Madame la ministre, le groupe du Mouvement Démocrate et apparentés soutient ce projet de loi de programmation militaire, qui consacre la remontée de l'effort de défense de la France après deux quinquennats de déflation. La LPM tire pleinement les conclusions d'un contexte stratégique instable et incertain, décrit dans la Revue stratégique d'octobre dernier. Pour faire face à des menaces plus intenses et plus diverses, ce texte donne à nos armées les moyens de conserver un modèle cohérent et équilibré. Il permet à la France d'assumer ses ambitions dans le monde, de garantir son autonomie stratégique et de renforcer l'Europe de la défense.
Nous soutenons cette LPM tout en exprimant la sensibilité de notre famille politique, c'est-à-dire en rappelant notamment la vision stratégique de la France et son modèle d'armée. Nous appelons par ailleurs à un contrôle parlementaire renforcé pour assurer l'exécution effective de cette loi de programmation garante de ses ambitions. Nous serons attentifs à ce que ni le choix du maintien des deux composantes de la dissuasion nucléaire, ni les efforts en matière d'innovation, ni la mise en place du service national universel, ne se fassent au détriment des capacités opérationnelles et des conditions d'exercice des soldats.
Sur l'état de la menace, nous sommes satisfaits par cette loi de programmation militaire, qui résulte d'une analyse cohérente de l'évolution du contexte stratégique. Elle répond au terrorisme djihadiste, qui reste la menace prioritaire, mais pas exclusive. Nous entrons dans une ère d'instabilité, avec le dérèglement de l'ordre mondial, l'affaiblissement des institutions internationales, l'affirmation de nouvelles puissances et les menaces étendues à l'espace exo-atmosphérique et au cyberespace. La LPM s'inscrit dans ce contexte stratégique instable, et définit les ambitions et les moyens pour y répondre.
En appui de cette logique, les députés MODEM et apparentés proposent à la commission des amendements pour compléter la vision stratégique de la France. Nous souhaitons notamment inscrire dans le texte la prise en compte des stratégies intégrales de certaines puissances, articulant au-delà des aspects militaires les domaines économique, technologique et culturel. Nous souhaitons également porter la réflexion sur la menace renouvelée des armes nucléaires tactiques. Enfin, nous demandons que le Gouvernement précise sa stratégie en réponse à l'arsenalisation et la densification de l'espace exo-atmosphérique.
Pour répondre aux défis actuels et face à l'évolution du contexte stratégique, la loi de programmation militaire entérine un modèle d'armée cohérent et équilibré, avec des choix ambitieux que notre groupe approuve. Notre modèle de défense reste basé sur une dissuasion nucléaire crédible avec ses deux composantes, océanique et aéroportée. Notre autonomie est garantie par des moyens donnés en priorité aux renseignements et à la cyberdéfense par le renouvellement des capacités opérationnelles charnières et par le soutien à notre base industrielle et technologique de défense. Le groupe MODEM et apparentés se réjouit par ailleurs des ambitions européennes fortes portées par le texte, que ce soit en matière industrielle ou opérationnelle.
Dans le but d'appuyer ces orientations, nous proposons d'aller plus loin dans le comblement des lacunes capacitaires et le développement de la coopération industrielle européenne. Nous portons des amendements de soutien à la DGA en matière de ressources humaines, ainsi qu'un amendement visant à rappeler l'importance des matériels robustes et rustiques, souvent moins technologiques, mais répondant aux besoins de nos soldats sur le terrain. L'ambition que représente la LPM exige des moyens financiers et humains. Sur ce plan, nous soutenons l'effort de l'exécutif, qui propose un projet lucide et sincère.
Il est lucide en ce qu'il donne la priorité au coeur de nos armées, à la condition militaire, au renforcement des capacités opérationnelles et à la montée en puissance des effectifs. Il est également lucide sur l'Europe, qui est notre nouvelle dimension. Notre groupe se réjouit notamment que les programmes lancés entre 2019 et 2025 soient prioritairement conçus dans une voie de coopération européenne.
Par ailleurs, le groupe MODEM et apparentés salue la sincérisation du budget de la défense, qui se traduit notamment par l'utilisation réaliste de la provision dédiée au financement des OPEX et des missions intérieures, ainsi que par le recours exclusif à des crédits budgétaires, et non à d'hypothétiques recettes exceptionnelles, comme on a pu le voir par le passé.
Si la programmation est ambitieuse, elle nécessite de faire preuve de vigilance en termes de trajectoire budgétaire. Premièrement, la hausse de l'effort prévue en 2023 pose à l'évidence question. Nous saluons l'inscription dans ce projet de loi d'une actualisation en 2021, soit avant la fin du quinquennat, ce qui constitue une garantie politique. Néanmoins, nous serons particulièrement attentifs à ce que cette actualisation n'obère pas les ambitions initiales. Il sera par ailleurs nécessaire de précéder cette actualisation d'une réflexion sur l'évolution du contexte stratégique.
Sur le nucléaire, le renouvellement des deux composantes de la dissuasion, nécessaire à sa crédibilité, ne doit pas entraîner un effet d'éviction sur les programmes et les équipements conventionnels. Dans la même logique, les investissements qui développent les technologies de demain et qui participent au dynamisme de la base industrielle et technologique de défense (BITD) ne doivent pas se faire au détriment des capacités opérationnelles des effectifs ou des équipements rustiques, qui constituent une composante essentielle de la solidarité et de l'efficience de nos armées.
Le groupe MODEM sera également vigilant quant à la mise en place du SNU. En effet, s'il est normal que les militaires soient en support de ce service, il est exclu que les armées en fassent les frais au moment même où cette remontée en puissance s'effectue.
Enfin, plus généralement, le groupe MODEM et apparentés restera particulièrement attentif quant au contrôle parlementaire de l'exécution de la LPM. Dans ce cadre, nous avons déposé plusieurs amendements visant à renforcer les dispositions de contrôle inclus dans le texte. Notre groupe se félicite, enfin, de l'accent mis sur la condition militaire, qui s'est dégradée ces dernières années sous l'effet des engagements croissants et des coupes budgétaires. Le projet de loi vise en effet à améliorer les conditions de vie et d'exercice du métier de soldat. Cela doit permettre aux armées d'exercer de manière durable et soutenable leurs nombreuses missions. Par ailleurs, alors que, dans ces conditions, le ministère des armées peine à fidéliser les personnels, ce principe participe à la dynamisation des ressources humaines.
Nous saluons aussi l'ouverture de l'accès des militaires aux fonctions électives locales. Il est en effet indispensable qu'ils puissent participer pleinement à la démocratie et au débat public. Pour compléter le dispositif prévu sur ce dernier point dans le projet de LPM, notre groupe propose d'étendre cette extension des droits politiques des militaires aux fonctions de conseiller communautaire. Très attachés au renforcement des liens entre la Nation et son armée, nous proposons également des amendements sur la promotion des réserves et du service militaire volontaire.
En conclusion, notre groupe politique soutient avec enthousiasme ce texte, car c'est une LPM qui s'inscrit avec justesse dans l'évolution du contexte international et l'émergence de nouvelles menaces. C'est une LPM qui définit un modèle d'armée cohérent et équilibré pour répondre à ces menaces et qui permet notre autonomie stratégique, une LPM qui affirme la nécessité de la coopération européenne et contribue à l'émergence d'une véritable Europe de la défense, une LPM lucide et sincère, qui donne des moyens à nos armées, à la hauteur des ambitions de la France, une LPM à hauteur d'homme, enfin, qui met le soldat au coeur de ses ambitions. En somme, nous soutenons cette LPM de redressement et appuierons la LPM de renouveau.