Intervention de Charlotte Mijeon

Réunion du jeudi 15 février 2018 à 15h30
Commission d'enquête sur la sûreté et la sécurité des installations nucléaires

Charlotte Mijeon :

Au risque de vous décevoir, je dois vous rappeler que le réseau « Sortir du nucléaire » a pour objet de promouvoir la sortie du nucléaire, et non de cogérer le nucléaire. Si nous pouvons faire certaines préconisations pour la gestion des centrales, nous plaidons avant tout pour qu'elles soient fermées car, tant qu'elles seront en fonctionnement et quand bien même elles seraient gérées correctement, elles continueront à poser des problèmes, notamment celui de la pollution résultant de l'exploitation des mines d'uranium – qui se traduit, au Niger, par la contamination des nappes phréatiques fossiles – et celui de la production de déchets.

Je comprends bien votre question sur CIGEO, madame Cariou, et je ne conteste pas le sérieux des travaux de l'ASN et de l'IRSN, qui mettent en exergue de façon très détaillée tous les dysfonctionnements relevés. Ce que nous contestons, c'est le décalage entre le caractère très sérieux des problèmes constatés et une communication souvent très lisse, consistant en un discours politique selon lequel CIGEO est sur les rails et qu'il faut mener le projet à son terme, car de toute façon on n'a pas le choix de faire autrement.

Je le répète, notre rôle n'est pas de cogérer des déchets dont nous n'avons pas souhaité la production, et nous n'avons donc pas de préconisations à formuler sur l'exploitation des centrales. Cela dit, en ce qui concerne CIGEO, nous constatons que l'on est en train de se précipiter pour mener à bien ce projet, comme s'il n'existait pas d'autre solution. Or, l'urgence ne consiste pas à construire CIGEO, mais d'abord à prendre la décision d'arrêter de produire des déchets ingérables ; il conviendra ensuite de réunir les conditions d'un débat serein, auquel pourront contribuer des experts de tout bord, notamment des associations comme la nôtre, afin de déterminer la moins mauvaise option pour la gestion des déchets – je ne dis pas « la meilleure option », car aucune n'est satisfaisante.

En l'état actuel, les conditions ne sont pas réunies pour qu'ait lieu ce débat serein, dans la mesure où certaines informations sont soit gardées cachées – je pense notamment au coût de CIGEO, qui ne nous a été communiqué qu'à la suite de la demande que nous avons adressée à la Commission d'accès aux documents administratifs (CADA), et qui constitue un élément à verser aux débats – soit manipulées au moyen de divers artifices comptables par les producteurs de déchets afin que ce coût paraisse moins élevé.

Pour ce qui est du système de gestion des informations, je répète encore que nous ne souhaitons pas cogérer le nucléaire. Cela dit, les travailleurs du nucléaire estiment que leur propre compétence en la matière n'est pas reconnue et déplorent que la communication de l'information se fasse selon des procédures excessivement complexes qui ne permettent pas de résoudre les problèmes. Je vous invite à les auditionner, car ils ont beaucoup de choses à dire sur ce point. Par ailleurs, je vous renvoie à la plainte que nous avons déposée contre la centrale de Belleville-sur-Loire à la suite du placement de la centrale sous surveillance renforcée en septembre 2017 en raison de plusieurs problèmes, notamment l'état de corrosion avancé de certaines canalisations et des dégradations significatives d'équipements importants pour la sûreté, empêchant que ceux-ci fonctionnent normalement – cet état étant apparemment dû au fait que des demandes de travaux se perdent dans la nature.

Enfin, vous nous avez demandé, madame la rapporteure, quelles sont les évolutions possibles de l'ASN, et si elle ne devrait pas se charger aussi de la sécurité. Nous pensons qu'elle devrait effectivement s'en charger, comme le font d'autres autorités de sûreté à l'étranger, car il n'est pas normal qu'elle n'ait pas son mot à dire en la matière.

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