Aujourd'hui, le site Cigéo n'est pas autorisé, puisque son dossier est en cours d'instruction. Au demeurant, cette situation n'est pas spécifique à notre pays : les Suédois et les Finlandais travaillent, eux aussi, sur des projets de stockage géologique. Les Américains avaient commencé à travailler sur le site de Yucca Mountain, au Nevada, mais ils ont mis fin à leurs études.
Pour ce qui est du concept des piscines centralisées, le combustible issu d'un réacteur nucléaire après avoir été utilisé passe généralement de deux à quatre ans en piscine de réacteur, avant de rejoindre le site de La Hague, où il fait l'objet d'un retraitement durant une dizaine d'années, afin d'en extraire le plutonium entrant dans la composition des combustibles MOx, qui alimentent les réacteurs de 900 mégawatts. Quand on examine l'équilibre global, on s'aperçoit que, tous les ans, les piscines de La Hague reçoivent une petite centaine de tonnes de combustible supplémentaire, ce qui, à terme, ne peut mener qu'à la saturation de ces piscines. C'est ce qui avait été indiqué dans un dossier que constitue EDF régulièrement à l'intention de l'ASN, appelé dossier « cycle ». Dans ce document, EDF analyse l'ensemble du cycle du combustible nucléaire, afin de vérifier qu'il ne comprend pas d'impasses ou de points auxquels il faudrait apporter des modifications.
L'analyse du dossier « cycle » conduit à vérifier que la capacité nécessaire à l'entreposage de l'ensemble des déchets produits par l'industrie nucléaire est disponible. Le sujet a été clairement identifié et, aujourd'hui, les évaluations conduisent à estimer que le risque de saturation n'apparaît qu'à l'échéance d'une dizaine d'années, c'est-à-dire vers 2030. Dans le cadre du plan national de gestion des matières et des déchets radioactifs (PNGMDR) 2016-2018, EDF, à qui il avait été demandé de proposer des dispositions visant à définir de nouvelles capacités d'entreposage, a déposé un dossier d'options de sûreté, sur lequel nous avons travaillé. Il s'agit d'une piscine qui aura une capacité légèrement inférieure à celles de La Hague. Chargée de l'expertise de sûreté, l'IRSN va être amenée à vérifier la protection contre les aléas et contre les agressions – notamment la chute d'avion, dont le risque est plus spécifiquement pris en compte depuis les attentats du 11 septembre 2001. Par ailleurs, du fait que l'installation est censée durer cent ans, elle nécessite une analyse particulière de la prise en compte du risque sismique.
L'autre enjeu important pour la sûreté d'une piscine est la maîtrise du niveau d'eau. L'IRSN sera donc particulièrement attentive à la question des tuyauteries qui pourraient être connectées par le bas de la piscine – nous préférons qu'elles soient connectées par le haut –, ainsi qu'à la capacité d'inspecter le liner pour vérifier l'absence de fuites.
Enfin, la durée exceptionnelle de l'installation rend également nécessaire une surveillance spécifique des assemblages. L'ASN doit nous saisir prochainement sur ce sujet. Nous souhaitons être en mesure d'engager un dialogue avec les experts non institutionnels.
Pour ce qui est des délais, nous avons été saisis par l'ASN sur le dossier d'options de sûreté, et je prévois de rendre un avis technique en décembre 2018. Je ne dispose, en revanche, d'aucune visibilité sur le planning industriel, qui relève de la responsabilité exclusive d'EDF.