Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, avant que nous ne discutions des articles de cette proposition de loi, je souhaite, au nom de mon groupe, en contester le principe, les fondements et les moyens. Je veux dire également que nous ne pouvons dissocier, dans cet examen, les dispositions de ce texte et celles du futur projet de loi sur l'asile et l'immigration dont nous avons connaissance.
Partons de la situation concrète de l'état des personnes qui relèvent de la procédure de « dublinage », par laquelle la France peut, en théorie, engager des démarches pour renvoyer un demandeur d'asile vers le pays responsable de l'examen de sa demande. En 2015, la proportion des personnes concernées par cette procédure représentait seulement 10 % du total des demandeurs d'asile. À présent, plus d'une personne sur deux est susceptible d'en relever : l'ampleur est tout autre.
Les personnes qui relèvent potentiellement de la procédure de dublinage sont-elles dans cette situation parce qu'elles ont été déboutées du droit d'asile ou pour d'autres raisons ? Aujourd'hui, il s'avère que 60 % de ces prétendus « dublinés » n'ont en réalité déposé aucune demande d'asile dans le pays par lequel ils sont entrés sur le territoire européen. En effet, les pays par lesquels arrivent le plus souvent les demandeurs d'asile, comme la Grèce et l'Italie, tendent à rendre systématique la prise d'empreintes et de photos, et considèrent cette opération comme une preuve que l'intéressé relève du règlement de Dublin. En aucun cas, pourtant, cela ne signifie que ces personnes ont réellement fait une demande d'asile, ni à plus forte raison que leur demande a été examinée selon la convention de Genève.
Dans cette situation, la France avait deux moyens de réagir. La première possibilité était de veiller à ce que, partout dans l'Union européenne, les conditions du droit d'asile soient les mêmes et respectent la convention de Genève. L'autre possibilité, celle que l'Union européenne a retenue et que vous allez suivre, est de considérer que tout étranger « dubliné » est un délinquant en puissance.