Le présent texte a été durci lors de son examen au Sénat. Pour ma part, j'ai voté contre la proposition de loi à l'issue de la première lecture à l'Assemblée nationale. Il va de soi que je ne suis pas favorable à ce texte modifié. Je suis en désaccord avec le texte mais, surtout, avec le principe qui le sous-tend, à savoir l'application stricte du règlement de Dublin.
Les dysfonctionnements majeurs du règlement de Dublin III sont pointés de manière unanime ; chacun s'accorde sur ses failles. Dès lors, il ne me semble pas pertinent de se baser sur ce texte obsolète pour continuer à bâtir notre droit. Je pense préférable, comme le propose le Défenseur des droits, de suspendre son application ou, à défaut, de l'appliquer avec souplesse, comme le prévoit son article 17.
Le règlement fixe plusieurs critères permettant d'identifier l'État responsable de la demande d'asile. Le principal de ces critères définit comme responsable le premier État dont la frontière a été illégalement franchie. Il en résulte une inégalité évidente entre les pays situés aux frontières de l'Europe et les autres. Ce report de la responsabilité collective de l'Union européenne sur les seuls pays situés aux frontières de l'Europe ne peut qu'interpeller. Or on voudrait renforcer l'application du régime de Dublin afin de renvoyer davantage de demandeurs vers l'Italie, la Grèce et l'Espagne ? Je ne peux m'y résoudre.
Le règlement de Dublin III porte en lui les germes de ses dysfonctionnements. Il faut, bien entendu, le réformer, mais ce n'est pas pour demain, tant les désaccords sont majeurs au sein de l'Union. En attendant une hypothétique révision du règlement, que faisons-nous ? L'appliquons-nous à la lettre ? Le suspendons-nous ? Ou bien l'appliquons-nous avec souplesse ? J'aimerais être éclairée, madame la ministre, sur les intentions du Gouvernement en la matière, car la rédaction initiale du texte qu'il a présenté induisait une application à la lettre du règlement, qui me semble inopportune, …