Intervention de Jean-Paul Dufrègne

Réunion du mercredi 21 février 2018 à 9h35
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Paul Dufrègne :

« Ce n'est pas la bonne approche », « ce n'est pas le bon moment »... On voit bien combien la question des paradis fiscaux embarrasse. Ce ne sont pas les formules politiquement correctes, voire alambiquées, que j'entends qui vont la faire disparaître. Au contraire, elle s'installe et s'incruste, car nos concitoyens y sont particulièrement sensibles.

Eh oui, il est important de multiplier les initiatives politiques, nationales, européennes, internationales, en matière de lutte contre l'évasion fiscale. Le rapporteur a rappelé les montants colossaux en jeu. C'est un combat global qu'il faut mener face à ce fléau.

Les paradis fiscaux, bien souvent aussi paradis bancaires et judiciaires, agissent tels des trous noirs dans l'économie mondiale, dont tirent profit les éléments les plus mobiles, que sont les riches contribuables et les entreprises multinationales.

Face à ce fléau, bien entendu, une liste nationale isolée ne saurait suffire. Il y a lieu d'avancer sur l'harmonisation fiscale au niveau européen, de lutter contre l'érosion des bases fiscales, d'améliorer l'échange d'information, d'organiser une COP fiscale. Au niveau national, il y a lieu de questionner le « verrou de Bercy », de s'interroger sur la baisse constante des moyens humains de la direction générale des finances publiques, de s'attaquer au rôle des intermédiaires, comme SFM Offshore ou Fidusuisse, qu'a évoqués le rapporteur dans son intervention.

Une liste n'est pas suffisante, mais elle est nécessaire ! Il y a bien lieu d'identifier ces territoires qui ne jouent pas le jeu de la coopération fiscale internationale et d'en tirer les conclusions en adaptant notre arsenal législatif et fiscal.

Pour qu'une liste soit efficace, elle doit être élaborée sur la base de critères concrets et modernes, pour être au fait des pratiques fiscales actuelles. Car, avec l'évasion fiscale, on a l'impression que c'est un peu comme le dopage : les tricheurs ont toujours un temps d'avance. Les critères proposés tendent à cibler l'ensemble des pratiques qui font du tort à la coopération fiscale.

Pour qu'une liste soit efficace, elle doit également s'accompagner d'une procédure de suivi transparente et de véritables sanctions. En matière de lutte contre l'évasion fiscale, l'opacité est l'ennemie de l'efficacité. La présente proposition de loi entend échapper à ces écueils, en renforçant les prérogatives de notre assemblée. Depuis le début de cette législature, d'ailleurs, on a beaucoup entendu sur ces bancs qu'il était nécessaire de renforcer les capacités d'évaluation de l'action gouvernementale par le Parlement. Justement, cette proposition de loi répond à ces attentes.

À cet égard, la loi actuelle n'est pas respectée, à un double titre : la liste n'a pas été mise à jour depuis avril 2016, alors qu'elle doit l'être annuellement ; notre assemblée n'a jamais été consultée sur la liste française actuelle, alors qu'elle devrait l'être. Cette proposition de loi répond à ces problématiques.

Enfin, pour conclure, l'entrée en vigueur de cette proposition de loi, prévue pour le 1er janvier 2019, doit nous permettre de finaliser ce dispositif et d'adapter notre arsenal législatif, singulièrement lacunaire en la matière.

Oui, nous avons besoin de courage. Il ne suffit pas de dire que le combat continue pour que le combat avance et pour que la situation bouge. Avec le rapporteur et avec les membres du groupe GDR, nous croyons qu'une loi comme celle-ci est une loi moderne et progressiste. Ce fléau de l'évasion fiscale touche en effet les plus faibles de nos concitoyens, au niveau national, comme il touche les plus faibles au niveau international, c'est-à-dire les pays en voie de développement.

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