Intervention de Nirmala Séon-Massin

Réunion du jeudi 22 février 2018 à 15h00
Mission d'information sur la gestion des évènements climatiques majeurs dans les zones littorales de l'hexagone et des outre-mer

Nirmala Séon-Massin, présidente de la commission de gestion des écosystèmes de l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) :

Les Français sont en effet très attachés à la loi « Littoral », et il y a une prise de conscience croissante de la problématique environnementale en général, mais la connexion ne se fait pas encore entre ces enjeux et le quotidien. On est pour la loi « Littoral » et en même temps on veut partir en vacances à la mer, et être le plus près possible de la plage… On porte, sans forcément le réaliser, beaucoup de contradictions ; cela nécessiterait de soutenir des recherches en sciences humaines, notamment, pour mieux comprendre ces contradictions et la déconnexion entre des enjeux environnementaux, perçus comme très globaux – la forêt amazonienne, les éléphants d'Afrique… – et nos choix pour partir en vacances, nos choix de résidence, nos modèles de développement.

De même, on a beaucoup fondé d'espoir dans les approches économiques pour la conservation de la nature, mais il est difficile de comparer des coûts évités, dont je parlais tout à l'heure, et des bénéfices concrets résultant de choix de développement, car ce sont d'un côté des euros potentiels et de l'autre des euros réels.

Le littoral est un milieu d'interface entre le milieu marin et le milieu terrestre : même si l'on agit de façon très volontariste sur le littoral, à défaut de prendre garde à tout ce qui arrive dessus, nos efforts sont voués à l'échec. La gestion des fleuves est extrêmement importante, en termes de recharge sédimentaire, de qualité de l'eau... L'érosion que connaissent certaines côtes est accentuée par le fait que les fleuves qui se déversent sur ces littoraux ont été extrêmement aménagés, sont par exemple traversés par de nombreux barrages qui altèrent le flux sédimentaire. De même, les coraux sont touchés par un phénomène de blanchiment à cause du réchauffement climatique ; même la gestion du littoral la plus attentive à ces coraux risque de ne pas atteindre ses objectifs à cause d'un problème qui dépasse très largement les acteurs locaux.

On a jusqu'ici beaucoup parlé des écosystèmes au public sous l'angle des aménités et des services, dans une approche très utilitariste. Or ces écosystèmes littoraux sont très originaux ; ils accueillent des espèces très particulières et constituent un patrimoine de notre collectivité. Qui plus est, certains de ces écosystèmes ont été façonnés par l'homme depuis des siècles. Il en est ainsi de la Camargue, territoire où se sont conjugués des activités humaines et un milieu naturel remarquable.

La France a une approche du patrimoine culturel extrêmement volontariste – défense de la langue française, des monuments, etc. Qui n'a pas été confronté à l'architecte des Bâtiments de France en voulant repeindre ses volets de la mauvaise couleur ? Certes, je caricature un peu. En tout cas, nous devons prendre conscience que la défense de notre patrimoine doit inclure ces écosystèmes si riches et si particuliers. Par rapport à ses voisins européens, la France a cette chance : la métropole dispose d'une grande richesse de milieux et, en outre-mer, se trouvent tous les hot spots de la biodiversité française.

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