Intervention de Gilles Leblanc

Réunion du mercredi 21 mars 2018 à 9h30
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Gilles Leblanc :

Plusieurs questions ont porté sur le champ d'intervention de l'autorité.

Je pense qu'il faut donner sa plénitude à l'activité dans le champ de la pollution de l'air. Au niveau international, a été définie une approche qui me semble intéressante, reposant sur la notion de « panier de mesures » qui comprend des améliorations technologiques pour réduire les émissions à la source, des améliorations opérationnelles, le développement de carburants alternatifs et des mécanismes économiques. Je pense qu'il est important de bien suivre ces quatre axes, et je pense que la compétence et, d'une certaine manière, l'autorité de l'ACNUSA sur ces champs doivent être renforcées. Je pense qu'il faut développer la façon dont elle pourra suivre les progrès nécessaires. Même s'il s'agit de quelques points de pourcentage, je pense qu'il faut progresser.

La question du contrôle des trajectoires se pose en des termes différents selon les plateformes. La directive européenne définit le principe d'une « approche équilibrée » pour chacune des plateformes.

Certains aéroports sont soumis à un couvre-feu : Orly, Bâle-Mulhouse et Beauvais. S'agissant d'Orly, le groupe de travail sur les trajectoires suivies par les avions a repris ses travaux, conformément aux demandes de l'ACNUSA. Il s'intéresse à leur définition, et notamment au cas des avions qui se retournent vers l'Est après leur décollage. Je crois qu'il est important que ce travail soit mené à son terme. Il me semble que la définition de la règle, à savoir des cônes respectés au décollage, doit être revue. Le travail est en cours. Le groupe de travail issu de la commission consultative fonctionne en tout cas.

L'ACNUSA doit suivre cette question de près, car des interrogations subsistent, tant dans la vallée de Chevreuse que dans le Sud-Est de Paris, entre Athis-Mons et la forêt de Sénart. La question des trajectoires est importante pour ceux qui, comme l'ACNUSA, ont à la contrôler et, le cas échéant, à prononcer des sanctions sur cette base.

S'agissant des sanctions, j'ai noté qu'un certain nombre de compagnies, notamment la compagnie nationale, habituée à en faire l'objet, ont désormais changé leur livret d'équipage. Quand les trajectoires et les cônes sont bien définis, on s'aperçoit que les infractions sont tout de même un peu moins nombreuses. En tout état de cause, elles doivent être sanctionnées.

J'attire cependant votre attention sur le vide juridique qui menace l'ACNUSA à partir du 30 juin, si nous ne pouvons plus régulièrement prononcer de sanctions. Cela créera des difficultés. J'imagine mal qu'on puisse « stocker » des amendes faute de législation ! De ce point de vue, il y a, ce me semble, urgence législative.

En ce qui concerne la question plus spécifique de Roissy, le travail qui a suscité l'insatisfaction portait sur les trajectoires et sur les descentes en continu. Le sujet avait fait débat avec la DGAC et avec les autorités de contrôle du secteur aérien. En effet, jusqu'où peut aller le recours à la descente en continu, moins bruyante ? Cette solution est de plus en plus appliquée, sauf en période de plein trafic, puisqu'elle fait disparaître les paliers sur lesquels les avions sont mis en attente. Cela pose alors une réelle question de sécurité. Mais, aux heures creuses, il ne semble pas y avoir de raison objective à ce que la descente en continu ne soit pas prescrite de manière systématique, comme c'est déjà le cas, au coeur de la nuit, à Roissy et sur la plupart des plateformes françaises.

Sur les questions législatives liées aux PGS et aux PEB, j'ai trouvé intéressantes les recommandations formulées, ainsi que le travail entrepris pour rendre ces plans plus lisibles et plus cohérents. Ce serait en effet une mesure de simplification que d'élaborer et de réviser ces plans aux mêmes dates et sur les mêmes bases scientifiques, de manière qu'ils s'accordent les uns avec les autres. Cela me semble important pour la compréhension des habitants et du grand public. Que ces documents, qui n'ont certes pas le même objectif, ne soient pas élaborés conjointement donne un sentiment d'incohérence.

J'en viens au mécanisme de la taxe. À vrai dire, j'avais été surpris par le débat sur son plafonnement ou non-plafonnement. Le problème se pose à la fois en termes de dépenses et de recettes.

S'agissant des dépenses, le taux est fixé à 100 % pour les écoles et les hôpitaux, comme c'est le cas aussi sous plafond de ressources ; dans d'autres cas, il s'établit à 95 %. Peut-être faut-il relever le plafond de ressources pour que le financement s'élève plus souvent à 100 %, sans aller jusqu'à dire qu'il faille garantir ce taux de financement à tout le monde. En revanche, il me semble nécessaire de progresser pour que des organismes de groupage puissent élaborer avec les riverains des dossiers « complets », de façon que les travaux financés comportent à la fois l'insonorisation des logements et leur rénovation énergétique. Nous avons déjà réussi à le faire dans la mise en oeuvre des plans de prévention des risques technologiques (PPRT). L'efficacité serait améliorée si les organismes de groupage pouvaient travailler de front à la réalisation des deux objectifs.

S'agissant des recettes, vous avez fixé, dans les lois de finances successives, un plafond de reversement supérieur au montant des recettes. Il n'y a donc pas de reversement. Et tant que ce plafond sera supérieur à la recette, la question du reversement de la recette résiduelle au budget général de l'État ne sera qu'un faux sujet.

Mais comment faire pour, sans augmenter la taxe – au sujet de laquelle la ministre des transports a fait de récentes déclarations –, être plus efficaces sur le plan des dépenses ? Malgré les réserves de la direction du budget, je ne comprends pas pourquoi nous n'arriverions pas à ce que des personnes publiques puissent faire des avances remboursables, de façon à être plus efficace dans le suivi et l'élaboration des dossiers. Il me semble choquant que le dispositif mis en place par la loi du 12 juillet 1999 n'ait été mis en oeuvre qu'à 50 %. La moitié de la population, dans ces zones, vit dans des logements non insonorisés. Les taux d'attente me semblent difficiles à expliquer.

Une simple suppression du plafonnement ne fera cependant que provoquer un appel d'air et un afflux de dossiers. Si les recettes ne sont pas plus importantes, cela créera donc des files d'attente, et partant, des frustrations. Il faut rechercher un certain équilibre entre la recette et la dépense. Évitons ainsi de parler d'une simple suppression du plafonnement, si des solutions ne sont pas trouvées pour que les dépenses subséquentes puissent être honorées.

Quant à l'utilisation de la taxe, le principe d'un suivi par plateforme est le bon. Le principe pollueur-payeur sur lequel repose la taxe se trouve ainsi respecté. Aussi me semble-t-il logique que les bases de calcul de la taxe fassent appel à des critères tels que la nature des aéronefs et les horaires de décollage, plateforme par plateforme. Sur la plateforme de Lyon-Saint-Exupéry, l'ensemble des logements est insonorisé, tandis qu'il n'y a plus de construction de nouveaux logements dans le secteur. La taxe y a donc été fixée à 0 %. Il est en effet assez logique qu'il y ait un rapport direct entre le niveau des nuisances sonores et la taxe payée par les pollueurs, le tout étant suivi plateforme par plateforme.

En ce qui concerne le sujet de la transparence, beaucoup de données agrégées sont disponibles sur les sites des aéroports. Mais on peut progresser encore, en les présentant de manière plus fine, non en temps réel – pour des raisons de sécurité –, mais de manière légèrement décalée. Qu'il s'agisse de la pollution de l'air ou des nuisances sonores, il me paraît important de progresser sur les outils mis à disposition.

Certains éditeurs ont d'ailleurs commencé à proposer des applications qui permettent de prendre connaissance de ces données. Mieux vaudrait, me semble-t-il, développer nos propres outils, comme l'avait recommandé mon prédécesseur, pour que la concertation ait lieu sur des bases objectives. Le débat devient sinon trop technique, de sorte que le grand public ne peut accéder à des informations libres et transparentes, ce qui se révèle frustrant.

Je ne pourrai pas répondre directement à la question qui concerne Aéroports de Paris (ADP). Mais, dans ce dossier, la différenciation à opérer entre l'entreprise elle-même et le foncier recouvre un enjeu réel pour les populations. ADP a été constitué de telle sorte que le foncier de l'État lui a été confié. Si son capital devait faire l'objet d'une ouverture, qu'en serait-il du développement économique dépendant de la régulation de ce foncier ? C'est un sujet qui mérite discussion.

Quant à notre champ d'intervention, l'ACNUSA suit d'un peu loin le problème de la biodiversité sur et autour des plateformes. Des progrès restent à faire. Les collectivités territoriales en ont accompli, quoique je déplore un cloisonnement entre elles et les aéroports sur cette question. La préservation de la biodiversité fera partie de mes préoccupations.

En ce qui concerne les amendes, leur produit va directement au budget général de l'État, cela me semble normal. Certes, j'aurai sans doute des revendications budgétaires à porter, car notre budget est assez faible et nous sommes soumis à des contraintes assez fortes. Mais il est bon qu'il n'y ait pas de lien direct entre les amendes et le budget de l'ACNUSA. Toutes les taxes ne doivent certes pas aller à ceux qui les génèrent.

Sur le fond, il me semble que les sanctions portant sur les trajectoires étaient correctes. Pour les autres amendes, le plafond de 40 000 euros auquel elles sont soumises est rarement atteint.

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