Intervention de Laurence Maillart-Méhaignerie

Réunion du mardi 27 mars 2018 à 17h15
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLaurence Maillart-Méhaignerie, rapporteure pour avis :

Chargée de rendre un avis au nom de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire sur le titre II du projet de loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine et durable, je tiens tout d'abord à souligner la qualité du travail et de la concertation qui ont été effectués dans le cadre des États généraux de l'alimentation, dont ce texte constitue l'aboutissement.

Le projet de loi vise à répondre aux attentes sociétales relatives à l'agriculture, à l'alimentation, à la santé, à la protection des animaux et au développement durable qui ont été formulées au cours des États généraux. Ces attentes sont nombreuses et nous devons y répondre.

Avec plusieurs collègues, j'ai conduit ces dernières semaines des auditions préalables approfondies de plus de quatre-vingts personnes pendant une trentaine d'heures, afin d'entendre les parties prenantes en vue d'enrichir ce projet de loi, qui poursuit deux objectifs : rééquilibrer les relations commerciales dans le secteur agricole pour répartir plus équitablement la valeur ajoutée créée par la production et la consommation alimentaire au bénéfice des agriculteurs, et déployer les moyens nécessaires pour que les Français aient accès à une alimentation saine, durable et de qualité.

Le titre II s'articule autour de cinq axes. Le premier concerne l'amélioration de la qualité des repas servis dans la restauration collective publique, avec la définition d'un seuil minimal de 20 % de produits bio et de 30 % de produits de qualité dans la composition des repas. Le deuxième a trait au transfert dans le code de l'action sociale et des familles des dispositions relatives à l'aide alimentaire : le travail des acteurs de terrain doit être mis en valeur. Troisième axe : l'amélioration du bien-être animal par le renforcement des sanctions. Le quatrième axe vise, à l'article 15, à renforcer la lutte contre le gaspillage alimentaire. Cinquième et dernier axe, la réduction de l'utilisation des produits phytopharmaceutiques en agriculture.

La qualité des repas servis dans la restauration collective publique doit progresser, conformément aux engagements du Président de la République. Je propose un amendement tendant à réécrire l'article 11 afin d'en clarifier de nombreux éléments : il est nécessaire de fixer dans la loi les pourcentages à atteindre. La liste des produits compris dans la part de 50 % serait élargie à la certification de conformité des produits, dont le contenu doit être renforcé, ainsi qu'à l'écolabel « Pêche durable ». Le coût du cycle de vie du produit devrait être considéré comme un outil spécifique complémentaire de cette démarche, qui permettra de réorienter la composition des menus dans une optique plus respectueuse des enjeux de développement durable. Les produits de saison sont mentionnés, ainsi que les produits bénéficiant du label « Commerce équitable ». Nous reviendrons sur toutes ces questions.

L'article 12 permet d'ancrer l'aide alimentaire dans le code de l'action sociale et des familles ; c'est une très bonne chose. L'article 13 porte sur les sanctions applicables en cas de maltraitance des animaux : c'est un point essentiel. Un délit est étendu aux opérations de transport et d'abattage, les peines encourues sont doublées et les droits des associations élargis à l'ensemble des infractions prévues par le code rural. Je présenterai sur ce point un amendement afin que l'extension des droits des associations de protection des droits des animaux ne vise que les délits du code rural pour lesquels le projet prévoit – c'est une mesure très importante – qu'elles puissent porter plainte et se constituer partie civile. Je défendrai également plusieurs amendements tendant à renforcer les obligations pesant sur les abattoirs et à renouer la confiance avec les citoyens : cadre renforcé pour les lanceurs d'alerte, désignation systématique d'un référent sur la protection animale et obligation de signer et publier un protocole sanitaire particulier sur la base d'un protocole-cadre national.

L'article 15 contient une disposition habilitant le Gouvernement à prendre par ordonnance des mesures tendant à élargir les dispositions de la loi relative à la lutte contre le gaspillage alimentaire. Ces mesures visent à étendre à l'ensemble des opérateurs de la restauration collective l'obligation d'adopter une démarche de lutte contre le gaspillage, à leur imposer la réalisation d'un diagnostic préalable à cette démarche, à prévoir les conditions dans lesquelles les obligations applicables aux grandes et moyennes surfaces en matière de dons aux associations d'aide alimentaire, sur la base de conventions proposées aux associations, sont étendues à certains opérateurs du secteur agroalimentaire et de la restauration collective et, enfin, à imposer à certains opérateurs l'obligation de rendre publics leurs engagements en faveur de la lutte contre le gaspillage alimentaire. Je proposerai plusieurs amendements visant à préciser le champ des opérations visées et le périmètre de l'ordonnance.

L'article 14 et le I de l'article 15 comportent une série de mesures visant à réduire le recours aux produits phytopharmaceutiques en agriculture, ce qui permettra de favoriser la réussite du plan Écophyto II. Avec l'adoption de ce plan, la France s'inscrit dans une démarche ambitieuse qui vise à diminuer de 50 % l'utilisation des produits phytopharmaceutiques entre 2015 et 2025. Pour y parvenir, il convient de réduire le plus possible les incitations à utiliser les produits phytopharmaceutiques ; c'est pourquoi l'article 14 du projet de loi interdit les remises, rabais et ristournes sur ces produits tout en excluant de cette interdiction les produits de biocontrôle.

De plus, le 1° du I de l'article 15 vise à habiliter le Gouvernement à prendre par ordonnance des mesures destinées à séparer l'activité de vente de produits phytopharmaceutiques de l'activité de conseil concernant leur utilisation. Ces mesures visent à prévenir tout risque de conflit d'intérêts qui pourrait résulter de la coexistence de ces activités au sein d'un même opérateur, et à garantir aux utilisateurs professionnels un conseil annuel individualisé qui concourt à la réduction de l'utilisation des risques et des effets liés aux produits phytopharmaceutiques.

Par ailleurs, le 2° du I de l'article 15 vise à habiliter le Gouvernement à réformer par ordonnance le système des certificats d'économie des produits phytopharmaceutiques instauré en 2017, dont les résultats ne sont pas encore assez satisfaisants.

Enfin, le 3° du I de l'article 15 vise à habiliter le Gouvernement à prendre par ordonnance des mesures permettant de renforcer les pouvoirs de police judiciaire des agents chargés des contrôles dans le domaine de l'alimentation, de la santé publique vétérinaire et de la protection des végétaux, afin de les harmoniser avec les pouvoirs dont disposent les agents de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF). Considérant que, pour atteindre les objectifs fixés dans le plan Écophyto II, il convient de réduire le plus possible les incitations à utiliser les produits phytopharmaceutiques, je vous proposerai de compléter le dispositif instauré à l'article 14 en adoptant deux amendements tendant, d'une part, à interdire à partir de 2022 la publicité pour les produits phytopharmaceutiques à destination des professionnels dans les revues spécialisées – cette interdiction existe déjà pour la publicité à destination des utilisateurs non professionnels – et, d'autre part, à inscrire la réduction de l'utilisation des produits phytopharmaceutiques parmi les objectifs de la politique des chambres d'agriculture.

Telles sont les principales dispositions que je souhaitais vous présenter, chers collègues.

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