Intervention de Jean-Paul Bodin

Réunion du mercredi 14 février 2018 à 17h30
Commission de la défense nationale et des forces armées

Jean-Paul Bodin, secrétaire général pour l'administration du ministère de la défense :

Non, le parc de logements de la gendarmerie n'est plus pris en compte par le ministre des Armées depuis que la gendarmerie est placée sous l'autorité du ministère de l'Intérieur, sauf pour les gendarmeries spécialisées que sont la gendarmerie maritime, la gendarmerie de l'air, la gendarmerie de l'armement et la gendarmerie de sécurité des armements nucléaires.

La gestion locative ainsi que l'entretien et la maintenance du parc de logements domaniaux de la défense ont été confiés à la Société nationale immobilière (SNI) dans le cadre d'un bail civil de dix ans qui expire le 31 décembre 2018. Pour la suite, nous envisageons plusieurs hypothèses : mise en concurrence des divers opérateurs auxquels serait confiée la gestion du parc ; création d'une société foncière commune avec la SNI, sur sa proposition.

Par ailleurs, le ministère accorde une attention particulière à l'hébergement proposé en enceinte militaire aux militaires du rang, sous-officiers célibataires et célibataires géographiques. Un plan « Hébergement Île-de-France » s'élevant à 54 millions d'euros sur la période 2018-2022 permettra de proposer plus de 400 places supplémentaires sur différentes emprises – Satory, Saint-Germain-en-Laye, Arcueil, Versailles.

Ces mesures sont intégrées dans le plan d'accompagnement des familles et d'amélioration des conditions de vie des militaires présenté par la ministre à l'automne 2017 qui entrera en vigueur dès cette année. Le Conseil central de l'action sociale (CCAS) a arrêté les conditions de mise en oeuvre de 70 % des mesures du plan qui a fait l'objet d'une concertation avec les représentants du personnel, notamment le Conseil supérieur de la fonction militaire (CSFM) et les associations. Il représente un effort supplémentaire d'environ 300 millions d'euros sur la période 2018-2022 et de 530 millions d'euros sur la durée couverte par la LPM.

Enfin, la loi consent un effort significatif et durable en direction des militaires blessés ou malades en service et les familles des militaires morts au combat.

La procédure d'indemnisation des préjudices sera modernisée et simplifiée. Les démarches administratives et médicales seront allégées dans le cadre d'un « parcours du blessé ». Le congé de reconversion sera ouvert aux blessés en service sans qu'il y ait désormais de conditions d'ancienneté et le congé du blessé sera étendu à d'autres hypothèses, dans lesquelles nous souhaitons inclure des contextes opérationnels autres que les OPEX. Concernant les pensions militaires d'invalidité, ce ne sera plus au blessé de prouver le lien au service mais à l'administration de prouver une absence de lien au service. Enfin, les blessés pourront bénéficier des nouveaux soins dispensés par l'Institution nationale des Invalides, qui seront intégrés dans l'offre de soins proposée dans le cadre de la réforme du Service de santé des armées (SSA). Pour le personnel civil, des efforts seront consacrés à la prise en compte de toutes les formes de handicap.

Les mesures de la LPM favoriseront une gestion plus dynamique des ressources humaines.

S'agissant du recrutement du personnel civil, l'article 16 met en place deux expérimentations de recrutement dérogatoires dans la fonction publique afin de faciliter et de simplifier le recrutement des agents. La première crée une procédure de recrutement sans concours dans le premier grade des techniciens supérieurs d'études et de fabrications (TSEF) dans quatre zones géographiques sous tension – Bourgogne-Franche-Comté, Centre-Val-de-Loire, Grand-Est et Île-de-France. Elle portera au maximum sur 20 % des recrutements. Nous avions prévu qu'elle s'applique également aux secrétaires administratifs mais le Conseil supérieur de la fonction publique de l'État nous a demandé d'en restreindre le champ.

La seconde expérimentation permet de recruter des agents contractuels pour une durée qui ne peut excéder trois années, non renouvelable, afin de faire face à une vacance d'emploi de plus six mois dans l'attente du recrutement d'un fonctionnaire pour des emplois relevant de spécialités de haute technicité dans ces quatre régions. Aujourd'hui, il n'est possible de recruter des contractuels que pour une durée d'un an, éventuellement renouvelable, ce qui n'est pas satisfaisant pour attirer des compétences dont nous ne disposons pas en interne.

Pour contribuer à la fidélisation des personnels, une attention particulière sera portée à la lisibilité des parcours professionnels, en complément d'une politique de rémunération adaptée. Seront ainsi ciblées les compétences critiques – atomiciens, mécaniciens aéronautiques, praticiens de santé – mais aussi émergentes – cybersécurité, intelligence artificielle. Pour le personnel civil, plusieurs dispositifs de fidélisation seront mis en oeuvre, notamment un plan de requalification d'agents de catégorie C vers la catégorie B. Nous prévoyons aussi d'amplifier notre démarche de définition de parcours professionnels et d'accompagnements individualisés des cadres de catégorie A, administrateurs civils et attachés.

Enfin, le chantier de la nouvelle politique de rémunération des militaires (NPRM) est ouvert : une équipe de projet est en place. Jusqu'en 2022, 480 millions d'euros sont inscrits en provision pour financer des mesures s'inscrivant dans ce cadre. Nous traitons ce dossier en suivant très étroitement la réforme des retraites. Si des dispositifs comme la retraite à jouissance immédiate ou la bonification pour services ou pour campagne étaient remis en cause, cela aurait un impact négatif sur l'attractivité des armées, ce qui nous conduirait à envisager des compensations en termes de rémunérations, pour assurer le flux de militaires jeunes dont nous avons absolument besoin.

En outre, la LPM confie au Gouvernement le soin de définir par ordonnance les dispositifs d'aides au départ spécifiques qui seront maintenus ou amendés. Ils font l'objet d'une mission d'évaluation conjointe de l'inspection générale des finances et du contrôle général des armées. Nous verrons dans quel sens les adapter en fonction de ce qui sera décidé dans le cadre de la réforme des retraites.

La loi de programmation militaire 2019-2025 soutient le renforcement des réserves avec l'augmentation de la durée annuelle maximale d'activité dans la réserve opérationnelle à soixante jours par an et la mise en place de diverses dispositions destinées à favoriser le service dans la réserve militaire – fidélisation, couverture sociale, reconnaissance – et à simplifier les procédures et la gestion. De même, pour renforcer le lien des armées avec la jeunesse, la LPM pérennise à compter du 1er janvier 2019 le service militaire volontaire (SMV) dans son format actuel, à savoir 1 000 jeunes accueillis chaque année dans les six centres dédiés.

D'autres dispositions relatives aux ressources humaines portent sur l'allongement des limites d'âge ou les droits de permission.

Les dépenses d'infrastructures et d'immobilier représentent un effort important de la LPM puisque celle-ci prévoit de consacrer 13,6 milliards d'euros à la modernisation des infrastructures de défense. Ce financement se traduira par un niveau d'investissement moyen de 1,7 milliard d'euros par an sur les années 2019 à 2022, incluant quelque 300 millions pour la maintenance. Avec les infrastructures liées à la dissuasion, environ 110 millions d'euros par an, le « chiffre d'affaires » pour le service d'infrastructures s'élèvera autour de 1,9 milliard par an, montant beaucoup plus important que sous la précédente LPM, de 1,3 à 1,4 milliard par an.

Sur les 13,6 milliards d'euros d'investissements, 7,4 milliards seront consacrés au financement de l'adaptation des infrastructures dites « capacitaires », c'est-à-dire celles qui conditionnent directement les capacités opérationnelles des forces. Quelque 3,5 milliards sur ces 7,4 milliards financeront les programmes liés à l'arrivée des équipements nouveaux : sous-marins Barracuda, avions A400M et MRTT, véhicules du programme Scorpion. Le reste, soit 3,9 milliards, permettra de poursuivre la remise à niveau des installations portuaires et aéroportuaires, d'accompagner la remontée en puissance de la force opérationnelle terrestre, de faire face aux besoins de sécurité-protection des installations et de remise à niveau des casernements, et de financer les différents plans ministériels : le plan « Famille » et les plans antérieurs en matière de condition du personnel et d'infrastructures.

La LPM consent un effort particulier sur les immeubles d'hébergement et les infrastructures de vie courante. Nous avons prévu 400 millions d'euros dans les pôles d'alimentation. Nous devrons aussi investir dans les infrastructures liées à la production d'énergie, aux réseaux d'eau, d'électricité et de chauffage. Nous avons également prévu un plan de 50 millions d'euros pour remettre en état l'infrastructure des lycées militaires ; cela fait partie du plan « Famille » et c'est aussi un élément de recrutement car nous ouvrons des classes de brevet de technicien supérieur (BTS) dans les domaines scientifiques et techniques et le numérique.

En outre, un milliard d'euros seront consacrés à des opérations plus spécifiques : remise en état des installations de Mururoa – programme Telsite –, construction d'un bâtiment pour la sous-direction des pensions à La Rochelle, amélioration des conditions d'hébergement de la direction de la sécurité de défense au fort de Vanves, ou encore des installations liées aux besoins de la DGA, notamment dans ses centres d'essai.

La période sera consacrée au renforcement des capacités de maintenance et de maintien en condition des immeubles, auquel 3,2 milliards d'euros seront consacrés. Les investissements annuels de maintenance lourde seront portés à 0,5 milliard par an jusqu'en 2022, contre 0,25 milliard aujourd'hui, puis à 0,6 milliard par an à partir de 2023. Cet effort inédit devrait nous permettre, jusqu'en 2022, de corriger les situations les plus détériorées et de stabiliser la tendance à la dégradation de l'état du bâti à partir de 2023.

Enfin, 1,8 milliard d'euros seront consacrés au petit entretien locatif dans les bases de défense et aux loyers budgétaires. Ce sont là des crédits qui seront déconcentrés au niveau des bases de défense.

Des dispositions normatives ont été prévues en matière immobilière, notamment la possibilité de remettre aux Domaines des biens reconnus inutiles sans consultation de l'ensemble des ministères. Nous avons également prévu de céder des immeubles pollués en confiant à celui qui les achète la responsabilité de la dépollution, le coût de celle-ci étant déduit du prix d'achat.

L'effort en matière d'infrastructures est donc très important. Comme les effectifs du service d'infrastructures n'augmenteront pas, cela implique de revoir nos conditions de travail. Cela nous conduira notamment à poursuivre l'externalisation de la maintenance et d'une bonne partie de la maîtrise d'oeuvre.

L'innovation, dossier prioritaire pour la ministre, sera pilotée par la DGA. L'innovation n'est pas qu'industrielle ou technologique, elle est aussi administrative, et mes services s'y emploient, notamment par l'organisation à l'automne d'une semaine d'échanges appelée « innovation-défense ». Les chantiers de transformation du ministère sont étroitement liés aux chantiers d'Action publique 2022, notamment le chantier de transformation numérique animé par le secrétaire d'État au numérique. Nous investissons de façon importante dans les chantiers d'Action publique 2022, en particulier dans la partie des ressources humaines. Les deux expérimentations que nous avons demandées y contribueront.

Nous présentons aussi des propositions dans le chantier transverse « Gestion budgétaire et comptable » relatif à la gestion des finances publiques. Nous considérons que l'on pourrait diminuer le rôle des contrôleurs budgétaires dans les ministères et responsabiliser un peu plus les ministères dans leur gestion.

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