Intervention de Gilles Leblanc

Réunion du mercredi 21 mars 2018 à 9h30
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Gilles Leblanc :

Madame la présidente, mesdames et messieurs les députés, je suis ingénieur général des eaux et forêts. J'ai exercé un certain nombre de responsabilités dans les services de l'État – au niveau départemental, au niveau régional et au niveau central. J'ai aussi, plusieurs fois, exercé des fonctions en détachement auprès de collectivités territoriales, dans le département du Val-d'Oise, en établissement public – à Voies navigables de France (VNF) et à la direction du Port autonome de Paris – et dans plusieurs cabinets ministériels. J'ai deux fois été détaché au ministère des affaires étrangères pour travailler au niveau international, auprès du Maroc et, dans le cadre d'une mission internationale, immédiatement après le séisme en Haïti.

Mon expérience, assez diversifiée, comporte des éléments sur lesquels je voudrais insister. Dans le champ environnemental, j'ai eu à intervenir essentiellement au moment où je m'occupais des questions d'hydraulique avec le service navigation de la Seine de VNF, dans les dix-neuf départements du bassin de la Seine, à la fois sur la mise en place du schéma directeur d'assainissement de la région Île-de-France et surtout sur le fonctionnement hydraulique de la Seine, singulièrement la gestion des problèmes d'étiage et des problèmes d'inondation. C'est effectivement à cette époque qu'ont été faites les études qui ont alerté à nouveau sur les problèmes posés par le risque d'inondation.

J'ai aussi été amené à exercer des responsabilités un peu singulières dans le champ de la sécurité. En effet, j'ai été appelé, après les attentats de New York, à assurer les responsabilités de haut fonctionnaire de défense et de sécurité pour l'ensemble des secteurs d'activité relevant du ministère de l'écologie, à un moment où il était nécessaire de reprendre un certain nombre d'initiatives et de travailler sur les questions de prévention et de gestion de crise.

Actuellement, je suis en charge de la direction régionale et interdépartementale de l'équipement et de l'aménagement en Île-de-France. En cette qualité, comme vous avez dû le remarquer dans mon curriculum vitae, j'exerce un certain nombre de fonctions d'administrateur, dont celle d'administrateur de Groupe ADP, anciennement Aéroports de Paris. J'en démissionnerai bien évidemment si je suis nommé président de l'ACNUSA. Je suis également administrateur de la Régie autonome des transports parisiens (RATP), de la Société du Grand Paris (SGP) et de plusieurs établissements publics, dont l'Établissement public foncier d'Île-de-France (EPFIF).

Ma carrière est entièrement tournée vers les questions d'aménagement, d'environnement et de transport, que ce soit le transport terrestre, le transport maritime ou le transport aérien, avec deux lignes de force. La première, ce sont les sujets de prévention, de sécurité et de gestion de crise. J'ai été informé de ces questions et j'ai acquis un certain nombre d'expériences, y compris dans des situations difficiles. Autre ligne de force, les questions de pédagogie, de formation et de management public ont également marqué mon exercice professionnel et j'ai été amené à enseigner à plusieurs reprises dans des cadres différents.

J'en viens à l'intérêt que je porte à l'ACNUSA. Mon parcours m'a formé et préparé à exercer un certain nombre de responsabilités. Ce qui est attendu de l'ACNUSA en termes d'indépendance, de compétences et d'impartialité m'intéresse en tant qu'exercice professionnel. Il s'agit de concilier des intérêts qui peuvent apparaître divergents ou l'être objectivement : le développement économique et touristique des grandes régions ; les évolutions des modes de transport, dans un contexte de croissance effectivement assez importante, madame la présidente, du transport aérien de passagers ou de fret ; les attentes et les aspirations des populations qui peuvent être amenées à subir les nuisances. Lors de sa création, en 1999, l'ACNUSA devait se consacrer essentiellement à la problématique des nuisances sonores. Après le Grenelle de l'environnement, sa compétence a été étendue à l'ensemble du champ de l'environnement, singulièrement aux pollutions de l'air, mais nous pourrons y revenir.

Par son budget et ses effectifs, l'ACNUSA est la plus petite des autorités administratives indépendantes. Sa compétence procède de la qualification de ses dix membres, eux-mêmes choisis en fonction de leur expérience et leurs compétences, et d'une vingtaine de membres associés, également choisis pour leurs compétences. Le fonctionnement de l'autorité, collégial, repose sur une petite équipe. L'équipe administrative compte simplement une douzaine de personnes. La fonction de sanction est importante dans la régulation, même si la médiation et le conseil sont réels. Il y a l'instruction des dossiers et les sanctions, activité reposant sur une équipe animée par une rapporteure générale qui instruit en fait les dossiers avant que l'autorité ne se prononce.

Disposer des compétences nécessaires me semble indispensable, puisqu'aujourd'hui l'ACNUSA intervient dans un champ varié, notamment élargi aux différentes pollutions atmosphériques. Il est évident que l'ACNUSA a dû acquérir un certain nombre de compétences qu'elle n'avait pas forcément à l'origine. Au travers des recrutements des dernières années, il y a eu un effort, qu'il faut, je crois, poursuivre.

La question de l'indépendance me paraît essentielle. En aparté, j'évoquais tout à l'heure avec l'un d'entre vous les rapports de l'autorité avec l'administration, singulièrement la direction générale de l'aviation civile (DGAC). L'indépendance est importante à la fois dans les analyses, dans la capacité d'écoute et dans la capacité de recommandation. Un certain nombre de recommandations de l'ACNUSA me semblent intéressantes et les Assises du transport aérien me semblent très importantes pour arriver à faire converger un certain nombre de textes et de documents ; je pense essentiellement aux documents locaux – en particulier les plans d'exposition au bruit (PEB) et les plans de gêne sonore (PGS). Il y a aussi la façon dont on peut finalement rendre l'information plus accessible. Les différents documents réglementaires apparaissent aujourd'hui un peu « superposés » ; il faut des améliorations.

Je pense qu'il est important de garder une capacité d'écoute, même si l'équipe est d'un effectif réduit, ainsi qu'une certaine impertinence dans la confrontation au travail des administrations, qui sont dans leur rôle, que ce soit celle de l'aviation civile ou la direction générale de l'aménagement, du logement et de la nature. Il s'agit de parvenir, progressivement, à améliorer un certain nombre de textes.

Je pense qu'elle est aussi importante dans l'analyse des mécanismes mis en oeuvre avec la taxe qui sert à financer l'insonorisation. En étudiant le dossier avant de me présenter devant vous, j'ai été surpris de constater que la proportion de logements insonorisés était d'à peine 50 %, alors que le système a été créé il y a maintenant plus de quinze ans – j'étais conscient de la réalité du problème en Île-de-France, mais pas tout à fait de son ampleur nationale. Nous avons un problème d'efficacité du dispositif. Je crois qu'il faut qu'on y travaille. J'ai lu les recommandations et les rapports. Nous pourrions revenir sur les questions de plafonnement, de déplafonnement et de bouquets de travaux, nous pourrions essayer de gagner en rapidité dans le traitement des dossiers. Rien qu'en Île-de-France, 6 100 dossiers sont actuellement en attente, ce qui suscite forcément frustration et insatisfaction. Il faut parvenir à régler ce problème.

L'autorité rend des avis sur les documents locaux et formule des recommandations. Des progrès ont été réalisés, je pense qu'il faut continuer sur cette voie. Aujourd'hui, l'administration s'est imposé de répondre à ces recommandations. Certes, les réponses aux recommandations ne sont pas forcément toujours satisfaisantes du point de vue de l'ACNUSA, mais elles ont maintenant le mérite d'exister.

La question de l'impartialité de l'ACNUSA me préoccupe forcément un peu.

À la suite d'un contentieux, le Conseil constitutionnel a annulé deux dispositions législatives, dont j'espère qu'elles seront rétablies avant la fin du mois de juin pour que l'autorité puisse jouer son rôle de régulation, y compris en exerçant son pouvoir de sanction. Le problème est relativement simple : le Conseil constitutionnel a mis en cause l'absence de séparation des pouvoirs internes à l'autorité et le pouvoir de classement sans suite du président. Les solutions ont été examinées et je souhaite que le problème soit réglé rapidement pour que l'autorité puisse fonctionner correctement. Il n'est pas bon, pour la fonction de régulation d'une autorité, que son pouvoir de sanction soit « mis en sommeil ».

La fonction m'intéresse et je pense pouvoir, avec le collège des membres, y apporter une valeur ajoutée. Je serais le quatrième président de cette instance depuis sa création. Je pense être capable d'indépendance et d'expertise, d'écoute et de propositions. J'en ai conscience, le sujet est complexe. Mme la présidente l'a dit : les débats des Assises de transport aérien sont un moment privilégié pour essayer d'améliorer un certain nombre de nos dispositifs. Je pense que les sujets ont été assez bien cernés. J'espère donc effectivement que l'ACNUSA puisse jouer son rôle et permettre de progresser dans la prise en compte de l'ensemble des nuisances.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.