Permettez-moi de présenter rapidement l'Union des entreprises de proximité (U2P), son nom et son périmètre d'intervention ayant changé depuis le début de l'année. L'U2P est une organisation patronale qui représente les entreprises artisanales, le commerce de proximité et les professions libérales, ces dernières ayant rejoint, il y a quelques mois, l'Union professionnelle artisanale (UPA) qui était auparavant l'organisation représentative de l'artisanat. Notre organisation représente 2,3 millions d'entreprises de petite taille. Ses souhaits sont précis au regard de l'activité de ces entreprises.
Cela fait longtemps que nous faisons le constat que les règles qui s'appliquent aux entreprises ne sont pas conçues pour celles que je représente. Nous vivons dans un monde d'insécurité totale, avec des règles qui ne correspondent pas à notre fonctionnement. Notre souhait est de parvenir demain à des règles qui soient compatibles avec la taille de nos entreprises. Comme l'a dit Alexandre Saubot, plus de 95 % des entreprises en France comptent moins de vingt salariés. Il ne s'agit pas d'opposer les petites entreprises et les multinationales, mais nous avons tous besoin d'une économie de proximité. Les entreprises de petite taille sont indispensables au développement économique et à la relation sociale des territoires. Notre objectif est donc d'aboutir à un texte qui permette à nos collègues de travailler dans des conditions de sécurité, d'information, tout en respectant naturellement le droit de nos salariés, que l'on appelle pour beaucoup les compagnons, ce qui montre bien le type de relations qui existe dans nos entreprises.
Le texte que vous allez voter demain doit être fait pour les 95 % d'entreprises les plus nombreuses, sachant que nous comprenons très bien que les grandes entreprises doivent avoir des dispositions qui leur sont adaptées.
Comme Alexandre Saubot, nous attachons une très grande importance au dialogue social. La France ne peut pas fonctionner sans un dialogue social totalement opérationnel. Mais dans une entreprise qui compte un, deux ou trois salariés, l'accord d'entreprise n'a pas de sens en termes de réalisation ni de relations, d'abord en raison d'une insécurité juridique très forte pour nos collègues. Nos entreprises n'ayant pas de conseiller juridique, elles ne sont pas certaines que l'accord d'entreprise soit totalement stabilisé. L'accord de branche est pour nous la référence indispensable.
En dehors de la nécessité que l'accord soit respecté partout, il doit être possible, dans un certain nombre de domaines, d'y déroger, de façon à avoir la souplesse suffisante dans l'entreprise en fonction de son activité, de sa situation. Nous avons proposé à la ministre que cette dérogation à l'accord de branche ne puisse se faire que dans la mesure où un équivalent serait proposé aux salariés. La dérogation ne signifie pas une moins-value pour le salarié, mais une adaptation dans l'entreprise pour qu'elle puisse fonctionner dans de bonnes conditions.
Nous savons que beaucoup de nos collègues préfèrent aujourd'hui avoir deux entreprises de cinq ou six salariés plutôt qu'une seule de onze ou douze salariés. Nous proposons donc la suppression du seuil intermédiaire entre zéro et cinquante salariés. Certains d'entre vous trouveront que c'est beaucoup, mais nous vous demandons de comprendre que, comme 95 % des entreprises comptent moins de vingt salariés, il doit, à tout le moins, ne pas y avoir de seuil compris entre zéro et vingt salariés. D'ailleurs, la réalité montre que seulement 15 % des entreprises de plus de onze salariés ont un délégué du personnel. Il est donc inutile de conserver dans un texte une disposition qui n'est pas appliquée.
Chez nous, le mandatement syndical n'a pas non plus de sens. C'est pourquoi nous avons créé en 2001 dans l'artisanat, les commissions paritaires régionales interprofessionnelles de l'artisanat (CPRIA), et depuis quelques mois dans les professions libérales, les commissions paritaires régionales interprofessionnelles des professions libérales (CPRIPL), instances de concertation qui permettent des échanges dans les territoires en dehors de l'entreprise entre les organisations syndicales de salariés et notre organisation professionnelle.
Il est important que nous puissions travailler, dans le cadre des ordonnances, sur des éléments de la vie quotidienne. Pour illustrer mon propos, je prendrai l'exemple d'une entreprise de deux ou trois salariés dont l'un d'eux se blesse, le week-end, en pratiquant un sport. S'il est inapte au travail, c'est le chef d'entreprise qui doit payer son licenciement alors même que cette inaptitude soudaine n'est pas due à l'activité de l'entreprise. Vous pourrez vérifier dans vos territoires que de telles situations ont causé des dégâts très importants dans nos entreprises, les mettant en péril quand elles doivent verser jusqu'à 20 000 ou 30 000 euros. Bien évidemment, nous ne remettons pas en cause la nécessité de garantir au salarié l'accès aux soins et à un accompagnement, mais nous estimons que ce dispositif devrait être mutualisé, et non pris en charge par l'entreprise seule, dès lors que l'accident ne relève pas de sa responsabilité. Aux prud'hommes, nos collègues se font bien souvent sanctionner pour des raisons de forme alors qu'ils ne sont pas en faute sur le fond. Là aussi, il conviendrait de privilégier le fond plutôt que la forme.
Lorsque l'un de nos collègues est contraint de licencier, ce qui est souvent pour nous un drame, il est évident que le délai de recours qui peut aller jusqu'à deux ans devrait être limité à quelques mois, un tel délai faisant vivre les chefs d'entreprise dans l'insécurité.
Le potentiel d'embauche dans nos entreprises est très important dans une situation économique favorable, mais dans une période de chômage très forte, des centaines de milliers de nos collègues préfèrent ne pas recruter du fait de l'insécurité dans laquelle ils se trouvent. Tout en garantissant les droits des salariés, nous vous demandons donc de la simplification, car sur les 2,3 millions d'entreprises que nous représentons, je suis persuadé que moins de 20 % sont certaines d'être totalement en règle. Les textes sont tellement volumineux que l'insécurité juridique est un réel frein à l'embauche dans nos entreprises.