année prochaine, modestement mais sûrement, à la refondation de l'Union européenne.

Un dernier point, nous devons être très attentifs à la représentation sur les listes nationales des outre-mer, qui représentent une part importante du littoral français.

Faute de pouvoir choisir entre elles, je vous livre deux citations. Guillaume Apollinaire disait : « il est grand temps de rallumer les étoiles ». Que ces étoiles soient celles de l'Europe. Selon Saint-Exupéry, « la pierre n'a point d'espoir d'être autre chose que pierre. Mais de collaborer, elle s'assemble et devient temple ». Construisons donc ensemble le temple de la démocratie européenne.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.