Je souhaiterais insister sur l'usine de retraitement de La Hague, dont une partie des installations présentent une usure prématurée. L'épaisseur de l'acier des évaporateurs diminue de façon drastique, ce qui pose un problème important de sécurité à la fin du processus de séparation des différents composants. Les combustibles usagés renfermant toute la radioactivité, une fuite sur ces évaporateurs serait catastrophique.
Par ailleurs, les quatre piscines, qui contiennent l'équivalent d'une centaine de coeurs de réacteurs usagés, soit plus de 1 000 tonnes de combustibles usagés, ne sont pas bunkerisées comme il le faudrait. Ce défaut de protection constitue un danger monstrueux.
Enfin, le stock de plutonium s'élève, aux dernières nouvelles, à 63 tonnes. Ce plutonium sert aujourd'hui à faire du MOx, un combustible à base d'uranium 238 et de plutonium, utilisé dans les réacteurs de 900 mégawatts. S'agissant des réacteurs les plus anciens, qui devraient fermer en premier, le plutonium devrait, à très brève échéance, ne plus être utilisé. D'autre part, les accords internationaux, que la France a signés, prévoient que le stock de plutonium ne doit plus augmenter, du fait des risques de prolifération. Précisons que 63 tonnes de plutonium peuvent permettre de fabriquer l'équivalent de 15 000 bombes de type Nagasaki !
Il faut savoir aussi que beaucoup de pays ont renoncé au retraitement. C'est le cas des États-Unis et de la plupart des pays européens, en dehors du Royaume-Uni. Le Japon a fait retraiter ses combustibles par la France pendant des années et ses stocks sont toujours présents sur notre territoire. Quant à la Chine, nous comptons y exporter cette technologie, ce qui est scandaleux.
Nous estimons qu'il faut arrêter l'activité de retraitement. Celle-ci revient à concentrer la radioactivité dans un très faible volume, ce qui la rend plus difficile encore à gérer. Le temps létal à proximité d'actinides mineurs vitrifiés est d'une heure environ. Le risque est moindre lorsqu'il s'agit de combustibles usagés.
En outre, le processus est très onéreux et exige beaucoup de transports : transport des combustibles usagés des centrales vers La Hague, puis transport du plutonium de La Hague vers Marcoule, où est fabriqué le MOx. J'imagine que vous avez tous vu le reportage montrant des camions de plutonium escortés de deux voitures de protection, sans autre forme de sécurité.
D'autre part, le fait que l'on souhaite lancer l'EPR à proximité de l'usine de La Hague avec une cuve présentant des défauts de fabrication est inquiétant. Le mélange est particulièrement dangereux et explosif… si un accident se produit à La Hague, comment fera-t-on pour protéger la centrale de Flamanville ? Réciproquement, si un incident grave survient à Flamanville et contamine l'environnement, comment fera-t-on pour continuer à contrôler le centre de La Hague ? Même si l'on arrête l'activité de retraitement, il faudra mettre en sûreté les 63 tonnes de plutonium, ce qui supposera de construire un atelier pour les remélanger avec des corps inertes, et faire en sorte que la masse critique – 7 kilos ! – ne puisse être atteinte accidentellement. Nous sommes dans une situation extrêmement dangereuse à La Hague. Il est urgent de sécuriser cela de façon pérenne.