Intervention de Claude Goasguen

Réunion du mercredi 14 février 2018 à 9h30
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaClaude Goasguen :

Pour avoir eu le grand malheur d'être allé plusieurs fois à l'OFPRA en tant qu'avocat, je dois dire que le lieu m'a donné l'impression d'un infini désordre. Ce qui fait que l'OFPRA ne me paraît pas satisfaisant dans son essence. Vous allez avoir des moyens supplémentaires et vous vous en réjouissez. Tant mieux. On verra cela en séance. La loi vous donne des responsabilités supplémentaires puisqu'il va y avoir une ouverture du regroupement familial. Vos décisions vont être d'autant plus importantes pour l'immigration et le droit d'asile à venir.

Vous n'êtes qu'une autorité administrative, raison pour laquelle on vous balade de ministère en ministère. Comme vous êtes une autorité administrative, vous avez une fonction quasi juridictionnelle mais vous n'avez pas de pouvoir d'exécution. Vous nous dites, d'ailleurs, que l'exécution n'est pas votre problème et que vous appelez le préfet pour qu'il s'en charge. Nous sommes dans une situation extraordinaire : quand vous déboutez une personne, les sanctions et les conséquences juridiques sont importantes mais, au fond, vous vous désintéressez de l'exécution parce que vous êtes une autorité administrative. Quand on est avocat, on voit bien que ce n'est pas tenable. Aucun policier n'intervient quand vous décidez de débouter. Comme vous jugez en tant qu'autorité administrative, il n'y a pas d'exécution, ce qui signifie que les déboutés du droit d'asile posent le problème que nous connaissons pour les reconduites à la frontière.

On veut transmettre ce système à l'Europe. Dieu garde l'Europe d'avoir un système pareil ! À ce moment-là, nous n'aurions plus aucune reconduite à la frontière. Pour reconduire à la frontière, il faut une juridiction. Comme toutes les conventions internationales, la Convention de Genève ne s'applique pas de plein droit et elle peut donner lieu à des interprétations. L'État a voulu s'emparer de l'interprétation de la Convention par l'intermédiaire d'une autorité administrative. C'est du ressort du juge !

Pour ma part, j'aimerais qu'il y ait une autorité juridictionnelle car elle serait tenue d'exécuter ses sentences. Actuellement, nous sommes dans une situation incroyable et le système ne peut pas fonctionner. Dans ces conditions, les reconduites à la frontière sont insuffisantes et la loi sur l'immigration dont nous allons débattre avec ardeur n'aboutira qu'à un statu quo.

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