Intervention de Anne Debar

Réunion du jeudi 29 mars 2018 à 9h00
Mission d'information sur la gestion des évènements climatiques majeurs dans les zones littorales de l'hexagone et des outre-mer

Anne Debar, directrice générale adjointe de Météo-France :

Je reviendrai également ensuite sur les événements survenus aux Antilles l'année dernière.

Météo-France exerce une veille permanente. En amont, dès que nous détectons les signes d'un possible événement majeur, nous transmettons, en général sept jours avant, un bulletin de phénomène remarquable, aux autorités, en l'occurrence au centre opérationnel de gestion interministérielle des crises (COGIC), sous la tutelle du ministère de l'intérieur, et à la cellule ministérielle de veille opérationnelle et d'alerte (CMVOA) au ministère en charge des transports, ainsi qu'aux préfectures. Puis, à partir de vingt-quatre heures avant l'échéance, nous sommes en état de mettre en oeuvre le dispositif de vigilance, sous forme d'une information unifiée, à la fois aux autorités en charge de la gestion de crise, au grand public et aux médias.

Ce dispositif a été mis en place en 2001 et a été régulièrement enrichi en tirant la leçon des événements. Il permet de publier deux cartes, l'une à six heures du matin et l'autre à seize heures, s'agissant de la métropole. Nous publions aussi d'autres cartes si nécessaire. En fonction de la couleur affectée à chaque département, le dispositif permet d'activer des mesures spécifiques. Le niveau de vigilance jaune ne signifie pas d'emblée que l'aléa sera grave, mais vise à inciter le grand public à prendre des dispositions s'agissant d'activités qui peuvent être sensibles à la météo. Les niveaux orange et rouge en revanche, déclenchent automatiquement des mesures de prévention et de protection de la part des autorités concernées, sécurité civile, préfectures, les centres opérationnels de zone (COZ), ou encore les mairies. En cas de vigilance rouge, Météo-France met en place sa propre cellule de crise qui est en relation permanente avec le ministère de l'intérieur, au niveau national et régional.

En outre-mer, le système de vigilance a des particularités locales, comme le suivi spécifique des saisons cycloniques. Nous pouvons détecter assez tôt une cyclogenèse, c'est-à-dire la naissance d'un cyclone, en liaison avec les CRMS, et nous pouvons diffuser un bulletin cyclonal cinq ou six jours avant l'événement. Puis, entre quarante-huit et soixante-douze heures, nous sommes en mesure de proposer à la préfecture de déclencher une préalerte, voire une alerte cyclonique. Lorsqu'un territoire est menacé, nous diffusons des bulletins et des cartes pour affiner la connaissance de l'intensité du cyclone, et de sa trajectoire, ce qui est le plus difficile.

Pour résumer, Météo-France va à la fois déclencher le dispositif d'information de l'ensemble des acteurs, c'est-à-dire les autorités mais aussi les populations, puis, lorsque l'événement est en cours, conseiller les autorités dans la gestion de crise.

Pour illustrer ce dispositif général, revenons sur les trois événements qui ont touché les Antilles, de façon très différente d'ailleurs, Irma, José et Maria.

S'agissant d'Irma, tempête dite « cap-verdienne » puisqu'elle s'est formée au large des îles du Cap-Vert, dès le 30 août il a été possible d'anticiper qu'elle deviendrait un événement majeur, sans pouvoir alors préciser ce que serait sa trajectoire de façon assez détaillée pour évaluer son impact sur les Antilles. Irma, à partir du 31 août, a faibli un peu et présenté une trajectoire assez atypique, dont on a constaté à partir du 4 septembre qu'elle menacerait directement les Antilles. On a alors émis un avis de vigilance cyclonique orange pour Saint-Martin et Saint-Barthélemy. José était une structure plus petite et il est passé à une certaine distance de la Guadeloupe et la Martinique, engendrant des pluies plutôt que des destructions.

Maria était un cyclone dit « barbadien », dont les caractéristiques et la trajectoire sont très différents et qui n'atteignent pas forcément le stade d'ouragan majeur. Son évolution a surpris le CMRS de Miami et nos services aux Antilles. Lorsqu'on l'a détecté, on lui attribuait une intensité assez faible. La menace a été réévaluée régulièrement, mais les experts ne s'attendaient pas à cette tournure explosive, et au passage en catégorie 5, à proximité de l'arc antillais, qui a provoqué des dommages importants en Martinique et surtout en Guadeloupe.

Ce que ces événements nous enseignent est que, si Météo-France a, ces dernières années, affiné la qualité des prévisions, tant sur l'intensité que sur la trajectoire, il faut encore progresser dans cette voie. Les phénomènes cycloniques sont extrêmement complexes et sujets à des dynamiques de petite échelle dans l'oeil du cyclone et à des interactions avec l'océan, comme les chercheurs que vous avez auditionnés ont pu vous l'expliquer. Il reste donc de grandes incertitudes non pour les détecter – on le fait très en amont – mais pour anticiper leur trajectoire et leur intensité. Nous avons, comme le disait M. Lacave, une marge de progression notamment grâce au développement de la puissance de calcul.

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