Intervention de Pierre-Franck Chevet

Réunion du jeudi 22 février 2018 à 17h00
Commission d'enquête sur la sûreté et la sécurité des installations nucléaires

Pierre-Franck Chevet, président de l'Autorité de sûreté nucléaire :

Le chiffre que vous donnez à propos de la cuve de l'EPR de Flamanville est tout à fait exact, mais, ici, il s'agit des codes industriels qui donnent des valeurs minimales pour un certain nombre de paramètres. Si elles sont respectées, c'est bon, il n'est pas besoin d'une autre démonstration. En revanche, les codes industriels comme la réglementation prévoient que si les limites ne sont pas respectées, alors il faut des démonstrations plus sophistiquées au plan mécanique, au plan chimique. C'est la voie qui a été retenue par Areva et EDF, le but étant de montrer par des démonstrations plus élaborées que, en tout état de cause, l'objectif de sûreté est atteint et que cela ne rompt pas, quelles que soient les circonstances. C'est cette démonstration qui fut plus compliquée. Ils ont dû faire 1 500 essais supplémentaires, par rapport à ce qui existe dans la littérature, pour arriver à documenter et démontrer, au bout de deux ans de travail et plusieurs milliers d'essais, que cela tenait. Naturellement, cela exigeait un effort technique, scientifique supplémentaire.

Pourquoi une différence entre le couvercle et le fond de cuve ? Les deux zones se sont finalement révélées bonnes à peu près dans les mêmes conditions, avec une différence de fond. Le principe, sur ces matériaux, c'est d'avoir des marges. Elles existaient effectivement mais étaient réduites par rapport à une cuve « normale », qui ne présente pas les défauts constatés. Les marges servent à faire face à ce qui n'a pas été prévu à la conception. S'il arrive quelque chose – par définition, on ne sait quoi ; sinon, on l'intégrerait dans les calculs – ces marges servent à nous donner du temps, par exemple à la suite de l'apparition d'un phénomène de vieillissement. Or le fond de la cuve et la cuve elle-même sont parfaitement contrôlables, par la machine que j'évoquerai ensuite. C'est une surface extrêmement simple, à la géométrie très simple ; c'est contrôlable, la technique existe. Il en va autrement du couvercle. Il y a les mêmes marges, mais, à l'heure actuelle, on ne peut pas le contrôler. Il n'existe pas de technologie qui permette de contrôler le couvercle et de détecter précocement un vieillissement. Pour le fond de cuve, vous mettez donc en oeuvre les contrôles en service qui permettraient, éventuellement, s'il se passait quelque chose d'utiliser la marge. En revanche, pour le reste, vous changez le couvercle. Nous l'aurions laissé jusqu'à l'année 2024, ce qui est cohérent avec notre vision des enjeux de sûreté : nous ne voyons pas de problème de sûreté à leur donner ce temps pour ce changement, mais ce changement s'impose.

Quant aux « défauts belges », la situation est presque l'inverse de celle que vous décrivez. Ils ont été détectés avec les techniques de contrôle en service françaises. C'est le jour où les Belges ont passé la machine de contrôle française, que nous utilisons pratiquement depuis l'origine sur le parc actuel, qu'ils ont vu ces défauts. Néanmoins, ayant vu les défauts belges qui ne sont effectivement pas tout à fait au même endroit, nous avons fait des re-vérifications, avons relu les contrôles, etc., et nous n'avons pas trouvé de cas qui s'apparente au cas belge.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.