C'est la question que nous mettons en débat à travers ce texte, dont l'ambition reste certes modeste, car il ne se penche que sur le seul enjeu du transport scolaire, à l'exclusion, par exemple, de l'épineuse question de la restauration scolaire, à l'origine de situations proprement scandaleuses. En effet, si la restauration scolaire est reconnue comme un service public à vocation sociale, combien d'enfants se trouvent encore aujourd'hui dans l'impossibilité d'y avoir accès pour des raisons financières, à cause d'un handicap ou encore de troubles alimentaires ? Ces situations ne sont pas acceptables et mériteraient, elles aussi, l'intervention du législateur.
S'agissant des transports, il paraît difficile de justifier qu'en fonction des territoires où ils résident, certains enfants bénéficient de la gratuité ou bien, au contraire, ne peuvent rejoindre l'école que moyennant le versement par leur famille de 200 ou 300 euros par an. Et je ne parle même pas des critères ouvrant droit au transport scolaire, qui ne sont pas harmonisés, loin de là : 85 % des départements ont ainsi établi un seuil de 3 kilomètres entre le domicile et l'établissement pour ouvrir droit au transport scolaire ; 70 % des autorités organisatrices de la mobilité fixent à trois ans l'âge minimum des publics pris en charge, mais près d'un quart fixe ce seuil à six ans et 10 % à partir de onze ans, c'est-à-dire l'entrée des élèves au collège.
En commission, la majorité s'est flattée de conduire une politique de différenciation territoriale, de responsabiliser les acteurs locaux et de leur apporter des éléments de souplesse. Une telle approche est cependant contraire aux principes républicains les plus élémentaires, comme l'égalité d'accès aux services publics. Si nous sommes tous également attachés à l'égalité d'accès à l'éducation, notre responsabilité de législateur est précisément de nous assurer d'une égalité de traitement des élèves sur l'ensemble du territoire. C'est une question de justice ! C'est la raison pour laquelle la gratuité, dont nous soutenons le principe dans cette proposition de loi, est plébiscitée par les parents d'élèves.
C'est également, je tiens à le souligner, une question d'aménagement du territoire. Dans le territoire rural qui est le mien, des établissements scolaires seraient à terme condamnés à fermer si nous ne disposions de l'outil de la gratuité car, sans gratuité des transports scolaires, beaucoup de parents seraient tentés de scolariser leurs enfants à côté de leur lieu de travail, souvent en ville, contribuant ainsi à la dévitalisation des territoires ruraux.