Intervention de Emmanuelle Fontaine-Domeizel

Réunion du mercredi 21 février 2018 à 16h15
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaEmmanuelle Fontaine-Domeizel :

Je tiens avant toute chose à remercier mes collègues de me faire confiance pour être référente de la commission sur la question du handicap. Avec mon collègue Bernard Perrut, nous devrons travailler de façon collégiale et constructive avec l'ensemble des parlementaires, et je sais pouvoir compter sur vous.

Depuis le mois de mai 2017, le secrétariat d'État chargé des personnes handicapées s'est donné une dimension plus large. Traditionnellement rattaché au ministère de la santé, il l'est désormais au Premier ministre. Symboliquement, cette situation est un marqueur fort de sa vocation interministérielle et de sa mission transversale. La loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées a invité la société à revoir profondément sa vision du handicap. Communément appelé loi « accessibilité », ce texte, auquel vous avez largement contribué, madame la secrétaire d'État, a représenté une révolution culturelle.

Révolution culturelle, car la loi a pour ambition de modifier notre perception du handicap, qu'elle nous invite à appréhender sous tous ses aspects et toutes ses dimensions. En somme, elle nous convoque à faire société, à ne pas marginaliser les uns ou les autres en raison d'un handicap physique ou mental. Révolution culturelle encore, car elle nous pousse à repenser nos cadres de vie : les établissements publics, les logements, les transports, les villes doivent être accessibles. Révolution culturelle enfin, car le législateur a créé des dispositifs visant expressément à lutter contre les discriminations volontaires vis-à-vis des personnes handicapées.

S'agissant du droit à l'école, l'éducation nationale est responsable à l'égard de tous ses enfants et, à ce titre, aucun d'entre eux ne peut se voir opposer un refus en raison de son handicap. En matière d'emploi, la loi renforce les sanctions et comporte des dispositions incitant les employeurs à devenir acteurs de l'inclusion par le travail. Elle a également créé les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH), ces structures qui visent à faciliter leurs démarches administratives.

Permettez-moi de citer les mots du Président de la République d'alors pour rappeler la volonté politique qui inspiré ce texte : « Une société se juge à l'attention qu'elle porte aux plus fragiles des siens, à sa capacité à conserver sa cohésion, à son aptitude à refuser l'exclusion d'où qu'elle vienne ».

Treize ans plus tard, où en sommes-nous ? L'ambition défendue par les législateurs qui nous ont précédés, madame la secrétaire d'État, n'a pas encore été suffisamment suivie d'effets. La loi avait fixé une feuille de route claire mais elle n'a pas été respectée. En 2015, tous les lieux publics devaient être accessibles ; ce n'est pas le cas. Je suis persuadée que nos prédécesseurs ont voté une grande loi, mais son inscription dans le réel, dans tous les champs de la société, tarde – et tarde trop. Nous avons le devoir d'accélérer les choses et nous vous savons totalement engagée, comme vos prédécesseurs, pour y parvenir.

De beaux exemples doivent nous guider pour atteindre les objectifs fixés par cette loi. Dans ma profession d'infirmière, j'ai suivi une jeune adulte devant choisir son parcours d'étude ; ce faisant, elle s'est orientée vers Grenoble. Bien que n'appartenant pas à son bassin de vie, cette ville s'est imposée comme un choix naturel pour elle car elle est accessible. C'est la preuve qu'une ville qui sait révolutionner son rapport au handicap peut devenir plus attractive. Ces villes-là sont aussi des victoires.

Outre la loi de 2005, une autre question doit guider notre action : treize ans après, que devons-nous faire de plus ? Je l'ai dit en préambule, nombreux sont les parlementaires engagés sur cette question et nous devons travailler collégialement. Je pense bien sûr aux travaux de mon collègue Adrien Taquet mais également à ceux de plusieurs collègues, dans le sillage desquels je m'inscris. Des exemples existent partout en France et doivent nous inspirer, comme la Mutualité française Provence-Alpes-Côte d'Azur qui rend possible l'accueil en crèche d'enfants en situation de handicap. La problématique du handicap concerne de nombreux domaines : l'école, l'enseignement supérieur, le travail, le sport amateur et de haut niveau, la culture, le numérique, les transports, le logement, l'accès aux droits ou encore l'emploi, pour n'en citer que quelques-uns.

Dans la continuité de la loi de 2005, nous devons contribuer à faire société et à intégrer le handicap dans ce qui est constitutif de notre pacte social. Il est de notre devoir, à chaque fois que ce sera nécessaire, d'enrichir les lois dont nous débattrons. Je pense à un chantier qui occupera bientôt notre commission à plein temps, la formation professionnelle : elle pourrait être un formidable outil d'insertion, mais pas seulement. Comment justifier que des personnes en situation de handicap, ayant connu tout au long de leur scolarité un parcours de vie semblable à ce que peuvent connaître les autres enfants puissent, du jour au lendemain, lorsqu'ils entrent dans le monde adulte, se trouver empêchés de construire la vie à laquelle ils aspirent ? Pour faciliter leur intégration professionnelle, il est important de se donner les moyens d'évaluer les compétences, les savoir-faire, les capacités et les forces des personnes en situation de handicap. Dès demain, le législateur et l'exécutif devront oeuvrer ensemble dans ce sens.

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