Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur, chers collègues, l'enfer est pavé de bonnes intentions. Dans son discours à la Sorbonne, comme nous le rappelle le rapport sur le texte que nous examinons, le Président de la République a annoncé vouloir tracer une nouvelle route pour l'Europe – mais où cette route nous mènera-t-elle ?
Le projet de loi vise à revenir sur la réforme de 2003, en restaurant le scrutin de listes nationales aux prochaines élections européennes. Pourtant, dans le même temps, le Président de la République a oeuvré pour l'établissement de listes transnationales afin de redistribuer les sièges laissés vacants par le Royaume-Uni. Quel paradoxe !
L'adoption de ce texte constitue une nouvelle étape pour ceux qui veulent une Europe abstraite, coupée des réalités nationales et territoriales, des besoins et revendications de ses citoyens, au profit de ceux des partis – bref, une Europe, comme le disait Albert Camus, coupée de son histoire et de ses racines, sans lesquelles elle est un désert.
Pourtant, depuis plus de vingt ans, l'Europe s'est décentralisée, et les pays qui la composent aspirent à toujours plus de liberté, plus de représentativité et plus de confiance en leurs représentants. C'est pourquoi, en 2003, ont été créées les huit circonscriptions françaises que le Gouvernement souhaite aujourd'hui supprimer.
Ce texte a quinze ans de retard, car coupler la proportionnelle à un tour à la circonscription unique, c'est nier quinze ans de décentralisation, quinze ans de liens entre les élus européens, leurs territoires et leurs citoyens.