Intervention de Daniel Iracane

Réunion du jeudi 22 février 2018 à 14h00
Commission d'enquête sur la sûreté et la sécurité des installations nucléaires

Daniel Iracane, représentant de l'Agence pour l'énergie nucléaire :

Voilà le type de débats complexes qu'on peut avoir. Cela étant, l'un des critères de choix du site d'enfouissement est que ce site ne présente aucune valeur d'attrait. On n'ira pas stocker des déchets à un endroit où il y a des métaux rares, par exemple. Quand on commence à parler à l'horizon de mille ans, les choses deviennent compliquées. L'ingénieur conçoit son stockage pour que normalement, tout se passe bien si le système reste tel qu'il est. S'agissant du risque d'intrusion dans les mille ans, le maximum de radioactivité va passer après 300 ans. Il faudra continuer à éviter d'aller sur le site au-delà de cette durée mais il y a plusieurs échelles de temps dans l'évolution de la radioactivité. Nous travaillons sur la question de la mémoire mais dès lors qu'on a une échelle de temps de plusieurs centaines d'années, voire davantage, la discussion prend une dimension moins opérationnelle que lorsqu'on débat de l'entreposage.

En ce qui concerne la concentration, il y a effectivement plusieurs manières de procéder. Il est possible d'entreposer les déchets de manière décentralisée. En Amérique, les centrales stockent leurs propres combustibles à sec dans des conteneurs prévus à cet effet. À l'inverse, en France, les combustibles sont centralisés, notamment dans les piscines de La Hague. Là aussi, le temps est un paramètre déterminant. Dans le temps court, quelques décennies, un système décentralisé fonctionne aussi bien qu'un système centralisé. Les questions commencent à apparaître lorsqu'on se met dans une perspective de nombreuses décennies. Dans l'hypothèse où un opérateur ferait faillite ou arrêterait son réacteur, le statut des entreposages décentralisés poserait plus de problèmes. En concentrant l'entreposage, il est probablement plus facile de passer à un contrôle institutionnel des combustibles si nécessaire. À de grandes échelles de temps, il est difficile de concevoir la pérennité d'une industrie. La seule organisation susceptible de garantir une bonne maîtrise de l'héritage dans la durée est l'État. Je ne dis pas que l'entrepôt lui-même doive passer entre les mains de l'État mais qu'à grande échelle de temps, il est bien de pouvoir envisager, si ce n'est un contrôle institutionnel, du moins une plus grande responsabilité de l'État. Il vaut donc mieux concentrer l'entreposage. En revanche, dans un schéma industriel, vous satisfaites à tous les enjeux de sécurité et de sûreté si vous entreposez les déchets de manière décentralisée, à condition que l'opérateur ait tous les moyens de garantir cette performance. Tant qu'un réacteur fonctionne dans un site, l'entreposage décentralisé ne pose aucune difficulté car ce n'est pas une fonction très complexe par rapport à la fonction principale qu'est le réacteur.

Nous n'avons guère de préoccupations concernant la sûreté du transport : c'est une activité quotidienne qui fonctionne, certes extrêmement complexe, techniquement assurée par des opérateurs spécialisés, mais que nos pays membres n'ont pas identifiée comme problématique. Le transport est un enjeu majeur mais la sûreté de cette activité est assurée. La sécurité est une autre affaire mais ce n'est pas la mienne. Je ne peux donc approfondir ce sujet.

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