La réponse est clairement oui. L'évaluation comparée des piscines et du stockage à sec ne fait aucun doute sur le plan international. Les situations varient d'un pays à l'autre. En Allemagne, par exemple, sept réacteurs restent en fonctionnement dont six sont des réacteurs pressurisés et ont leur piscine à l'intérieur de l'enceinte de confinement. Il y a donc une piscine mais elle est protégée de façon complètement différente des piscines françaises. Il reste par ailleurs un réacteur à eau bouillante qui a sa piscine à l'extérieur. Aux États-Unis, environ 60 % des combustibles sont toujours dans des piscines mais il y a une forte accélération du stockage à sec et des transferts massifs des piscines vers cet entreposage à sec.
Areva, maintenant Orano, est d'ailleurs un des grands, si ce n'est le plus grand, fournisseurs de conteneurs de stockage à sec aux États-Unis. C'est donc un secteur dynamique. Lors d'une présentation récente, Areva a affirmé qu'à partir d'un an seulement désormais, on peut mettre les combustibles dans des conteneurs. Cette durée serait d'un à quatre ans selon le type de conteneurs et le type de combustibles. À Fukushima, le plus grand potentiel de danger résidait dans la piscine du réacteur n° 4 – réacteur qui n'était pas en fonctionnement. L'ancien Premier ministre japonais Naoto Kan a toujours souligné son étonnement à cet égard, croyant qu'un réacteur à l'arrêt ne pouvait être que sûr. Le problème était justement que le coeur du réacteur était dans la piscine, située entre le quatrième et le cinquième étage du bâtiment qui a été endommagé de façon très violente. On craignait donc que l'ensemble du bâtiment s'écroule et, avec lui, la piscine, ce qui aurait entraîné une perte de refroidissement. Or, le grand problème est qu'il y auto-inflammation à partir d'une certaine température, sans qu'il y ait besoin d'apport thermique, et donc libération quasi-totale des substances radioactives. L'ancien Premier ministre japonais s'est ainsi retrouvé face à un scénario d'évacuation de dix millions de personnes, y compris depuis la région de Tokyo. Avec des collègues de l'université de Princeton, nous avons refait des modélisations et découvert que la catastrophe aurait pu concerner non pas 10 millions mais jusqu'à 35 millions de personnes, selon les conditions climatiques.