Je vous remercie de vos éclaircissements.
Je voudrais prendre la parole à la suite de la parution ce matin d'un article dans Le Canard enchaîné – journal que j'ai toujours apprécié –, assez long et détaillé, ayant trait à notre commission d'enquête, paru sous le titre : « Le double jeu de Macron dans la vente d'Alstom à General Electric ». Je ne ferai pas de politique mais rappellerai cinq éléments factuels, aisément vérifiables dans les comptes rendus de l'ensemble de nos auditions et qui permettront d'éclairer les citoyens et les journalistes qui nous regardent.
Premièrement, aucune audition de notre commission d'enquête ne laisse à penser que l'Agence des participations de l'État (APE) aurait effectué une commande de rapport auprès du cabinet de conseil A.T. Kearney pour le compte de l'Élysée et sur commande directe d'Emmanuel Macron, alors secrétaire général adjoint de l'Élysée. La procédure de commande de ce rapport ne comporte aucune surprise. Aucune de nos auditions ne nous a permis d'avérer que la commande de ce rapport venait d'Emmanuel Macron. Je ne sais donc sur quel fait s'appuie le propos du Canard enchaîné.
Deuxièmement, contrairement à une idée répandue, le rapport d'A.T. Kearney ne sélectionne pas une unique option miracle, celle de General Electric, mais étudie sur le même plan trois scénarios possibles : Areva, Dongfeng et une activité de transport autonome. C'est d'ailleurs ce que nous ont dit les représentants d'A.T. Kearney quand ils sont venus témoigner.
Troisièmement, il est difficile de croire que M. Montebourg n'ait pas été au courant de l'existence du rapport A.T. Kearney avant 2017, pour deux raisons assez simples : la première, c'est que son propre cabinet était présent lors de la restitution du rapport A. T. Kearney le 18 janvier 2013 – comme nous l'a indiqué A.T. Kearney ; la seconde, c'est que le cabinet Roland Berger était lui aussi au courant de l'existence de l'étude du cabinet A.T. Kearney pendant qu'il effectuait sa mission. Il avait même demandé à y accéder, mais on le lui avait refusé ; autrement dit, l'existence de ce rapport n'était pas secrète. Ces deux éléments figurant dans le compte rendu, de deux choses l'une : ou bien le cabinet de M. Montebourg n'a pas communiqué à ce dernier pas ce qu'il faisait, ou bien M. Montebourg avait connaissance de l'existence de ce rapport avant 2017.
Quatrièmement, contrairement à ce qu'a affirmé M. Montebourg, le rapport du cabinet Roland Berger souligne bien la situation d'urgence dans laquelle se trouvait Alstom avant son rapprochement avec General Electric. On entend souvent dire qu'il n'y avait pas d'urgence et qu'Alstom aurait pu rester seul. Le compte rendu comme la page 2 du rapport de Roland Berger, font clairement état d'une urgence quant à la situation d'Alstom, et notamment des difficultés de trésorerie et des besoins de financement du groupe. D'ailleurs, quand on a interrogé Roland Berger, il nous a dit très clairement qu'Alstom ne pouvait pas à l'époque rester tout seul et que le statu quo n'était pas possible.
Enfin, cinquième fait, Roland Berger n'avait pas la liberté totale de recommandation. Dans sa commande, le cabinet de conseil avait explicitement instruction d'écarter certaines recommandations, dont la fusion avec General Electric. Autrement dit, on compare deux rapports qui ne sont pas exactement comparables : dans celui de A. T. Kearney, tous les scénarios ont pu être étudiés et toutes les recommandations étaient libres ; dans celui de Roland Berger, la commande – le brief – excluait délibérément certains scénarios.
Tous ces éléments sont disponibles dans nos comptes rendus, les auditions sont publiques et visibles sur le site de l'Assemblée nationale et je tiens à disposition l'ensemble des citations sur un document que j'ai rédigé à la suite de la parution de cet article.