Intervention de Corinne Vignon

Séance en hémicycle du jeudi 8 mars 2018 à 15h00
Reconnaissance sociale des aidants — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCorinne Vignon :

En effet, l'un des grands défis actuels de notre pays est le vieillissement de notre société. C'est l'un des sujets majeurs auquel nous devons apporter des réponses concrètes, afin de mieux prendre en compte les personnes qui donnent de leur temps et de leur énergie pour aider les membres de leur famille les plus vulnérables. Notre population étant vieillissante, il nous faudra former, soutenir et valoriser les aidants.

Aujourd'hui, plus de 8 millions de nos concitoyens sont des proches aidants. Ils font un travail remarquable et considérable au quotidien, en apportant une aide régulière à une personne âgée dépendante, à un enfant ou un adulte en situation de handicap.

Il faut souligner que des avancées ont déjà été réalisées par le passé. La loi relative à l'adaptation de la société au vieillissement a notamment permis une meilleure reconnaissance des proches aidants, avec un droit au répit permettant aux proches aidants de s'octroyer un peu de repos ou de dégager du temps et une aide financière ponctuelle en cas d'hospitalisation de ce dernier.

Dernièrement, nous avons également adopté une proposition de loi qui autorise le don des jours de repos non pris aux aidants familiaux. Mais c'est encore trop peu. On le sait, accompagner un proche en perte d'autonomie est une tâche lourde qui peut conduire le proche aidant à une situation d'épuisement physique et psychologique.

Aussi, monsieur le rapporteur, vous préconisez de créer un droit à indemnisation du congé du proche aidant. Si, tout comme vous, je suis convaincue qu'il faut aller beaucoup plus loin, je ne suis pas persuadée que le dispositif proposé soit le plus approprié. Même si votre intention est totalement louable, il manque à cette proposition de loi une évaluation précise de son financement. De plus, ce texte ne répond que partiellement aux cas particuliers qui, vous le savez, sont aussi nombreux que les foyers confrontés à cette situation.

Ayant eu l'occasion d'échanger avec de nombreux aidants familiaux d'une tranche d'âge médiane, j'ai pu constater qu'une grande partie d'entre eux étaient dans l'obligation de mettre fin à leur activité professionnelle à temps plein et d'opter pour un mi-temps, beaucoup plus difficile à trouver, moins rémunérateur et souvent nettement moins qualifié.

J'ai en tête le cas d'un père ingénieur de 42 ans, qui, pour prendre soin de son fils de 8 ans atteint d'une pathologie lourde, a fait le choix – c'est tout à son honneur – de sacrifier sa carrière et de ne travailler qu'à mi-temps. Mais le métier d'ingénieur étant incompatible avec un poste à temps partiel, ce papa a décidé de démissionner et a fait le choix d'une reconversion, en occupant dix heures par semaine un poste de maître-nageur. Cet homme de coeur n'a plus aujourd'hui ni le même salaire ni le même épanouissement professionnel. Demain, il n'aura pas la même retraite. Ce dernier point, essentiel à mes yeux, fera l'objet d'une réflexion approfondie, que nous mènerons prochainement.

Il ressort de mes entretiens qu'il est absolument nécessaire que les aidants puissent conserver un lien social dans le cadre d'un travail aménagé et, si possible, en gardant leur champ de compétences. Sans emploi, les aidants, trop souvent en tête à tête avec leur proche dépendant, se coupent involontairement des autres. Le monde médical constitue souvent leur seul lien. Même avec beaucoup d'amour et d'abnégation, un aidant a besoin d'un sas de décompression, d'un tiers qui prenne le relais de temps à autre, pour pouvoir alléger sa souffrance psychologique et physique.

Mais l'embauche d'une tierce personne implique souvent d'avoir des revenus confortables. Le développement du télétravail peut être une solution. Ne faudrait-il pas mettre à la disposition des aidants un registre d'organismes qui proposent un panel d'activités avec les profils professionnels recherchés ? Les aidants ne pourraient-ils pas être prioritaires pour l'obtention de certains postes ?

Aujourd'hui, nous sommes tous conscients des réelles difficultés qu'éprouvent les personnes aidantes pour trouver une information exhaustive sur les solutions matérielles et humaines à leur disposition.

Aussi, le Gouvernement, les employeurs, les syndicats se sont engagés depuis plusieurs mois à étudier toutes les solutions pour favoriser leur accompagnement. Le rôle fondamental accompli par les aidants est bien compris par la majorité.

Notre objectif sera, entre autres, de favoriser les moyens d'articuler vie professionnelle et vie d'aidant, et de trouver un juste équilibre pour assurer l'épanouissement et le bien-être de ces 8 millions de personnes dévouées et aimantes.

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