… elle ne semble pas vous contraindre beaucoup.
Tout le monde voit la ficelle : les directives, c'est quand ça vous arrange, pour taper sur les agents de la SNCF, lesquels sont les plus combatifs contre vos politiques inégalitaires et celles de vos prédécesseurs.
Ces réformes ont profondément fragilisé le réseau ferré en le privant des moyens nécessaires à son entretien et à sa modernisation, engendrant tous les dysfonctionnements que nous connaissons aujourd'hui.
Plus sournoisement encore, la SNCF a organisé la concurrence en interne en créant un millier de filiales dans le fret, dans le transport routier et de marchandises, dans le transport de voyageurs et dans les sociétés de maintenance. Ces entités se sont développées pour entrer en concurrence frontale avec la SNCF sur son propre réseau et sur les marchés les plus juteux. J'en veux pour preuve, par exemple, la concurrence des camions Geodis, qui, filiale à 100 % de la SNCF, emploie des travailleurs détachés.
La situation prêterait à rire si elle n'était pas aussi dramatique pour les cheminots, menacés de reclassement, et pour notre territoire qui étouffe sous le trafic de camions. Tout cela a abouti à l'effet escompté : une entreprise divisée et livrée à la finance, afin de justifier sa privatisation et l'ouverture à la concurrence.
À propos de finance, j'en viens au sujet de la dette. Cet argument de la dette de 46 milliards d'euros, brandi par chaque « porte-flingue » du Gouvernement dans tous les médias, permet de faire avaler à l'opinion publique le passage en société nationale à capitaux publics, premier pas vers la privatisation – l'exemple de GDF en 2004 est là pour nous le rappeler, malgré vos démentis. Cette dette est le résultat d'une stratégie concertée entre une entreprise à la recherche de parts de marché et un État au service du « tout-routier ». Elle n'est pas la dette des cheminots.
À la demande des dirigeants politiques, la SNCF a investi massivement dans les TGV. Pour cela, elle s'est endettée en ayant recours à l'emprunt sur les marchés financiers. Durant la dernière décennie, ce sont ainsi 23 milliards d'euros qui ont été investis dans le TGV. Parallèlement, les subventions de l'État n'ont cessé de diminuer. Mais celui-ci regarde ailleurs et choisit de subventionner le routier avant tout, au détriment du ferroviaire, en y investissant sept fois plus et en privatisant les autoroutes.
Surtout, madame la ministre, il y a encore une omission dans votre discours ; car parler de dette, c'est aussi parler des intérêts d'emprunt. Et à qui profitent ces intérêts, d'un montant de 10 milliards d'euros depuis 2008 ? À qui sont-ils versés ? Pas aux cheminots, madame la ministre, mais aux banquiers.