Intervention de Quentin Guillemain

Réunion du jeudi 5 avril 2018 à 14h00
Commission d'enquête chargée de tirer les enseignements de l'affaire lactalis et d'étudier à cet effet les dysfonctionnements des systèmes de contrôle et d'information, de la production à la distribution, et l'effectivité des décisions publiques

Quentin Guillemain, président de l'Association des familles victimes du lait contaminé aux salmonelles :

Nous avons rencontré directement à la mi-janvier, M. Le Maire et Mme Buzyn. Nous leur avons alors remis des questions auxquelles, nous a-t-il été dit, il serait répondu par écrit. À ce jour, nous n'avons de réponses ni écrites ni orales. Le même jour où nous avons vu ces deux ministres, M. Travert n'était pas disponible ; nous avons rencontré son administration et posé les mêmes questions, sans plus de réponses. Fin janvier, nous avons revu l'ensemble des administrations concernées et nous avions alors des questions plus précises. À mesure que l'affaire se développait, nous avions plus de questions que de réponses à nos questions. Nous avons rencontré Santé publique France, l'ANSES, la DGS, la DGAL, ensemble dans une même salle. Parmi nos questions, il en était une aussi que je n'ai pas encore signalée : d'autres produits que des laits infantiles sortaient-ils de l'usine de Craon ? Nous avons trouvé, tout simplement sur internet, la fiche technique d'une poudre de lait Président, qui, semble-t-il, serait fabriquée à Craon mais n'a pas été retirée du marché. Les ministères semblaient avoir connaissance du fait, mais n'ont pas souhaité répondre. Sur la fréquence des contrôles et leur type, nous n'avons pas eu de réponse non plus.

Le fait qu'il y ait eu des autocontrôles positifs entre 2005 et 2017 est public : il figure dans le compte rendu de l'audition de M. Dehaumont au Sénat. Il indique qu'en 2017, Lactalis a révélé à la DGAL qu'il y avait eu des contrôles positifs entre ces dates, notamment en 2011, 2012 et 2013. Découvrant cela quelques jours après notre rencontre avec la DGAL, nous sommes un peu tombés des nues ! Nous avons demandé plus d'information à M. Dehaumont par mail : de quel type de salmonelle s'agissait-il ? Ces produits avaient-ils été mis sur le marché ? On nous a répondu par un refus de nous transmettre ces informations, ce qui a motivé notre décision de saisir, hier, la CADA. Et nous saisirons la justice administrative s'il le faut.

Une constante tout au long de l'affaire a été cette difficulté d'obtenir l'information. Je mentionnais l'arrêté du préfet de la Mayenne : c'était alors le seul document mentionnant qu'il y avait eu des contrôles positifs dans cette usine et c'est sur cette base qu'il faisait fermer l'usine. Cet arrêté n'a été rendu public que vingt jours plus tard, car un journaliste a appelé le préfet pour lui dire qu'il était dans l'illégalité. Nous-mêmes avions demandé la publication de cet arrêté aux services du préfet qui nous l'ont refusé. Et il y a bien d'autres cas pour illustrer cette difficulté d'accès à l'information, surtout quand on se trouve dans une procédure juridique. Mais pour l'instant, s'il y a un secret de l'enquête, il n'y a pas de secret de l'instruction dans cette affaire, puisqu'on n'a pas nommé de juge d'instruction. Les gens sont donc libres de communiquer les informations qu'ils détiennent.

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