Intervention de Josy Poueyto

Réunion du mercredi 14 mars 2018 à 9h30
Commission de la défense nationale et des forces armées

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJosy Poueyto :

Si vous me le permettez, je vais vous présenter les amendements DN327, DN335 et DN330.

L'égal accès aux mandats électoraux et fonctions électives à tous les citoyens est inscrit dans notre Constitution.

Tel que rédigé aujourd'hui, l'article 18 de la LPM est une avancée dans les droits politiques des militaires. Mais, il apparaît nécessaire d'aller encore plus loin en faveur d'un net progrès dans l'exercice de la démocratie locale. Pour moi, un militaire – trop longtemps maintenu dans un état passif de subordonné dans l'histoire de notre pays – ne peut pas être un citoyen de seconde catégorie. Qui remet aujourd'hui en cause leur droit de vote, obtenu en 1945 après bien des débats ? Dans un cadre clairement défini, un militaire en activité doit être en mesure, au XXIe siècle, de siéger dans un conseil municipal ou un conseil communautaire, dans une commune où il vit, paie ses impôts locaux et participe parfois à la vie de la cité. À ce niveau, c'est un citoyen comme un autre.

Par conséquent, l'amendement DN327 vise à étendre ce droit politique aux officiers supérieurs et généraux. Pourquoi la haute hiérarchie ? Parce qu'il y aurait une forme de discrimination à l'écarter. Comment le justifier si l'on s'en tient à la règle d'égal accès aux mandats électoraux ? Comment cette différence de traitement serait-elle perçue et vécue au sein de nos armées, entre ceux qui auraient accès à un nouveau droit et les autres, placés en situation de commandement ? Je le rappelle, l'enjeu ne porte que sur la fonction de conseiller municipal, personne ne parle d'une élection présidentielle.

Certains m'objectent qu'il faudrait protéger la carrière des militaires et ne pas toucher à l'article 18. Pourquoi voudrions-nous protéger les militaires contre eux-mêmes ? Siéger dans un conseil municipal est un engagement. À chacun de prendre ses responsabilités. D'autres professions sont aussi concernées par les conséquences d'une élection au sein d'une majorité ou d'une opposition municipale. Je rappelle que l'adhésion à un parti politique est loin d'être nécessaire pour rejoindre une tête de liste. On ne peut pas non plus opposer cet argument, d'autant que l'interdiction de rejoindre un parti politique est maintenue.

Pour conclure, je veux simplement insister sur le beau symbole que représente l'élargissement du droit politique des militaires, défendu par un certain nombre d'entre nous. Ce progrès reste limité et surtout encadré. À la lumière de tous les éléments que je viens de développer, nous pouvons estimer que rien ne menace la protection légitime de la liberté de choix de l'électeur et de l'indépendance de l'élu à l'égard de risques de confusion ou de conflit d'intérêts. Amender l'article 18 dans les termes que je vous propose, c'est faire un geste de confiance et de respect à l'égard de ceux qui s'engagent sans compter pour notre pays. Leur sens de l'intérêt général sera un atout pour nos communes.

L'amendement DN330 ajoute le mandat de conseiller communautaire au mandat de conseiller municipal et repousse l'obstacle des communes de moins de 3 500 habitants. En effet, cet amendement nous invite à ne pas fixer de plafond de population.

Encore une fois, il faut relativiser la portée de cet amendement, dont le champ d'application reste local. Si le texte n'était pas amendé, on pourrait identifier une autre forme de discrimination dans l'obligation de passer par une procédure de détachement pour exercer un mandat électif au sein d'un conseil municipal dans une commune de plus de 3 500 habitants. D'ailleurs, aucun militaire ne s'y engagerait. Le détachement, en effet, met sa carrière entre parenthèses et lui interdit de toucher sa solde. On peut l'entendre quand il s'agit de devenir conseiller régional ou député. Mais les indemnités d'un mandat de conseiller municipal ne sont pas élevées : autour de 200 euros dans les communes de moins de 100 000 habitants. Pour siéger, le militaire doit par conséquent rester en activité, sans mettre en péril l'obligation de disponibilité à laquelle il est tenu dans le cadre de ses missions, bien évidemment. Les élus locaux contraints par des déplacements professionnels sont nombreux.

Si un certain nombre d'entre nous sont tentés d'empêcher un militaire de devenir grand électeur dans les communes de plus de 9 000 habitants, je rappelle que les élus locaux ne sont pas obligatoirement appelés, dans leur ensemble, à désigner les sénateurs. Je suis élue locale depuis plus de trente ans, bon nombre de mes collègues n'ont pas été grands électeurs.

Quant au militaire amené à quitter définitivement la commune où il est élu et où il avait fixé son domicile principal, il aura toujours la possibilité, comme c'est le cas pour d'autres professions, de démissionner de son mandat. Depuis 2013, cela ne provoque plus l'organisation d'une élection partielle dans les communes de plus de 1 000 habitants ; en revanche, cela en provoque une dans celles de moins de 1 000 habitants.

Je vous invite à soutenir cet amendement, car la situation du militaire-citoyen n'est pas concernée par la notion d'« inéligibilité relative », propre, par exemple, aux préfets et aux magistrats. Ce n'est pas non plus un gendarme ou un policier. S'il est impératif que les armées restent neutres, doit-on considérer qu'un militaire, à titre individuel, comme citoyen, comme contribuable, comme conseiller municipal, qui ne peut par conséquent déployer dans ses fonctions ni pouvoir de coercition ni monopole de violence légitime, puisse être encore longtemps exclu d'un droit fondamental dans une démocratie moderne ? Les réservistes, eux, peuvent être élus au sein d'un conseil municipal. Tout comme les ressortissants de l'Union européenne, sans aucune restriction.

L'amendement DN335 ne permet pas au militaire d'exercer la fonction de président et vice-président d'établissement public de coopération intercommunale et vient en complément de l'incompatibilité avec les fonctions de maire et adjoint au maire. Je ne développe pas davantage, vous avez compris la logique : je vous propose de faire de nos militaires des citoyens à part entière.

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