Intervention de Dominique Minière

Réunion du jeudi 15 mars 2018 à 10h15
Commission d'enquête sur la sûreté et la sécurité des installations nucléaires

Dominique Minière, directeur du parc nucléaire et thermique d'EDF :

Le coût restant à engager est, de mon point de vue et du point de vue comptable également d'ailleurs, le plus simple à comprendre et à mesurer : il recouvre les dépenses d'exploitation, les dépenses d'investissement et les dépenses de combustible. Dans le cadre d'une politique énergétique ou de la politique d'investissement d'une entreprise comme la nôtre, on compare des scénarios : faut-il poursuivre l'exploitation, auquel cas on s'expose à ces coûts restant à engager, ou faut-il la cesser, et donc remplacer les équipements de production par d'autres équipements ? C'est donc bien aux coûts d'équipements neufs qu'il faut comparer les coûts restant à engager dans le cas d'une prolongation. Encore une fois, ces coûts sont en moyenne de 32 euros par mégawattheure à l'échelle du parc ; il n'y a pas d'alternative moins chère, et ces coûts sont en général inférieurs aux prix de marché, qui tournent plutôt autour de 40 euros le mégawattheure.

Ensuite, une fois que vous avez ces coûts, vous n'êtes pas rémunéré : se pose la question du taux de rentabilité que vous attendez du capital investi. Du reste, quel est exactement ce capital investi ? Faut-il considérer le capital investi au départ ou, par exemple, la valeur nette comptable de votre outil de production tel qu'il se présente aujourd'hui ?

Tous ces sujets avaient été mis en avant lorsque se sont engagés les débats sur le dispositif d'accès régulé à l'électricité nucléaire historique (ARENH), c'est-à-dire la possibilité pour d'autres fournisseurs d'électricité d'avoir accès à notre électricité nucléaire : à quel niveau de juste rémunération pour EDF fallait-il fixer le prix de l'ARENH, de sorte non seulement que l'entreprise couvre les coûts restant à engager mais aussi que le capital investi soit rentable ? Ces discussions ont donné lieu au rapport de la Cour des comptes qui a considéré que compte tenu du montant du capital investi et des taux de rendement de ses actifs, EDF aurait dû toucher un montant donné. Elle a abouti à la notion de coût complet économique qui permettait en quelque sorte de mesurer la juste rémunération à laquelle EDF pouvait prétendre en vendant son électricité à ses concurrents : c'est ainsi que l'on est arrivé, en fonction de la méthode utilisée, aux 56 ou 63 euros par mégawattheure selon les méthodes. L'écart avec les 32 euros par mégawattheure dont je parlais plus haut s'explique principalement par la diminution progressive de nos dépenses d'exploitation et dépenses d'investissement au cours des cinq dernières années, mais surtout par la rémunération attendue de notre capital. En clair, la notion de coût complet économique couvre pour l'essentiel les coûts restant à engager et la rémunération du capital investi – d'où des discussions entre experts, certains estimant possible de jouer non seulement sur le montant du capital réellement investi, étant entendu que la valeur nette comptable du capital initialement investi, et amorti depuis, a changé, mais aussi sur son taux de rémunération.

Quant aux coûts restant à engager par réacteur dans le parc existant, soit 32 euros par mégawattheure, ils ne varient pas à l'ordre 1 au sein d'un même palier technique – 900, 1 300 ou 1 500 mégawatts. Naturellement, plus un palier est puissant, plus le coût par mégawattheure est bas. Au palier à 900 mégawatts, le coût de production est légèrement plus élevé que la moyenne de 32 euros ; il est plus bas au palier de 1 300 mégawatts et encore plus bas au palier à 1 500 mégawatts. Mais il n'y a pas de différences entre les réacteurs de 900 mégawatts.

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