L'ingénierie – ou génie – écologique est une discipline en plein essor depuis quelques décennies. Mais elle se heurte à une difficulté liée à diversité de la nature dans notre pays. Ainsi, l'ingénierie écologique ne sera pas la même en Baie de Somme, en Camargue, à Saint-Pierre-et-Miquelon ou en Nouvelle-Calédonie. Vous avez raison, une digue est plus simple à réaliser : le béton, c'est du béton, qu'il fasse chaud, froid ou humide. Je suis probablement un peu caricaturale pour nos ingénieurs du génie civil… À l'inverse, l'ingénierie écologique doit jouer sur un grand nombre de paramètres liés aux espèces présentes, au type de substrat. Pour autant, certains exemples sont vraiment intéressants. Ainsi, dans un domaine différent de celui dont on parle, une entreprise française, dont j'ai oublié le nom, a développé une zone humide artificielle très complexe – appelée « Zone Libellule » – pour épurer les micropolluants des eaux lorsque n'y parvient pas par des méthodes d'ingénierie classique. Cette zone a montré une réelle efficacité pour filtrer les micropolluants, tout en développant un écosystème intéressant. L'ingénierie écologique n'est donc pas dépourvue de moyens, mais il est plus compliqué de s'adapter à la diversité des systèmes.
C'est vrai, nous faisons tous ce constat de l'abondance de procédures, de lois et de structures en France. On a parfois l'impression de ne plus rien y comprendre. Mais nous sommes face à des situations complexes, notamment en matière d'environnement puisque le choix des uns aura des impacts très forts sur les autres, qui ne demandent rien. C'est pourquoi nous avons besoin d'un corpus réglementaire important ; c'est le rôle de l'État de protéger l'ensemble des citoyens, y compris les uns des autres. En matière d'environnement, même s'il est plus complexe de l'appréhender, cela se vérifie également. Peut-être que cette accumulation de textes ou de normes est également la conséquence des priorités de chaque époque : le développement économique a longtemps été mis en avant, puis la protection du littoral a pris le dessus. Tout est aujourd'hui important, ce qui conduit à ces difficultés d'interprétation : les priorités ne sont pas forcément claires. Peut-être faut-il donc commencer par nous demander quelles sont nos priorités pour les territoires. À partir de notre réponse et de la hiérarchie que nous établirons de ces dernières, nous pourrons alors sans doute simplifier les normes.
En l'état actuel, les organismes que nous représentons défendent le principe de non-régression du droit de l'environnement. Force est de constater en effet qu'en général – je ne dis pas que c'est votre cas –, la modernisation vise souvent à supprimer les normes environnementales qui empêchent le bon développement économique des territoires ! Là encore, je suis un peu caricaturale, pardonnez-moi, mais malheureusement réaliste. Il faudrait plutôt inverser le raisonnement : certes, on peut développer l'urbanisation mais la priorité absolue est que personne ne vive dans une zone à risque. Les choses seront alors plus simples. Pour résumer, il faut d'abord se mettre d'accord sur les objectifs et leur hiérarchisation car, malheureusement, chaque choix est un compromis.