Ce n'est ni dans les avanies faites aux cheminots, ni dans la création d'une SA, dont on peut craindre qu'elle soit l'antichambre d'une privatisation, que se nichent la défense du service public et la renaissance de la SNCF. L'ouverture à la concurrence le commande-t-elle ? Aucunement. Cette ouverture est d'ailleurs engagée depuis fort longtemps, et la négociation du quatrième paquet ferroviaire a laissé de nombreuses possibilités de confier à l'opérateur historique l'exploitation de lignes et a placé au premier rang des préoccupations la prise en compte des missions de service public.
Le sujet est donc ailleurs. Il est dans les 54 milliards d'euros de la dette. Nul ne doute que la dette de la SNCF soit celle de la nation ; nul ne doute qu'elle soit constituée de la somme des choix faits par les gouvernements successifs.
Ainsi, c'est bien l'État qui a engagé depuis 2010 SNCF Réseau dans un programme d'investissements de plus de 5 milliards d'euros par an pour la modernisation du réseau et pour le développement des lignes à grande vitesse, comme le prolongement vers Strasbourg de la LGV Est, celui vers Bretagne-Pays-de-la-Loire, le contournement de Nîmes et de Montpellier ou encore la LGV Sud-Est Atlantique vers Bordeaux – ligne, j'en suis le témoin hebdomadaire, qui connaît un franc succès, raison pour laquelle je suis attaché à son prolongement jusqu'à Hendaye.
L'État a eu raison de décider de ces investissements car il prépare ainsi l'avenir en aménageant le territoire. Mais, aujourd'hui, la SNCF s'endette pour rembourser une dette décidée par l'État. La question est ancienne, personne n'en disconvient, mais avec le retour de la croissance, avec l'augmentation des rentrées fiscales, avec la réduction du déficit public engagée depuis plusieurs années, la question se pose désormais plus sereinement d'une reprise de la dette par l'État, comme l'a fait l'État allemand avec celle de la Deutsche Bundesbahn. C'est une des conditions sine qua non d'une entreprise publique forte. Il faut désormais y répondre, madame la ministre, autrement que par l'esquive.
Il en va de même de la question des investissements. C'est une question centrale, chacun des intervenants l'a rappelé – elle a d'ailleurs été au coeur de la négociation du dernier contrat de performance signé entre la SNCF et l'État, qui prévoit 46 milliards d'investissement dans les dix prochaines années. Mais à vous écouter, madame la ministre, je ne suis pas certain que cet engagement sera tenu à cette hauteur. En tout cas, si vous avez besoin d'informations à ce sujet, je vous indique qu'une des ministres d'aujourd'hui en a été la signataire du côté de la SNCF.