Intervention de Sophie Cluzel

Réunion du mercredi 21 février 2018 à 16h15
Commission des affaires sociales

Sophie Cluzel, secrétaire d'État chargée des personnes handicapées :

J'ai ouvert une concertation, le 15 février, en présence de quatre ministres, des représentants des organisations syndicales et patronales, et des représentants du CNCPH, organe représentatif qu'a créé le législateur et où siègent 116 associations, personnes qualifiées, etc.

J'ai demandé à son bureau de désigner des représentants à la concertation relative à la rénovation de l'emploi des personnes handicapées. Les associations auraient voulu y participer en leur nom mais, le cadre légal doit être respecté. J'ai néanmoins insisté pour que le nombre de représentants du CNCPH soit doublé. En outre, les associations seront sollicitées dans le cadre de la commission Emploi du CNCPH. Enfin, le fait d'être représentées par le CNCPH, organe officiel, leur garantit une forme de participation à la concertation.

S'agissant des jeunes et de la formation, vous avez raison, Monsieur Dharréville, nous devons travailler pour éviter la rupture du parcours de ces jeunes. L'Éducation nationale l'a fort bien fait avec l'attestation des compétences lorsque certaines capacités leur font défaut pour aller jusqu'au diplôme. L'emploi accompagné est un premier enjeu en la matière. En effet, madame Biémouret, les jeunes handicapés qui ont appris avec les autres veulent ensuite travailler avec eux, grâce à l'emploi accompagné.

Outre les connaissances théoriques, l'apprentissage leur apporte beaucoup en matière de savoir-être et de savoir-faire. C'est pourquoi, lors de la concertation relative à la réforme de l'apprentissage, nous avons insisté pour obtenir des référents handicap dans les centres de formation des apprentis (CFA), susceptibles de faire l'interface entre l'entreprise et les besoins spécifiques des jeunes handicapés. Tout est également possible pour allonger la durée de l'apprentissage.

Nous allons également développer des dispositifs de job-coach pour travailler, en amont et en aval de l'apprentissage, les qualités inhérentes au savoir-être et au savoir-faire. Des chartes d'accueil « handicap » seront aussi établies dans les CFA. Enfin, les dispositifs d'accompagnement passerelle dans l'emploi, qui existent dans certaines régions, constituent un vrai sas : voilà ce qu'il nous faut en construire partout. La problématique majeure est en effet de donner du temps au temps, de donner du temps à ces jeunes handicapés qui ont pu prendre du retard au cours de leurs études, des jeunes valides pouvant d'ailleurs aussi avoir besoin de plus de temps.

Comment piloter ces dispositifs en région ? Dans la mouvance de la réponse accompagnée pour tous au sein des MDPH, tous les acteurs d'un territoire mutualisant leurs moyens pour trouver des synergies, je ferai le lien avec l'expérimentation qui sera pilotée par Pôle Emploi en avril 2018, pour voir comment améliorer les qualifications, en accompagnant tant la personne handicapée que l'employeur. En une quinzaine de lieux, seront mis à plat tous les dispositifs existants, qui foisonnent et se superposent : centres de reconversion professionnelle ; services d'accompagnement associatif qui font déjà beaucoup pour l'emploi des personnes handicapées ; services publics de l'emploi de droit commun : Cap Emploi et Sameth, qui ont fusionné au 1er janvier… En la matière, les référents professionnels des MDPH constituent des pivots.

Cela m'amène à la question sur l'emploi accompagné. L'expérimentation démarre et j'en évaluerai finement les résultats en 2018. Car nous devons en tirer des enseignements sur la qualification de ces accompagnateurs : qu'on les appelle job-coaches, chargés d'intégration professionnelle ou chargés d'insertion professionnelle, il peut s'agir d'ergonomes, de psychologues du travail, d'éducateurs. Or, il n'y a pas aujourd'hui de « diplôme d'accompagnant ».

Nous nous appuierons sur l'évaluation pour déployer un dispositif. Dans le budget, 7,5 millions d'euros sont encore disponibles : 8 millions proviennent des ARS, 2 millions de l'AGEFIPH et 500 000 euros du FIPHFP. Nous verrons si nous devons faire essaimer un dispositif ou faire monter en qualification les acteurs déjà présents sur le terrain.

Vous m'avez également demandé comment piloter et coordonner ? Le programme régional d'insertion des travailleurs handicapés devra désormais comporter un axe consacré aux jeunes, en y associant les Comités régionaux de l'emploi, de la formation et de l'orientation professionnelles (Crefop), acteurs publics qui peuvent être mis au service du parcours.

Le premier comité de pilotage de l'emploi accompagné se tiendra le 5 mars ; nous vous rendrons compte régulièrement de l'avancement des travaux. Rappelons que ce dispositif est issu d'une réflexion des associations, qui se sont mobilisées pour concevoir la sortie des adultes handicapés des ESAT vers le milieu ordinaire. Je m'appuie sur leur expertise, puisque ce sont elles qui ont répondu aux appels à projets.

Jusqu'à présent, nous avons concentré nos efforts sur la personne handicapée. Désormais, nous les concentrons sur son environnement, un environnement qui lui permette d'accéder à l'emploi et de s'y maintenir.

Monsieur Perrut, je répondrai volontiers par écrit à celles de vos demandes qui ne concernent pas la question de l'emploi, à laquelle nous nous consacrons aujourd'hui.

Quant à la transformation de l'offre, elle est aussi un levier. Dans la réponse accompagnée pour tous qui part des MDPH, ou des programmes régionaux d'insertion des travailleurs handicapés, la co-construction permet de remettre à plat les différents services. Grâce aux passerelles créées, nous pourrons travailler au parcours de la personne handicapée.

L'« allégement » des déclarations d'emploi est en réalité une remise à plat des 85 critères et items qui composent aujourd'hui une déclaration d'emploi d'un travailleur handicapé (DETH). Tout ceci nous a fait perdre le fil de la politique d'incitation à l'emploi des personnes handicapées, sur la base de quotas. L'entreprise doit savoir comment elle peut remplir son obligation, ou bien la minorer grâce à des actions auprès des personnes handicapées, telles que des achats auprès des ESAT ou d'entreprises adaptées. Nous devons opérer un recentrage de ces dispositifs.

Nous voulons en effet vraiment développer l'emploi direct. La mécanique des 85 items est donc étudiée par les partenaires, c'est un travail colossal, qui nous fait découvrir chaque jour de nouveaux aspects : remplir une DETH peut demander six mois et les entreprises sollicitent même des sous-traitants pour cela. Ce formulaire nous a fait perdre le fil conducteur de la politique qu'il est supposé servir. Sa simplification rendra un vrai service aux entreprises.

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